Les paris sont ouverts

Le premier ministre Jean Charest présentait hier, à l’Assemblée nationale, le discours inaugural de la 2e session de la 39e législature du Québec. On peut en retenir au moins deux choses.

Le gouvernement a un ambitieux «Plan nord» : «Ce Plan, qui sera réalisé en partenariat avec les Premières Nations et les Inuits, entraînera des investissements de milliards de dollars et la création de dizaines de milliers d’emplois.»

Le même gouvernement souhaite par ailleurs réintroduire le vouvoiement dans les écoles.

Si elle avait à parier, l’Oreille tendue, à regret et malgré son cynisme envers les annonces gouvernementales en matière d’économie, miserait tout sur le «Plan nord».

P.-S. — Merci à @Ant_Robitaille pour son compte rendu, sur Twitter et en temps réel, du discours du premier ministre.

Euphonie révolutionnaire

Sur Twitter et ailleurs, on s’est plaint, au cours des derniers semaines, de l’utilisation, notamment médiatique, de l’expression la rue arabe. C’est cette rue qui manifesterait en Tunisie et en Égypte.

Comme tous les clichés, celui-là a la vie dure. Seul motif de réjouissance : les Russes ne descendent pas en masse sur les places publiques. Imaginez : La rue russe rugit.

 

[Complément du 13 décembre 2011]

Dans la Presse, hier (p. A15), cette (autre) allitération : «La rue russe se rebelle.» L’Oreille tendue, malgré elle, aurait donc été prémonitoire ?

 

[Complément du 26 mars 2012]

La Presse, 26 mars 2012, p. A15 : «La rue sénégalaise exultait hier […].» On n’arrête pas le progrès.

 

[Complément du 21 novembre 2020]

Voyageons : «La rue péruvienne force une démission au sommet» (le Devoir, 16 novembre 2020, p. A1).

Vocabulaire non agricole

Titre dans le Devoir de la semaine dernière : «Émissions des vaches et des puits de gaz. La ministre serait dans le champ» (19 janvier 2011, p. A4).

Si elle est dans le champ, ce n’est pas que la ministre des Richesses naturelles et de la Faune du Québec, Nathalie Normandeau, se promène à la campagne. Qui est dans le champ se trompe, et complètement.

Quand elle affirme ceci : «Écoutez, une vache émet plus de CO2 dans l’atmosphère qu’un puits. Je veux dire que c’est factuellement prouvé», donc, elle se trompe.

Un monde sans frontières ?

À la radio de Radio-Canada, le 10 janvier, un expert expliquait que la nouvelle majorité républicaine aux États-Unis souhaitait favoriser l’indépendance énergétique du pays. Comment ? En construisant un pipeline pour transporter le pétrole de l’Alberta jusqu’au Texas. Le Canada ferait donc partie des États-Unis ?

Du nouveau sous le soleil ?

Il y avait la musique néotrad, le néolibéralisme, la néobienséance langagière et le néodiscours lexicographique, le «style néo-Yo» (le Devoir, 15 octobre 2010, p. B10).

Il y a dorénavant le néorustique : «Le néo-rustique traverse les ponts» (la Presse, cahier Gourmand, 8 janvier 2011, p. 5).

On n’arrête pas le progrès, même s’il remonte le temps.

N.B. Le trad est une musique folklorique qui refuse de se dire telle. Elle se décline, au moins, en «Trad, néo-trad, trash-trad et trad trad» (le Devoir, 29 décembre 2003).

N.B. bis. La bible de l’Oreille tendue — le Girodet — le dit : «À l’exception de néo-calédonien néo-hébridais, néo-impressionnisme, néo-impressionniste, néo-zélandais, tous les termes en néo- s’écrivent maintenant en un seul mot, sans trait d’union […]» (p. 517). Elle a évidemment raison contre le Devoir et la Presse.

 

Références

Boulanger, Jean-Claude, «Un épisode des contacts de langues : la néobienséance langagière et le néodiscours lexicographique», dans Marie-Rose Simoni-Aurembou (édit.), Français du Canada – Français de France. Actes du cinquième Colloque international de Bellême du 5 au 7 juin 1997, Tübingen, Max Niemeyer Verlag, coll. «Canadiana Romanica», 13, 2000, p. 307-324.

Girodet, Jean, Dictionnaire Bordas. Pièges et difficultés de la langue française, Paris, Bordas, coll. «Les référents», 1988 (troisième édition), 896 p.