Chantons la langue avec Ivy

Ivy, Hors des sentiers battus, 2012, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Ivy, «My name was», Hors des sentiers battus, 2012

 

J’ai des mots en bouche qui brûlent
D’enflammer les phonèmes
De cette langue que j’aime tant
Mais qui tangue aussi dangereusement
Que la tour de Pise
Quand elle épouse le mauvais angle
Elle préfère l’engrais
Qui l’infecte en la faisant enfler
Au lieu de cultiver ses minces mais profondes racines
Quand j’entends ma langue aujourd’hui
J’hallucine un max
La plante est rendue carnivore
Car elle dévore sa propre syntaxe
Chaque fois qu’a prend une marche
Qu’a marche sur la rue
Qu’elle se rue dans une autobus
Qu’est-ce qu’je pourrais dire de plus ?
Que c’pas correc’ ?
Eh tu m’prends pour qui ?
J’sais ben qu’c’est comme ça qu’on parle au Québec
(That’s how we talk in Québec
Yo Ivy)
Alors j’l’a laisse aller
J’l’écoute parler
J’la sens craquer
Et puis ch’peux pas m’empêcher d’paniquer
Ensuite j’m’irrite
Contre la pratique séculaire
Qui préfère
Coller à ses tiques
Plutôt qu’en son palais
Celle qui fut langue de roi
Est-elle encore celle des valets ?
(Le roé c’est moé)
Celle qui fut langue de roi
Est-elle encore celle des valets ?
C’est don d’valeur
Moi ça m’écœure
Quand a s’donne l’air
De faire des affaires
Alors qu’elle s’asservit
Au lieu d’lutter pour sa survie
(Yo money talks)
Si la langue était vraiment vivante
On la laisserait pas vivre dans cet état
Faque débranchons-la
Ou branchons-nous
Avant qu’le français disparaisse
Faudrait qu’on l’ait parlé entre nous
C’est c’que m’dit l’aïeul
Quand y se r’vire de bord
Dans son cercueil
(L’aïeul quand y s’fait aller la yeule
Quand y s’fait aller la yeule dans son cercueil)
Pis dans son cercueil
Y se r’vire de bord
Parce qu’il y a des tarlas qui posent du clabor
Su’a grammaire
Y a même des jeunes qui disent à leur père
«P’pa, le français, c’est comme l’égalité des sexes
Le combat a été faite, faique : next !»
(Le roé c’est moé)
Faudrait qu’la génératrice reprenne
Qu’la jeune génération comprenne
Qu’y a pas de courant sans l’gars d’Hydro
Pas de lumières sans Volt…aire
Pas d’esprit sans vocabulaire
La langue faut pas juste que ça serve
Faut qu’ça jaillisse en gerbes de verve
Comme autant d’étincelles
À propager
À grandeur du pays
Comme un incendie
Comme quand j’étais p’tit
Et que j’aimais ça
Mettre le foutre le crisser le feu
J’trouvais ça hot hot
J’me serais même fait patriote
Faiseur de marde
Et si j’m’attarde
À t’expliquer
C’est qu’j’ai la langue trop… «sticky»
Dans sa gangue enfirouapée
(Wrapped in fur
And all that crap)
Que j’lâche aux bécosses
(Out house)
Dans un vent de panique
Ô Français
Pendant combien d’temps
Me parleras-tu de l’Amérique ?
(C’est normal qu’y ait de l’anglais dans notre langue
C’est normal
Y en a partout autour
Well we do it too
We say open the lights
Ouvre la lumière
Going to the dep
On s’en va au dépanneur
Nine on ten
Neuf sur dix
C’est ta note
Ivy the Terrible
Ivan le Terrible
J’ai des mots en bouche
So Ivy your name it’s English
It’s kind of weird
Ouais mais c’t’un Anglais qui me l’a donné
Depuis je l’ai adopté
J’trouve ça mieux que French Frog
Pea Soup
Ou Pepsi
So you think you’re gonna cross over into the English market ?
I hope so I hope so can I call you a log [?]
What the fuck does that mean ?
Paul sois poli
T’es sur mon disque
Excuse me
Pardon my French)

 

Chantons la langue avec Big Balade

Big Balade, «Levons nos voix», 2015, livret

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Big Balade, «Levons nos voix (Francos de l’Ontario)», 2015 (Chant thème du 400e anniversaire de la présence francophone en Ontario)

 

Sans savoir où je vais
Je sais qui je suis
Francos de l’Ontario
On est d’la family
Francos de l’Ontario
Sans savoir où je vais
Je sais qui je suis
On est d’la family
On est d’la family
Francos de l’Ontario
On est d’la family
On est d’la family
On est d’la family
On est d’la family
Levons nos voix

Sur mon chemin le paysage défile
Je regarde la rivière qui brille
J’imagine tous ceux qui ont vogué
Sur ces eaux qui nous sont prêtées

Sur mon chemin je reconnais ton chant
Même si dispersé c’est toi qu’j’entends
Je te tends la main, tu peux compter sur moi
Nous sommes tous ensemble
Levons nos voix

Entendez-vous le cri de ralliement ?
Qui nous invite à nous joindre au mouv’ment
Hey ! Hey ! Est-ce que vous entendez le cri de ralliement ?
Qui nous invite à célébrer fièrement

On porte le blanc et le vert
Aujourd’hui et demain
On s’inspire de nos racines
Pour viser plus loin, plus haut
Francos de l’Ontario
Francos de l’Ontario
Francos de l’Ontario

Qu’on vienne d’ailleurs ou bien d’ici
C’est notre langue qui nous unit
Je la défendrai avec tout c’que j’ai
Nous sommes tous ensemble
Levons nos voix

Entendez-vous le cri de ralliement ?
Qui nous invite à nous joindre au mouv’ment
Hey ! Hey ! Est-ce que vous entendez le cri de ralliement ?
Qui nous invite à célébrer fièrement

On porte le blanc et le vert
Aujourd’hui et demain
On s’inspire de nos racines
Pour viser plus loin, plus haut
Toujours plus haut
On porte le blanc et le vert
Aujourd’hui et demain
On s’inspire de nos racines
Pour viser plus loin, plus haut
Francos de l’Ontario

Sans savoir où je vais
Je sais qui je suis
Sur ce grand chemin
Je sais que pour toujours
On est d’la family
On vient de partout autour du monde
Et nous sommes tous réunis ici
Alors encore une fois
Il est temps, il est temps
Levons nos voix

On porte le blanc et le vert
Aujourd’hui et demain
On s’inspire de nos racines
Pour viser plus loin
On porte le blanc et le vert
Aujourd’hui et demain
On s’inspire de nos racines
Pour viser plus loin, plus haut
Francos de l’Ontario
Francos de l’Ontario
Francos de l’Ontario
Levons nos voix
Francos de l’Ontario
Il est toujours temps
Francos de l’Ontario
Encore une fois, levons nos voix
Francos de l’Ontario
[?] toujours
On est d’la family

Levons nos voix

 

Chantons la langue avec Jean Lapointe

Jean Lapointe, «Mon oncle Edmond», 1976, disque

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Jean Lapointe, «Mon oncle Edmond», 1976

 

Dans la famille du côté d’ma mère y avait mon oncle Edmond
Y était ben smatte y parlait l’anglais surtout quand y était rond
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Un bon matin sans dire un mot Edmond a sacré l’camp
Il est parti pour l’Ontario ouvrir un restaurant
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Vingt ans plus tard riche à craquer Edmond nous est r’venu
Les poches ben pleines et pis la tête carrée on le r’connaissait plus
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Mais là c’était vrai pis c’en était triste pis y était même pas saoul
Do you want a shot yes why not

Par une journée ensoleillée Edmond est disparu
Requiescat in pace pis on l’a jamais r’vu
Y faisait des pit pit do you speak English me I can talk faster than you
Wanna hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul
Do you want a shot yes why not

Quand Edmond est mort y parlait l’anglais
Edmund passed away sometimes au mois d’mai

 

Chantons la langue avec Loco Locass

Loco Locass, Manifestif, 2000, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Loco Locass, «Malamalangue», Manifestif, 2000

 

Peuple à la mer
À la merci des courants
Qui n’est pas au courant
Dont la langue à vau-l’eau
Navigue entre deux eaux
Dont la culture dérive au large des rives
D’un incontinent mercantile
Quand il s’agit de s’agiter sache
Que les Loco Locass occupent la place
Jacassent avec audace et cassent la glace
En dénonçant la menace
Qui sévit sur la masse
C’est assez sérieux
Plutôt pernicieux
On croirait au complot tacite de la nation
Car aucun ne s’indigne de la situation
Dans la symphonie multiculturelle de Trudeau
(Son rêve était beau)
La voix francophone est noyée sous le son du saxe Anglo-saxon
Tabarnak sont 300 millions
Pendant qu’un Néo-Québécois de souche se tire une bûche
Un autre Anglo Klaxon sac’ son camp
Notre syntaxe est en voie d’extinction
Minée contaminée déterminée
Par Shakespeare et ses sbires
Y a pas d’quoi rire
Car j’ai malamalangue

À court de discours
Je me dis cours toujours
Jour et nuit aucune dichotomie
C’est la grande noirceur qui sévit
C’est vite dit précis concis
Bref mon pays est loin de la Laconie
Honnie, bannie, c’est comme chercher Charlie
Où est ma langue ? Où est mon esprit ?
Où suis-je ? Qui suis-je ? Où vais-je ? Où vis-je ?
L’insidieuse érosion du langage et ses suites me terrifient
Je suis l’homme calcaire en beau calvaire
Devant les assauts séculaires d’une mer qui me sape les pieds
Y m’pogne des fois des envies d’hermétisme à l’extrême
Une néo-nipponnerie
Une genre de juiverie
Mais j’vivrais mal d’être jugé lepéniste
N’empêche qu’au bouche-à-bouche
Ma langue mal embouchée couche
Avec le butcher
J’en embrasse large mais je couche
Mes mots pour 7 millions de cocus sans colonne verbale
Avale mon venin mollusque, suce
Jusqu’à ce que t’en tire un antidote
Qui dotera ta glotte
Pour le french universel
J’ai rien contre l’orgie romaine man
Mais j’ramone personne en franglais
C’est pas vrai ou faux
Je m’en fous
Mon parti est pris
Tu l’auras compris
Ma rage contre la machine est une mutinerie contre le mutisme
Ce séisme tranquille
Je m’infiltre effronté
Forcé de fitter dans la foulée de ces fous paroliers
Qui mettent flamberge au vent
À tout moment
Pour défendre leur langue
Avant qu’exagérément exsangue
Elle pende comme une sorte
De langue morte (langue d’Oc) OK
Je te l’concède
On est un peu cons et on cède
Nous aussi à la tentation
De parsemer not’ tchatche loquace
Du langage des fat ass
Un petit cool par-ci, beat par-là
Whatever man, we speak like we
Speak white wouanh !
J’ai la voix blanche de m’être trop tu
Au silence blanches négresses et nègres blancs
Nos mots sont des balles à blanc, pan !
Beaucoup de bruit pour rien mais le lendemain
Je me souviens de rien
Aphasie, avachie, chie dans son froc de french frog
Vagissant piternellement
Le Québec de lièvre n’en finit pas de naître… pas
Ceux qui tracèrent la trachée d’une voix
Qui n’a pas la portée d’un crachat
J’mâche pas mes mots
C’est pas d’la mash potato
Sache que les Loco Locass
Sont des koubros [?] qui causent et qui haranguent
Ce qui leur cause des mots sur le bout de la langue

Tous et toutes, professeurs, citoyens
Animateurs de Musique plus ou politiciens
Je vous accuse au tribunal de la conscience
D’avoir immolé le français sur l’autel de l’indifférence
Malgré que le combat soit perdu d’avance
Même en France nous défendons notre patrie contre l’anglosphyxie
Tel que le firent les Phrygiens face à l’Empire romain
Nous avons pris le maquis linguistique
Et opposons à l’Amérique une résistance lyrique
Notre tactique est unique et consiste en la verbalistique
Nous faisons flèche de tout mot
Nos arbalètes envoient des carreaux lexicaux
Au macrophone les Loco détonnent
Et proposent entre autres choses
Une prose qui ose et qui désankylose
Si texturé soit-il
Ton texte doit expliquer le contexte de ton cortex car
Sans sens le son n’est que sensation
Mais sans son le sens est sans action
Si texturé soit-il
Ton texte doit expliquer le contexte de ton cortex car
Sans sens le son n’est que sensation
Mais sans son le sens est sans action

 

Chantons la langue avec Émile Bilodeau

Émile Bilodeau, Grandeur mature, 2019, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Émile Bilodeau, «Candy», Grandeur mature, 2019

 

Mon nom c’est Andy mais tout le monde m’appelle Candy
Même quand j’suis sûr comme un?bonbon, j’ai jamais raison
Parce?que j’connais pas grand-chose dans vie
J’fais des affaires illégales de manière très amicale
Je sais qu’le monde va mal mais pour moi tout est normal
Parce que j’connais pas grand-chose dans vie
À part que le rose c’est joli
Autant sur les gens qu’en dedans
Là j’parle des vêtements et du sang
Bien évidemment que
J’connais pas grand-chose dans vie
À part qu’les chauve-souris ont des cheveux
C’est curieux
Est-ce qu’elles nous auraient menti ?
Candy, can’t you see
Que je suis candide
Qu’en dis-tu, toi ?
Quand tu m’vois pleurer de joie
La vie est vide de sens si
On n’saisit pas la chance qu’on a
De vivre à fond à chaque fois
T’as raison
Arrêtons de s’prendre la tête
Sortons et allons faire la fête
Certes, on vit dans un certain confort
Faique, ça sert à rien de s’faire du tort
Avec nos trolls au Sénat
Pis le pétrole d’Alberta
Dans les deux cas ça pue pis ça coûte cher
Ici on a des gars qui auront pu de salaire
Parce que demain la shop va fermer
Pourtant tout le monde sait que c’tait ben subventionné
La crosse est finie
Les boss sont partis
Vers leur retraite dorée
Avec la poudre d’escampette et la poudre au nez
Après ça on dit
Qu’c’est moi l’criminel ici
Candy, can’t you see
Que je suis candide
Qu’en dis-tu, toi ?
Quand tu m’vois pleurer de joie
La vie est vide de sens si
On n’saisit pas la chance qu’on a
De vivre à fond à chaque fois

Arrêtons de s’prendre la tête
Sortons et allons faire la fête
Arrêtons de s’prendre la tête
Sortons et allons faire la fête
Okay d’abord
J’vais arrêter d’m’en faire avec le sort de ma communauté
Même si en Ontario y en ont pas trop, trop d’école franco
S’excuser de vivre en français
C’est comme demander
J’peux tu respirer là s’il-vous-plaît
Mais jamais nous nous mettrons à genoux
Whatever you tell us to do
Mais jamais nous nous mettrons à genoux
Whatever you tell us to do
Sortons et allons faire la fête
Arrêtons de s’prendre la tête
Sortons et allons faire la fête