Le sport et la vie

L’US Open — c’est du tennis — vient de se terminer. Souvenir de lecture sportive.

Le 20 août 2006, David Foster Wallace publie son «Federer as Religious Experience» dans The New York Times. Dans une des copieuses notes de son texte — il aime les notes, et longues —, il avoue son bonheur de voir jouer Federer à Flushing Meadows : il ressent «a feeling of deep personal privilege at being alive to get to see this»; il se sent privilégié d’être en vie et de pouvoir admirer ce joueur.

Il y a trois ans cette semaine, le 12 septembre 2008, David Foster Wallace se suicidait.

P.-S. — Aussi sur Federer, le site du New Yorker, en date du 11 septembre, offre une brillante analyse, signée Nick Paumgarten, «Big Shot».

Ça, c’est du sérieux

Vous pouvez tout bonnement décider de faire ceci ou cela. Vous pouvez même — l’Oreille tendue vous le souhaite — choisir de vivre. Il est vrai que cela fait un peu plouc.

Marie-Lise Labonté, dans une publicité du Devoir du samedi 10 septembre, vous propose mieux : «Nous pouvons quitter l’état de victime et nous positionner dans le choix de vivre» (p. A2).

«Se positionner dans le choix de vivre» : voilà qui inspire confiance, non ?

De l’extension du domaine de la broche à foin

Qu’une chose puisse être broche à foin, on ne saurait en disconvenir.

La campagne peut être «broche à foin» (la Presse, 28 mars 2011, p. A23), de même qu’une ville (la Presse, 8 février 2002, p. E1). L’expression — définition ici — est tellement commune que le (futur) premier ministre du Canada l’a utilisée lors d’un débat électoral télévisé le 12 avril dernier.

Dans le Devoir de ce samedi, le 10 septembre, s’agissant d’une des «histoires» d’Arvida de Samuel Archibald (2011), «América», il est écrit que c’est une «aventure broche-à-foin» (p. F4).

On s’étonne cependant de voir l’expression employée pour désigner une personne : «Garderies et parents broche à foin» (la Presse, 9 septembre 2011, p. A5). L’article ne parle que de «garderies privées broche à foin», mais son titre est clair : cela s’appliquerait aussi aux parents qui y mettraient leurs enfants.

Il est vrai qu’on n’arrête pas le progrès.

P.-S. — On notera que l’expression est invariable. En matière de trait d’union — broche à foin ou broche-à-foin —, l’usage est flottant.

 

[Complément du 27 août 2017]

Substantivée, l’expression est de quel genre ? Spontanément, l’Oreille tendue aurait dit de la broche à foin. Dans le Devoir du 25 août dernier, Alexandre Fontaine Rousseau dit plutôt : «Personnellement, je suis de l’école du broche à foin.» Le débat est ouvert.

Le 11 septembre 2001…

Samuel Archibald, Arvida, 2010, couverture

…vu par un personnage de Samuel Archibald, dans le texte «América» recueilli dans Arvida (2011) : «Dans l’intervalle, y a douze crisses de Tamouls qui ont hijacké des avions pour les câlicer un peu partout sur la gueule de l’oncle Sam» (p. 84).

De l’art de marier l’alternance codique («hijacké»), le juron («crisses», «câlicer») et l’histoire (géographiquement approximative).

 

Référence

Archibald, Samuel, Arvida. Histoires, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 04, 2011, 314 p.

Proposition de correction

L’Oreille tendue n’hésite pas à se répéter : une minuscule et une majuscule, ce n’est pas la même chose. Exemple.

Quand on lit dans Polynie de Mélanie Vincelette (2011) la phrase «Sur la croix de bois que l’on préparait pour lui, son père avait fixé un autocollant du club de hockey canadien» (p. 198), on peut être étonné. Il y aurait donc un seul «club de hockey canadien» ? Non, bien sûr. Corrigeons : Club de hockey Canadien, celui de Montréal. Voilà qui est compréhensible.

À votre service.

 

Référence

Vincelette, Mélanie, Polynie, Paris, Robert Laffont, 2011, 213 p.