Abécédaire I

26 lettres, Montréal, 2014, couverture

(L’Oreille tendue aime les abécédaires. Elle en a publié un sur la langue de puck, et son Bangkok en a presque été un. Dans les jours qui viennent, quelques notes sur des abécédaires lus récemment.)

«Le Québec de 2014 est vendu au plus offrant
et cette vente aux enchères comprend la langue.»
Olivier Choinière

26 lettres est un abécédaire collectif conçu et mené à terme par Olivier Choinière. C’est aussi le texte d’un spectacle théâtral monté à Montréal les 10 et 11 décembre 2014.

Au départ, des contraintes. Olivier Choinière choisit un mot et le confie à un auteur. Cet auteur doit rédiger un texte court (au maximum, trois minutes de lecture) et l’adresser à quelqu’un. Le texte est inclus dans l’ouvrage et lu sur scène. Le lendemain de la lecture publique, la lettre est expédiée à son destinataire. Quels mots ?

[…] je veux donc t’inviter à te pencher sur un mot qui a été vidé de son sens ou qui est en voie de l’être.

Soyons précis : un mot en perte de sens est sans doute un mot galvaudé, c’est-à-dire un mot altéré, gâché, pourri par un mauvais usage. Le sens se perd également quand un mot devient fourre-tout et que chacun y met ce qui lui plait. Cette année, je me suis attardé aux mots dont l’usage par le monde politique, médiatique, publicitaire, entrepreneurial et artistique participe à un véritable détournement du langage, rendant notre tâche à nous, auteurs, plutôt difficile. Comment écrire avec des mots qui ne veulent plus rien dire ? (p. 10)

Parmi les destinataires, il y a plusieurs personnalités publiques : des politiques (Gaétan Barrette, Yves Bolduc, deux fois, Philippe Couillard, David Heurtel, Denis Lebel, Colette Roy-Laroche, Stéphanie Vallée), des culturels (Simon Brault, Jean-Claude Germain, Lorraine Pintal, Michel Tremblay), un/e people (Mado Lamotte), un religieux (le dalaï-lama), un fonctionnaire (Michael Ferguson). Souvent, surtout dans les premiers textes, on écrit à sa famille : fille, mère, père, filleule, parents. Olivier Choinière aura du mal à rejoindre au moins trois des destinataires : Sarah Berthiaume écrit «à la première forme de vie extraterrestre disponible» (p. 94); David Paquet, «à une des clientes du spa Bota Bota» (p. 98); Jean-Frédéric Mercier, «à un pure laine» croisé dans le métro (p. 105-106), à qui il propose une belle réflexion sur l’identité. Jean-Claude Germain écrit une lettre sur le mot «Oui» et il en reçoit une («Zombie») de Sébastien David (qui pensait que son destinataire était mort !). On aimerait bien savoir si le dalaï-lama va répondre à Larry Tremblay («Québécois»).

Certains textes, difficiles à distinguer d’une lettre ouverte ou d’un éditorial, ont laissé l’Oreille tendue indifférente : sur Pierre Karl Péladeau («Intellectuel»), sur le transport du pétrole («Lucide», «Progrès»), contre la directrice du Théâtre du Nouveau-Monde («Radical»), sur la «Transparence».

D’autres, en revanche, sortent de la simple grogne. Des blessures intimes sont évoquées par Carole Fréchette («Beau», pour sa mère), Anne-Marie Olivier («Changement», pour son père), Justin Laramée («Débat», pour son père absent) et Rébecca Déraspe («Excellence», pour une psychiatre). Michel Marc Bouchard («Sens (gros bon)») est dur envers lui-même quand il évoque une rencontre avec le ministre conservateur Denis Lebel. C’est par l’humour que certains abordent le mot qu’on leur a imposé : Catherine Léger et «Féminisme», Fabien Cloutier et «Monde (le vrai)», Marie-Hélène Larose-Truchon et «Yoga (extrême)» («Je reste concentrée sur mon plein déni intérieur», p. 111). Il ne suffit pas de s’opposer au nouveau sens d’un mot; encore faut-il dramatiser sa transformation.

Dans 26 lettres, il est question de vie numérique («J’aime», Annick Lefebvre) et de vie culturelle («Humour», Jean-Michel Girouard; «What ?», Guillaume Corbeil, sur le théâtre). On parle très souvent de politique provinciale : on se souvient des grèves étudiantes de 2012 («Gauche (la)», Lise Vaillancourt) et, douloureusement, de l’élection du Parti libéral du Québec en 2014. On aborde cependant peu l’économie. Cela s’explique peut-être par l’actualité : écrivant en août et septembre 2014, les auteurs n’ont pas eu l’occasion de connaître à ce moment-là les débats sémantiques actuels sur la distinction entre rigueur et austérité. C’est au jour le jour que la langue évolue.

L’entreprise d’Olivier Choinière est à saluer. Parler de «viol de la langue» (p. 118) est peut-être un peu fort, mais il est vrai que les mots sont des choses précieuses dont il faut suivre l’évolution.

P.-S. — «Puis, un jour, tu m’as partagé une idée qui était chère à ton cœur […]», dit Stéphane Crête («Nouveau», p. 67). Me partager ? Non.

«le Québec demeure plus que jamais
une terre où il fait bon hésiter»
(Larry Tremblay)

 

Référence

Choinière, Olivier (édit.), 26 lettres. Abécédaire des mots en perte de sens, Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 02, 2014, 125 p.

«J’ai pourtant le souvenir des guerres heureuses»

Samuel Mercier, les Années de guerre, 2014, couverture

Soit les Années de guerre (2014), le premier recueil de poésie de Samuel Mercier.

Il a ses dates, par exemple le 11 septembre 2001 (p. 8, p. 37).

Il a ses strates historiques, ce «Pompéi de cabanons et de piscines hors terre» (p. 25) ou ce miniputt «construit […] sur le cimetière indien» (p. 26).

Il a ses objets : écrans (d’ordinateur, de télévision), diapositive, drones, cocotte-minute, cartouches, horloges («le temps est une charogne», p. 41).

Il a une considérable ménagerie : oies, chats, coyotes, rats, moutons, chameaux, vaches, espadons, effraies, chiens (et un chien-loup), hiboux, ours, oiseaux, hamsters, mouches.

Il a sa lumière (artificielle) :

tu traverses un corridor
enveloppée de lumières gouvernementales
auréole verdâtre cernée
de plafonds suspendus (p. 44)

Il a sa géographie — déserts, steppes et plaines gelées —, ses lieux — lointains (Bagdad, Kandahar, Rome, Carthage, Sebastopol, Hambourg, Spinazzola, Villach) comme proches, Rivière-du-Loup ou la Victoriaville du Printemps érable :

une fille tenait ses dents
dans ses mains
comme les perles
d’un collier brisé

pourtant même sans ses dents
elle était belle
dans l’air irrespirable
de Victoriaville (p. 46)

Il a ses souvenirs des langues toutes faites, notamment celle de la publicité et des médias, indistinctement : «le prix du brut est en hausse» (p. 13).

Il a ses reprises et variations (c’est un des traits les plus frappants du recueil). Que trouve-t-on d’une ville à l’autre ? Des Tim Hortons et des Walmart (p. 24 et p. 47). Là, des «pots de bégonias au centre des boulevards» (p. 24); ici, «des pots à fleurs / sur le terre-plein du boulevard» (p 46). Une «voisine» a bu «tout le pot de vernis à ongles» (p. 25); est-ce la mère de ces enfants qui «ont des dents / comme du vernis à ongles» (p. 50) ? Il y aurait des «guerres heureuses»; c’est dit deux fois (p. 22, p. 55).

Il a, pourtant, ses trous de mémoire :

j’ai depuis longtemps
pris l’habitude de vivre
avec des souvenirs empruntés (p. 7)

Il a ses (rares) particularismes : dans «le soir les frémilles / venaient brûler / sur les lumières / du terrain de baseball» (p. 15), que désignent «frémilles» ? Des fourmis ?

Il a ses prises de position nettes en matière de poésie :

nous n’avons plus besoin de poésie
ni d’épopée ni de rien (p. 18)

de toute façon il est trop tard
pour parler poésie (p. 40)

quand tout est à la déconfiture
et que les poèmes
ne parlent plus
que de poésie (p. 57)

Il doit avoir ses lecteurs.

 

Référence

Mercier, Samuel, les Années de guerre, Montréal, l’Hexagone, 2014, 60 p.

Bref dictionnaire de Révolutions

Dominique Fortier et Nicolas Dickner, Révolutions, 2014, couverture

Dominique Fortier fait une proposition à Nicolas Dickner : à deux, «écrire tous les jours quelques lignes sur le thème proposé par le calendrier révolutionnaire» (p. 424), celui que l’on doit à Fabre d’Églantine (1750-1794) et à André Thouin (1747-1824). Dickner, qui est un geek, code alors une application, qu’il appelle Jeeves, «du nom de ce majordome surdoué né de la plume de P.G. Wodehouse» : «Chaque jour, à minuit pile, Jeeves nous enverrait le mot du jour» (p. 250). Après quoi, chacun rédige un texte. Parfois, le lien est direct entre le texte et le mot que ce texte accompagne; parfois, moins.

Cela donne Révolutions (2014), livre à deux têtes, quatre mains, 366 jours et 732 entrées. Son contenu ? Des souvenirs, des descriptions, des évocations, des portraits (d’humains et d’animaux), des choses vues, des citations, des notes érudites, des contes, des dialogues, des recettes, des listes, des instantanés de voyage, des chansons, etc. En un mot : des miscellanées. Ou encore : le «bonheur tranquille des petites sérendipités quotidiennes» (p. 125).

Mais qu’est-ce que ce calendrier révolutionnaire ?

Le calendrier révolutionnaire, en usage de 1793 à 1806 [en France], prétendait mettre un terme au règne des saints et des saintes qui peuplaient le calendrier grégorien pour marquer les jours au sceau de plantes, d’animaux et d’outils davantage en accord avec les vertus républicaines. Ses concepteurs le divisèrent en douze mois, chacun composé de trois décades constituées de huit végétaux, d’un animal et d’un outil; à ces mois tous égaux succédaient cinq ou six sans-culottides (selon qu’il s’agissait ou non d’une année bissextile), journées dédiées à des vertus particulières, ce qui donnait un tour de l’an complet : une révolution (p. 5; voir la liste des noms de mois).

Comme il se doit, l’ouvrage est tiré à 1793 exemplaires, numérotés (l’Oreille tendue a le numéro 1049).

Plutôt, pour en parler, qu’un (autre) calendrier, ce bref dictionnaire.

Autoréflexivité. C’était couru : une fois le projet lancé, les auteurs allaient se mettre à le commenter, à revenir sur les textes déjà écrits. Plus il avancent, plus c’est vrai. En nivôse : «Et si ce livre écrit à quatre mains était de ce genre d’hybrides ? Journalmanach; éphémémoires; calencyclopédie ?» (p. 122) En floréal : «C’est n’importe quoi, ce calendrier, et pour tout dire je commence à être mécontent» (p. 264). En fructidor : «Tu as raison, Nicolas, de voir dans ce calendrier une série de nuages que nous observons tous les jours chacun de notre côté en nous efforçant d’y discerner des formes plus ou moins fantaisistes selon notre humeur» (p. 407). Comment ne pas se remettre en question dans un projet de longue haleine comme celui-là ?

Barthes. (Remarque de pion) L’érudition ne fait défaut ni à l’un ni à l’autre, qu’il s’agisse de plantes, d’animaux, d’outils, etc., et dans des domaines où l’ignorance de l’Oreille tendue est considérable. Il est pourtant un domaine où elle peut pinailler. Page 221, il est question d’un «curieux homme-arbre du début du dix-neuvième siècle» (oto-italiques), au-dessus de cette illustration.

 

Planche d’anatomie, Encyclopédie, 1762

Or cette image est tirée de la section «Anatomie» du premier volume des planches de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, qui a paru en 1762. (Si ça se trouve, les encyclopédistes l’avaient eux-mêmes pompée à un traité d’anatomie.) On se souviendra que Roland Barthes l’a commentée en 1964.

S’il est bon de respecter les jours, il l’est tout autant de ne pas confondre les siècles.

Borges. Bien sûr, dès l’épigraphe.

Calendaristes. Fortier et Dickner, cette «paire de citoyens curieux» (4e de couverture), ne sont pas tendres pour Fabre d’Églantine et pour André Thouin, ces «calendaristes». Ils leur reprochent des oublis : où est l’épouvantail ? «Ils vont vraiment nous faire une année complète sans la moindre banane ?» (p. 353) Ils n’apprécient pas les (quasi-)doublons, ces répétitions inutiles à leurs yeux. Ils inventent des scénarios dans lesquels l’un (Thouin) empoisonne l’autre (Fabre d’Églantine). Du second, la guillotine s’occupera : l’auteur de «Il pleut, il pleut, bergère» finira «petite fleur tristement étêtée par le cours implacable de l’histoire» (p. 321).

Épicurien. «Je suis épicurien, sans doute, en ce sens que j’aime bien pouvoir me contenter de peu» (p. 366). Voilà, enfin, quelqu’un qui comprend ce qu’est l’épicurisme.

Famille. Ils ont chacun une vie de couple. Lui a des enfants et il parle beaucoup de son père. Elle apprend, en floréal, qu’elle est enceinte. Le dernier jour de fructidor, Victor, son chien, meurt. Elle se souvient de sa sœur.

Geek. Nicolas Dickner n’hésite pas à dire de lui-même qu’il est un geek. Le terme s’appliquerait tout également à Dominique Fortier, mais dans des domaines différents. Lui, entre autres choses : l’informatique, William Gibson, Neil Stephenson. Elle, entre autres choses : les odeurs, les couleurs, la nourriture. (N’allons pas la traiter de foodie.) Pas moins spécialisés l’un que l’autre. (Et ils sont tous les deux toujours fourrés dans Gallica et Google Books.)

Lettre. Les données de catalogage de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et de Bibliothèques et Archives Canada invitent à ranger l’ouvrage parmi les correspondances. Il a, en effet, quelque chose de l’échange épistolaire («Chère Dominique», «Cher Nicolas»), sans toutefois l’alternance parfaitement régulière des tours de parole. Il reste que les auteurs s’adressent autant l’un à l’autre qu’à leurs lecteurs.

Parfum. Ce n’est peut-être pas vrai de tous les exemplaires, mais le numéro 1049 avait un fort parfum «chimique» (à défaut de meilleur terme). D’où cela venait-il ? Du papier ? De la colle ? De l’encre ? Mystère.

Pastiche. En germinal, ils inversent les rôles (p. 240). Peut-être.

Printemps érable. Le livre a été composé de septembre 2011 à septembre 2012. Il y est pourtant assez peu question des grèves étudiantes de 2012 (p. 293, p. 302). Une phrase les évoque explicitement, qui mérite d’être citée : «Quelques minutes avant vingt heures, les casseroles sont apparues sur les trottoirs, formant des attroupements aux intersections» (p. 297). Pour être compréhensibles aujourd’hui, certains termes du calendrier républicain demandent des explications. Ce sera aussi le cas un jour pour ces «casseroles» qui formaient «attroupements» il y a deux ans.

Renvois circulaires. «Escourgeon» : «Voir Sucrion» (p. 389). «Sucrion» : «Voir Escourgeon» (p. 391). Diderot et D’Alembert n’auraient pas fait mieux.

Sport. Ce n’est pas leur truc (mais c’est celui de l’Oreille). Signalons toutefois cette chose inattendue qu’est la «boxe poitevine», dans laquelle Nini la Loutre Lutteuse se serait illustrée au début de la Révolution (p. 378).

Wikipédia. Elle s’en sert à l’occasion, lui y va quotidiennement : «Chaque matin, en recevant le mot du jour, j’ouvrais Wikipédia, puis Marie-Victorin» (p. 412). Il s’en explique précisément : «je suis assez vendu à Wikipédia — aussi bien au projet abstrait qu’à son incarnation» (p. 361). Les encyclopédies ne sont plus ce qu’elles étaient.

 

[Complément du 7 octobre 2014]

Remords, dit de conscience, de l’Oreille : la cible des attaques de Dominique Fortier et de Nicolas Dickner est bien plus Fabre d’Églantine qu’André Thouin.

C’est à cela qu’elle a pensé en tombant sur la citation suivante du vicomte Joseph-Alexandre de Ségur, le romancier de la Femme jalouse (1790).

Ségur parle de Collin d’Harleville, l’auteur de la pièce le Vieux Célibataire (1792) : «J’admire plus que tout sa superbe haine contre le septembriseur Fabre d’Églantine, qui avait plus de talent que lui. Ce drôle-là n’avait-il pas imaginé de remplacer le nom des saints du calendrier par des noms de légumes ! J’ai cherché celui qui avait pris la place de mon patron : il se trouva que je m’appelais Chou-Frisé.» Comme il se doit, Ségur avait les cheveux bouclés.

La phrase de Ségur est rapportée par Sophie Gay dans ses Salons célèbres (1837) et citée dans Ségur sans cérémonie (1977) de Gabriel de Broglie (p. 201).

 

[Complément du 10 juin 2020]

L’Oreille a repris ce texte, sous le titre «La Révolution programmée», dans le livre qu’elle a fait paraître au début de 2020, Nos Lumières.

 

Références

Barthes, Roland, «Les planches de l’Encyclopédie», dans l’Univers de l’Encyclopédie. Images d’une civilisation. Les 135 plus belles planches de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, Paris, les Libraires associés, coll. «Images d’une civilisation», 457, 1964. Repris dans le Degré zéro de l’écriture suivi de Nouveaux essais critiques, Paris, Seuil, coll. «Points. Littérature», 35, 1972, p. 89-105.

Broglie, Gabriel de, Ségur sans cérémonie. 1757-1805 ou La gaieté libertine, Paris, Perrin, coll. «Présence de l’histoire», 1977, 331 p. Ill.

Fortier, Dominique et Nicolas Dickner, Révolutions, Québec, Alto, 2014, 424 p. Ill. Sur le Web : http://editionsalto.com/revolutions/.

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

Chanter le printemps 2012

«Casseroles», chanson de Damien Robitaille

Il y a eu — et il continue d’y avoir — des livres consacrés complètement aux grèves étudiantes de 2012 au Québec. L’Oreille tendue en propose une liste, sûrement incomplète, ici.

Il y a eu des romanciers qui leur ont fait allusion, par exemple Vickie Gendreau (2012), Claire Legendre (2013), Sophie Létourneau (2013) ou William S. Messier (2013), ainsi que des bédéistes (). Autre liste évidemment incomplète.

Et on a aussi chanté le Printemps érable. C’est l’objet d’un article de Sarah Elfassy-Bitoun, paru en 2013 dans Dire. Revue des cycles supérieurs de l’Université de Montréal. L’auteure avait alors repéré six chansons, originales ou ajustées aux événements du jour : «Casseroles» de Damien Robitaille, «Casseroles» de Trois gars su’l sofa, «Jeudi 17 mai» d’Ariane Moffatt, «Monsieur l’président» de Jean-François Lessard, «Lipdub rouge» de Marc-Antoine Doyon et Véronique Dagenais, «Le Printemps québécois. Quand le peuple s’éveille…» de Mario Jean (sur un texte de Georges Moustaki). Troisième liste prévisiblement incomplète.

 

[Complément du 18 septembre 2014]

Ce billet rédigé, l’Oreille découvre une liste de plus de… trente chansons liées au Printemps érable, surtout créées par des amateurs. À lire sur le site les Tribulations d’un mouton marron, le 18 février 2013.

 

[Complément du 28 septembre 2014]

L’Oreille tendue essaie de ne pas louper un épisode du podcast musical de Ma mère était hipster, Oreille gauche / oreille droite. Pourtant, elle avait raté celui du 29 août (douzième épisode). Voilà pourquoi elle ne connaissait pas l’album Bernhari, qui porte sur le Printemps érable. Elle s’en veut.

 

Références

Elfassy-Bitoun, Sarah, «Emprunt et création musicale durant le Printemps érable : quel avenir pour la chanson contestataire ?», Dire. Revue des cycles supérieurs de l’Université de Montréal, 22, 1, hiver 2013, p. 12-19.

Gendreau, Vickie, Testament. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 60, 2012, 156 p.

Legendre, Claire, Vérité et amour. Roman, Paris, Grasset, 2013, 302 p.

Létourneau, Sophie, l’Été 95, Montréal, Le Quartanier, coll. «Nova», 5, 2013, 49 p.

Messier, William S., Dixie. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2013, 157 p. Ill.

Dessiner le Printemps érable

Marc Beaudet et Luc Boily, Gangs de rue. La marche orange, 2012, couverture

[Huitième texte d’une série sur les livres du Printemps érable. Pour une liste de ces textes, voyez ici.]

Marc Beaudet (dessins) et Luc Boily (textes) ont lancé en 2011 une série de bandes dessinées humoristiques inspirées du hockey, «Gangs de rue». Trois volumes ont paru à ce jour : les Rouges contre les bleus (2011), la Marche orange (2012), Alerte rouge (2014).

Le deuxième album s’inspire très précisément des événements du printemps 2012 au Québec.

Les «gangs de rue», une bande d’adolescents, décident de lutter contre le projet commercial d’un promoteur véreux, «Le cartier 20/60», car il les privera du boisé où ils jouent. Ils ne réussiront que partiellement : le projet sera construit, mais il tiendra compte de leurs suggestions. On y relocalisera notamment la bibliothèque Georges-Émile-Lapalme. (L’Oreille tendue a un faible pour Georges-Émile Lapalme.)

Comment sont-ils parvenus à leurs fins ? En occupant la rue casseroles à la main. En arborant, à défaut du carré rouge, un cercle orange. En défilant quasi nus. En se déguisant en panda ou en banane. En se joignant, sur le modèle de la Coalition large de l’ASSÉ (CLASSE), aux activités de la Coalition locale d’actions sociales commerciales et environnementales (CLASCE).

La «majorité silencieuse» ne l’est donc plus (p. 37). Elle «occupe la rue» (p. 15). En voyage (scolaire) à Montréal, les défenseurs du boisé Bédard assisteront même à une de ces manifestations étudiantes (p. 42) qui leur ont servi de modèle pour leur «RUEvolution tranquille» (quatrième de couverture).

On l’aura compris : cette bande dessinée ne pèche pas par excès de subtilité. C’est peut-être en cela qu’elle est utile : elle révèle clairement ce qui, du Printemps érable, est passé dans la langue courante.

P.-S. — Ce n’est pas la première fois que le Printemps érable est mis en BD (voir Je me souviendrai).

 

Références

Beaudet, Marc et Luc Boily, Gangs de rue. La marche orange, Brossard, Un monde différent, 2012, 50 p. Bande dessinée.

Je me souviendrai. 2012. Mouvement social au Québec, Antony, La boîte à bulles, coll. «Contrecœur», 2012, 246 p. Ill.