Prolégomènes à une théorie générale du «petit» au Québec

L’autre jour, sur Twitter, @GenPettersen et @ChroniquesTrad rappelaient combien petit est un mot populaire au Québec.

Voici ce qu’en écrivait l’Oreille dans son Dictionnaire québécois instantané de 2004 (avec Pierre Popovic) :

Atténuateur linguistique fort prisé dans les troquets et autres estaminets, souvent utilisé en conjonction avec le conditionnel. Je prendrais un petit apéritif, capitaine. Désireriez-vous un petit dessert, boss ? (p. 162)

À «Café», on pouvait lire :

Parler, si utilisé avec prendre un petit. On se téléphone et on va prendre un petit café (p. 34).

Il est vrai que, d’un bout à l’autre du repas, petit est beaucoup utilisé quand il s’agit de nourriture. Une dernier exemple. Que fabrique La Petite Bretonne ? «Un petit gâteau tendre et moelleux au petit goût citronné.» On n’est pas dans le registre de la grandeur.

Ce n’est pas tout.

On trouve maintenant le mot dans des oxymores (petit périple) comme dans des expressions figées (petite famille). D’autres ont été créées avec lui : avoir son petit caractère (ce qui n’est pas une qualité), se garder une petite gêne.

Petit est souvent redondant : «Je vais vous donner un petit numéro de téléphone» (Radio-Canada, août 2001); «Petit survol de l’événement Peinture extrême et de son off non officiel» (le Devoir, 24-25 juillet 2010, p. E4); «Interview avec le philosophe Charles Taylor – petit polaroid de son ouvrage L’Âge séculier» (@PaulJournet); «Garderie “La petite semence” http://bit.ly/RdcjD5 #ouch» (@LeMotZuste).

De quoi petit est-il le nom au Québec ? De cette familiarité qui explique le tutoiement spontané ? De ce grégarisme qui pousse à s’asseoir pour échanger ? Psychanalystes, à vos divans !

 

Référence

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.

Benoît Melançon, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, 2004, couverture

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2 réponses sur “Prolégomènes à une théorie générale du «petit» au Québec”

  1. P’tit propos de bouche sinon de langue

    Je retiens rarement les noms de marque des produits alimentaires que j’achète. Quand c’est le cas, c’est qu’il y a un p’tit problème. J’ai justement acheté puis jeté récemment des brioches aux fraises de La Petite Bretonne. Jeté aux ordures, et non au composteur, de peur de contaminer ce contenant. Vraiment, c’était dégueulasse en grand.

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