La télévision au Moyen Âge

Francis Gingras, un collègue, et néanmoins ami, de l’Oreille tendue, donnait samedi dernier une grande conférence à Paris. Quelques heures (!) plus tard, une revue numérique publiait ce texte passionnant sur ce que représente et sur ce qu’a représenté le Moyen Âge en Amérique du Nord. Il est en libre accès ici.

Les sous-titres de «Un autre Moyen Âge et le Moyen Âge des autres : les études médiévales vues d’Amérique» sont particulièrement réjouissants : «Les belles histoires des pays d’antan», «Le temps d’une paix», «Moi et l’autre». Les amateurs de télévision québécoise apprécieront.

P.-S. — Ce qui prédispose les médiévistes à travailler pour la CIA est expliqué au paragraphe 41.

P.-P.-S. — L’Oreille a déjà dit un mot du Québec et du Moyen Âge; c’était .

 

Référence

Gingras, Francis, «Un autre Moyen Âge et le Moyen Âge des autres : les études médiévales vues d’Amérique», article électronique, Perspectives médiévales. Revue d’épistémologie des langues et littératures du Moyen Âge, 37, 2016. https://doi.org/10.4000/peme.11022

Accouplements 40

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux textes d’horizons éloignés.)

Sur son blogue, l’excellent @machinaecrire a publié récemment deux billets au sujet de l’écriture de la poésie, l’un sur le code, l’autre sur les recettes (oui, celles de cuisine). Il ne répond pas à la question «La recette de cuisine est-elle de la poésie ?». Il laisse plutôt à son lecteur le soin de trancher, recette de Ricardo à l’appui («Tilapia et sauté de légume. Poème»).

Quelques jours plus tôt, le non moins excellent @dancohen publiait, lui aussi sur son blogue, un texte intitulé «What It’s Worth : A Review of the Wu-Tang Clan’s “Once Upon a Time in Shaolin”». Il part d’un album réservé à un seul auditeur pour s’interroger sur la nature de l’art aujourd’hui. Parlant de l’artiste visuel Sol LeWitt, il écrit : «LeWitt liked to be a recipe writer, not a chef.»

Puis, hier, le quotidien montréalais le Devoir présente une exposition à venir à la Galerie de l’Université du Québec à Montréal, Do It Montréal. Il n’y est pas question de «recettes», mais d’«instructions» et de «directives» (c’est plus noble).

Récapitulons. En 1993, Hans Ulrich Obrist, après une conversation à Paris avec les artistes Christian Boltanski et Bertrand Lavier, décide de créer une exposition qui prévoit l’interprétation à l’infini de directives artistiques données. Il demande à dix artistes de rédiger des instructions pour la création d’une œuvre. Les œuvres produites à partir de ces instructions seront documentées, par des photos, des textes ou des vidéos, puis détruites. Ces instructions seront ensuite traduites en neuf langues, et l’exposition sera reproduite ailleurs dans le monde. Alors, d’autres instructions et d’autres artistes s’ajouteront aux premiers pour former un livre de 250 instructions supervisé par l’ICI (Independent Curators International), à New York.

À Montréal, la jeune commissaire Florence-Agathe Dubé-Moreau a puisé soixante instructions dans cet imposant corpus, et en a commandé dix autres à des artistes québécois. À partir de là, c’est à vous de jouer.

De l’art d’apprêter la culture.

Le zeugme du dimanche matin et de Philippe Didion

«Au cours de ces vingt années, les Goncourt perdent la moitié de leur effectif : Jules meurt en 1870 et Edmond demeure seul aux commandes du Journal. Cet événement, ajouté à la perte de Gavarni, le meilleur des amis, à la guerre et au relatif insuccès des livres parus et de leurs adaptations théâtrales, conduit Edmond à s’enfermer de plus en plus hermétiquement dans sa maison d’Auteuil et dans une aigreur de plus en plus virulente» (Notules dominicales de culture domestique, 27 décembre 2015).

P.-S. — Les Notules ? Explication ici.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Accouplements 39

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux textes d’horizons éloignés.)

Hier soir, les Canadiens de Montréal — c’est du hockey — jouaient à Tampa Bay, contre le Lightning. (Ils ont — enfin — gagné.) Le responsable de la musique à l’Amalie Arena, en deuxième période, a fait tourner un extrait de «Radar Love» — oui, oui, la chanson de 1973 de Golden Earring.

Ce matin, l’Oreille lisait le plus récent recueil de textes de Roger Angell, This Old Man (2015) — oui, oui, le Roger Angell dont il était question ici l’autre jour. Dans un article de 1994, «Storyville», il raconte ce qu’est le travail d’éditeur de fiction à l’hebdomadaire The New Yorker. Il évoque alors le talent de Bobbie Ann Mason pour trouver le «down-home detail». Un exemple ? «[Her] people […] know that “Radar Love” is a great driving song» (p. 162).

Voilà une partie de l’adolescence de l’Oreille en quelques mots.

 

Référence

Angell, Roger, This Old Man. All in Pieces, New York, Doubleday, 2015, xii/298 p. Ill.