J’cours les concours, bis

Une traduction pour unfriend ? Il en était question aujourd’hui, sur les ondes de Radio-Canada, à l’émission de Christiane Charette. Guy Bertrand proposait élaminer (sur le modèle d’éliminer), excaminier (excommunier) et amicider (trucider). Marie-Éva de Villers y allait d’amiradier (et elle citait l’amizapper de l’Oreille tendue). Pour d’autres suggestions, on peut voir les commentaires des auditeurs : désamister, désamilister, radiamier, désamiller, dénami. Débat ouvert.

J’cours les concours

Dans certaines aires linguistiques, l’attention à la vie de la langue prend la forme de concours annuels.

En Allemagne, cela existe depuis 1971, sous l’égide de la Société pour la langue allemande (Gesellschaft für die deutsche Sprache). Francesca Predazzi et Vanna Vannuccini, dans leur Petit voyage dans l’âme allemande (2007, p. 221-225), sont allées fureter de ce côté-là. (L’Oreille tendue a déjà eu l’occasion de parler de leur livre ici.)

Dans le monde anglo-saxon, les concours sont nombreux.

Les éditeurs du Merriam-Webster choisissent leur mot de l’année en fonction des fréquences de recherche sur la version en ligne de leur dictionnaire. Le gagnant pour 2009 ? To admonish (admonester), devant inaugurate, pandemic, furlough et rogue. Pourquoi ? «Le mot, qui remonte au XIVe siècle, a connu un regain de popularité quand le Congrès américain a “admonesté” le représentant Joe Wilson pour avoir publiquement traité le président Barack Obama de menteur lors de son discours au Congrès» (le Devoir, 21-22 novembre 2009, p. A4).

Chez Oxford University Press USA, on a retenu le verbe unfriend, soit l’action de retirer un nom de sa liste d’«amis» dans un site de réseautage social (Facebook, MySpace, etc.).

Sur Twitter, la semaine dernière, à l’instigation de Michel Dumais (@mdumais), plusieurs y sont allés de suggestions pour trouver un équivalent français à unfriend. Les résultats ?

Buter (@karlpro)

Couper (@karlpro)

Décamarader (@mcken)

Déchumer (de chum, ami, mais aussi copain ou compagnon) et donc déblonder (de blonde, amoureuse) (@patrickplante)

Décopiner (@mcken)

Se délier (@nivunicconu)

Délister, «Comme délester» (@nicolasdickner)

Dépoter (@mcken)

Désamifier (@embruns) — Attention : le mot «pourrait prêter à confusion avec désâmifier» (@slyberu). (Libération a consacré un article à cette proposition.)

Détaler (@EducationMedias)

Enlever (un ami) (@vervilleguy)

Flusher (@benoitmelancon) — On va même plus loin : «À certains, on pourrait réserver la flush royale !» (@Hortensia68)

Foutre la paix (@karlpro)

Nettoyer (@Crispicrunch)

Rompre (@karlpro)

Saquer (@embruns)

Soustraire (un ami) (@vervilleguy)

Tourner les talons ou détalonner — «Vu qu’on propose talonneurs pour followers» (@Hortensia68).

Virer (@karlpro)

Ailleurs, on a vu désamicaliser.

Quel mot gagnera ce concours improvisé ?

 

Référence

Predazzi, Francesca et Vanna Vannuccini, Petit voyage dans l’âme allemande, Paris, Grasset, 2007, 239 p. Traduction de Nathalie Bauer. Édition originale : 2004.

Francesca Predazzi et Vanna Vannuccini, Petit voyage dans l’âme allemande, 2007, couverture

Du bilinguisme multiethnique

Ronald King, dans la Presse de ce matin (14 novembre 2009, cahier Sports, p. 4), se réjouit de la composition culturelle de l’équipe de football de l’Université de Montréal, les Carabins. Pour lui, cette équipe, «multiethnique et multicolore», est à l’image de la ville où elle joue : «Les Carabins, le vrai Team-Montréal, de ce Montréal qui inquiète tant le reste de la province, s’en vont-en guerre aujourd’hui contre le Rouge et Or de Laval, la Rolls-Royce des équipes de football universitaire, un club géré comme une organisation professionnelle.»

Team-Montréal.

La fin d’une saga ?

Depuis plusieurs années, au Québec, la moindre activité un brin récurrente est qualifiée de saga : «Fin de la saga du gaz» (la Presse, 3 décembre 2003, p. A7); «La saga des festivals de films, encore et toujours…» (le Devoir, 29 novembre 2005, p. B8); «Saga au cœur de Québec Inc.» (la Presse, 10 octobre 2006, cahier Affaires, p. 1).

Hier, à la radio : «le feuilleton de l’ADQ». Ouf.

Il est toujours agréable de constater que l’écosystème linguistique arrive à se renouveler, même s’il doit pour cela revenir à des formes depuis longtemps attestées.

Ne se veut pas qui veut

Se vouloir. En bonne logique, ce verbe ne devrait pas être employé avec un sujet inanimé.

Il n’y a donc aucune raison d’écrire : «Apocalypse se veut une mémoire vive pour les jeunes générations» (le Devoir, 7-8 novembre 2009, p. B8). Une série documentaire ne peut pas avoir de volonté.

Et l’Oreille tendue ne parle même pas de cette bien étrange «mémoire vive».