Deux zeugmes pour le prix d’un

Jean Echenoz, Caprice de la reine, 2014, couverture

«Au cours d’une conversation, sous la neige et d’abord technique avec un ingénieur local, Gluck en vint pour une fois à raconter un peu sa vie, d’abord professionnelle puis, de fil en aiguille, privée. Mieux vaut en effet, si l’on veut bien se confier, le faire auprès de parfaits inconnus, si possible étrangers car on évoque mieux ses tourments dans une langue qu’on maîtrise mal : le handicap est tel qu’on va plus droit au but. En battant la semelle et en mauvais anglais, Gluck avait donc évoqué son passé, son veuvage, le poids de sa solitude et jusqu’au profil d’une compagne idéalement souhaitée.»

Jean Echenoz, Caprice de la reine. Récits, Paris, Éditions de Minuit, 2014, 121 p., p. 71-72.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Le New York n’est pas le Boston

Gump Worlsey dans l’uniforme des Rangers de New York

Les Canadiens de Montréal — c’est du hockey — ont éliminé les Bruins de Boston jeudi soir. Ils affrontent les Rangers de New York à compter d’aujourd’hui, dans une autre étape de la grande danse printanière, celle qui mène vers le championnat de la Ligue nationale de hockey, la coupe Stanley.

La rivalité est ancienne entre Montréal et Boston. Elle a donné lieu à des buts spectaculaires — le 8 avril 1952, le 16 avril 1953 — et elle a eu pour conséquence une émeute.

Cela ne concerne que l’histoire ancienne, celle d’un joueur mythique, Maurice Richard.

Partant du même point d’observation (les années 1940 et 1950), qu’en est-il des relations entre Montréal et New York ? Elles ne sont pas du tout de même importance que celles avec Boston.

Richard a marqué son premier but en carrière contre les Blue Shirts, le 8 novembre 1942, et son dernier, le 20 mars 1960.

La seule autre date à retenir est celle du 17 décembre 1944. Les Rangers avaient décidé d’opposer un goon, Bob «Killer» Dill, à Maurice Richard. Mal lui (et leur) en prit. Dill fut rossé.

Cela donna lieu à nombre de jeux de mots. Dill pickle désignant, en anglais, un cornichon mariné (ou cornichon à l’aneth), des journalistes titrèrent «Dill Pickled» et «The Pickling of Bob Dill».

Cela donna aussi une longue scène (sept minutes) du film Maurice Richard de Charles Binamé en 2005. Richard y envoie trois fois Dill au tapis (sur la glace).

Aura-t-on plus consistant à se mettre sous la dent dans les prochains jours ?

Affiche du film Maurice Richard (2005) de Charles Binamé

 

Autopromotion 120

Concours Gagnez un exemplaire de Langue de puck

Del Busso éditeur lance un concours.

GAGNEZ UN EXEMPLAIRE DE LANGUE DE PUCK !

Comme le chante Loco Locass, «Au printemps la fièvre est universelle» à Montréal. Cette fièvre est celle du hockey.

Et Del Busso éditeur veut la faire monter !

Pendant le match du 17 mai entre les Canadiens et les Rangers, de la mise au jeu initiale au coup de sifflet final, la maison fera tirer cinq exemplaires de Langue de puck. Abécédaire du hockey de Benoît Melançon.

Quelles sont les règles du jeu ? C’est simple : tout se passe sur Twitter.

Il suffit d’écrire un tweet contenant deux choses :

votre mot favori de la langue du hockey;

le mot-clic #ConcoursPuck.

Les cinq gagnants seront tirés au hasard à la fin du match.

À vos claviers !

 

[Complément du 17 mai 2014]

Tirage au sort officiel de #ConcoursPuck

 

Et les gagnants sont…

@epheanor : «Escarmouche devant le filet… Mais on ira pas plus loin.»

@helenebougie : «La mêlée éclate.»

@jacquescostaud : «McDonagh a mangé les trios de Brière et Gallagher.»

@MarioAsselin : «“Il y aura un peu de rapiéçage à faire au moral” – Pierre Houde.»

@sofimartino : «Si le Canadien a gagné en équipe jusqu’à maintenant, on peut dire qu’aujourd’hui, il perd en équipe.»

(Pour recevoir leur exemplaire du livre, les gagnants doivent envoyer un courriel ici avec leurs coordonnées postales.)

Merci à tous les participants.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014), couverture

 

Autopromotion 119

Jean Echenoz, Caprice de la reine, 2014, couverture

«Après quoi les Lumières sérieuses et méthodiques
allaient repenser tous ces acquis en profondeur […].»
Jean Echenoz, Caprice de la reine

Le 16 mai 1992, l’Oreille tendue publiait sa première bibliographie électronique du XVIIIe siècle.

La 246e livraison a été servie tout à l’heure, vingt-deux ans plus tard. Elle se trouve de ce côté.

 

Référence

Echenoz, Jean, Caprice de la reine. Récits, Paris, Éditions de Minuit, 2014, 121 p.

La classe de Milan Lucic

Pozier, Bernard, Les poètes chanteront ce but, 1991, couverture

Qui n’a pas, un jour, rêvé de créer le joueur de hockey idéal ? Pas un être de bric et de broc, comme Frankenstein, mais le hockeyeur parfait, rassemblant tous les talents nécessaires à la pratique de ce sport.

Dans son recueil Les poètes chanteront ce but (1991), Bernard Pozier propose ainsi deux portraits composites. «Génétique 1» dépeint un joueur qui aurait, entre autres attributs, «la frappe de Guy Lafleur» et «l’élégance de Jean Béliveau» (p. 30). Le gardien de but de «Génétique 2» mêlerait «la bonhommie de Lorne Worsley» et «la jeunesse de Patrick Roy» (p. 31).

Jean-François Bégin ne fait pas autrement dans la Presse du 3 avril 2004. Son «Canadien ultime» aurait, par exemple, «Un bras de Chris Nilan» et «Un bras d’Émile “Butch” Bouchard».

Il manquait toutefois quelque chose à ce patchwork sportif : la classe.

Milan Lucic et P.K. Subban, 14 mai 2014

Avant-hier soir, les Canadiens de Montréal ont éliminé les Bruins de Boston en sept matchs. La victoire acquise, les joueurs des deux équipes se sont réunis au centre de la glace pour se serrer la main. Commentaire de Milan Lucic, le numéro 17 des Bruins, à l’endroit de Dale Weise, le 22 des Canadiens : «I’m going to fucking kill you next year» (ou quelque chose d’approchant). Pour le dire autrement : chronique d’une mort annoncée.

Donc, désormais : «la classe de Milan Lucic».

P.-S. — Le Toronto Star du 15 mai rappelle, non sans ironie, que Milan Lucic est le cosignataire d’un livre contre l’intimidation, Not Cool to Bully in School. Ça ne s’invente pas. (Merci à @PaulJournet pour le lien.)

P.-P.-S. — On ne s’étonnera pas de voir Pozier parler du «feu des yeux de Maurice Richard» (p. 30) et Bégin, des «yeux de Maurice Richard». L’Oreille tendue a écrit tout un livre là-dessus.

 

[Complément du 16 mai 2014]

Et pour la garde-robe du parfait gentilhomme… (Merci à @Val_Sicotte, via @NieDesrochers.)

Milan Lucic, le t-shirt

 

 

Références

Bégin, Jean-François, «Le Canadien ultime», la Presse, 3 avril 2004, p. S1. Illustration de Francis Léveillé.

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Pozier, Bernard, Les poètes chanteront ce but, Trois-Rivières, Écrits des Forges, coll. «Radar», 60, 1991, 84 p. Ill. Réédition : Trois-Rivières, Écrits des Forges, 2004, 102 p.

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture