Chantons la langue avec Mad’MoiZèle GIRAF

Mad’MoiZèle GIRAF, Peindre la GIRAF, 2009, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Mad’MoiZèle GIRAF, «Montréal stylé», Peindre la GIRAF, 2009

 

Enweille chummy suis-moi, emboîte-moi le pas
Pour la virée à Montréal trimbaler dans tous les quartiers
Tout c’qui entoure le mont Royal, suffit d’avoir de bons souliers
Et d’pas avoir trop peur de passer la journée à les user
À marcher de long en large, explorer les rues de la cité
Autant les grandes artères qu’les ruelles ben dissimulées
C’qui fait le charme de ma ville
Ce n’est pas difficile à déc’ler
Moi c’qui me plaît avant tout
C’est surtout sa diversité
Ici on entend parler l’anglais
On entend le mandarin
On entend le portugais
Et ben sûr l’accent italien
On entend les notes de l’arabe créole espagnol à la même table
Et moi j’m’exprime en patois
Le français d’venu québécois
Ouais, Montréal c’est ma ville, ce n’est pas mon bled natal, plutôt ma terre d’accueil, un îlot ben original, du Plateau, Hochelag, Rosemont ou Pointe Saint-Charles, de la Petite Italie, jusqu’où nous mène la Côte-des-neiges, la métropole québécoise m’aide à remplir mon ardoise et moi j’suis bien à l’aise avec tous les gens que je croise
Montréal stylé

Ville européenne en Amérique du Nord
Du sang français coule dans mes veines, mais j’suis pas né d’l’autre bord
J’me sens chez moi aussi bien à Bordeaux qu’à Val D’or
Mais la ville que j’préfère c’est Montréal, je l’adore
De ma fenêtre, tranquillement j’m’amuse à observer les gens
Qui déambulent rapidement sur le boulevard Saint-Laurent
Espérant candidement le bonheur au prochain tournant
Volontaires ou obligés ils font marcher l’marché
Travailleurs, étudiants, libres penseurs et mendiants
Les banlieusards qui font la queue, les enfants et les amoureux
J’me dis que j’suis chanceux d’avoir trouvé ma place
C’est ici que j’veux devenir vieux, que j’vais tenter de laisser ma trace
Oui Montréal c’est ma ville, ça n’est pas mon bled natal plutôt ma terre d’accueil, un îlot bien original, du Plateau, Hochelag, Rosemont ou Pointe Saint-Charles, de la Petite Italie, jusqu’où nous mène la Côte-des-neiges, la métropole québécoise m’aide à remplir mon ardoise et moi j’suis bien à l’aise avec tous les gens que je croise
Montréal stylé

Dans cette ville nord-américaine, toutes les jolies filles me font craquer, on peut les compter par centaines, bien dur de ne pas les remarquer
Mademoiselle, vous êtes belle, venez donc avec moi explorer, je parcours les rues, les ruelles, un peu d’temps veuillez m’accorder
J’habite Saint-Laurent coin Rachel et pis j’adore converser, que ce soit d’la sainte flanelle ou du pont Jacques Cartier
N’importe quel sujet, tout c’qui traite d’actualité
La Mad’MoiZèle GIRAF veut avant tout te faire bouger
Ouvrir les yeux, les oreilles, faire décoller les pieds du plancher
Provoquer les débats, mais surtout rassembler
Laissons d’côté nos différences, appliquons-nous à dialoguer, pour mettre à terre les frontières rien d’mieux qu’la musique reggae
Ouais, Montréal c’est ma ville, ça n’est pas mon bled natal, plutôt ma terre d’accueil, j’y planterai mon cercueil, elle me recueille à chaque soir, habituée à veiller tard, et moi j’adore la faune nocturne qui traîne à l’entrée de ses bars, la métropole québécoise m’aide à remplir mon ardoise, et moi j’suis bien à l’aise, avec tous les gens que je croise
Montréal [prononcé à l’anglaise] stylé

 

P.-S.—Vous avez l’oreille : il a déjà été question de Mad’MoiZèle GIRAF ici.

 

Chantons la langue avec Johnny Halliday

Johnny Halliday, Gang, 1986, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Johnny Halliday, «Ton fils», Gang, 1986

 

On perd sa vie parfois
À devoir la gagner
Y’en a qui naissent rois
D’autres du mauvais côté

Toi tu viens d’un pays que t’as presque oublié
De sable et de soleil et d’éternel été
Ceux qui ont de la chance y passent leurs vacances
Mais ceux qui y sont nés ne peuvent y travailler
Après toutes ces années juste pour exister
J’ai juste envie de dire à tes yeux fatigués

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’on le respecte, mieux qu’on le vouvoie
Comme un homme, un monsieur
Qui ne baisse pas les yeux
Pareil à tous ces gens qui parlent sans accent

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’il ait toutes ses chances, tous ses droits
Qu’il ait une signature
Des mains blanches, une voiture
Et des papiers d’identité à perpétuité

T’es pas un grand causeur on t’l’a jamais d’mandé
T’as payé en sueur le prix qu’il faut payer
Tu voulais qu’il ait tout sans jamais rien compter
Pour qu’il ait toutes ses chances
Comme les enfants de France
Pour un dernier désir, pour une ultime envie
La seule raison de croire à un sens à ta vie

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’on le respecte, mieux qu’on le vouvoie
Comme un homme, un monsieur
Qui ne baisse pas les yeux
Pareil à tous ces gens qui parlent sans accent
Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’il ait toutes ses chances, tous ses droits
Qu’il ait une signature
Des mains blanches, une voiture
Et des papiers d’identité à perpétuité

 

Chantons la langue avec Paul Piché

Paul Piché, À qui appartient l’beau temps ?, 1977, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Paul Piché, «La gigue à Mitchounano», À qui appartient l’beau temps ?, 1977

 

Saint-Scholastique ou parc Forillon
Fallait partir de bon matin
Pour les touristes ou leurs avions
On est toujours dansl’ chemin
Les gens ont perdu leurs maisons
Leurs terre et pis leur pays
Tout ce que j’ai pu faire
C’t’une p’tite chanson
Qu’ira pas plus loin qu’ici

Dans l’nord y a un moulin
Qui empoisonnait toutes les Indiens
Apparemment ça répondrait
Vraiment à un besoin
Pis on leu’ d’mande après ça
De r’garder le bon côté d’la vie
De pus chasser de pus pêcher
D’arrêter d’faire des p’tits
Y auraient ni tête, ni pieds
Pourraient pas travailler
Dans l’pâte et papier
Y auraient ni tête, ni pieds
Pourraient pas travailler
Dans l’pâte et papier

Va-tu falloir attendre qu’y ait
Démoli toutes nos maisons
Attendre d’être empilés dans des bâtisses
Faites en carton
Vas-tu falloir attendre
D’être rendu fous d’être affamés
Attendre d’avoir la corde au cou
Les mains ben attachées
Mais on a pas assez eu d’misère
Y nous faudrait l’enfer
Avant d’se révolter
On pas assez eu d’misère
Y nous faudrait l’enfer
Avant d’s’organiser

Les étudiants objectivement
S’inquiètent pour passer l’temps
Y gardent la connaissance entre eux
Comme le riche son argent
Ou ben on signe rien qu’une pétition
Mais c’est pas ben ben risqué
Y a pas d’danger qui voyent ton nom
Sur des feuilles toutes fripées
C’est là qu’on s’cache la face
Pour faire nos grimaces
Sur des bouts d’papier
C’est là qu’on s’cache la face
Pour faire nos grimaces
Sur des bouts d’papier
On s’est r’gardé à bout portant
L’nombril au premier plan
On sait qu’on est du monde peureux
Avec un bel accent
Ça on l’sait
Mais va-tu falloir attendre
Qu’y viennent nous chercher
Comme des bœufs
Quand on sera rendu rien qu’d’la viande
On sera pas moins nerveux
Mais on a pas assez eu d’misère
Y nous faudrait l’enfer
Avant de se révolter
On pas assez eu d’misère
Y nous faudrait l’enfer
Avant d’s’organiser

 

Chantons la langue avec Michel Etcheverry

Michel Etcheverry, Irrintzina, 1997, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Michel Etcheverry, «Une pointe d’accent», Irrintzina, 1997

 

Mes amis mes amours si vous partez un jour
Laissez-moi je vous prie votre pointe d’accent
Cette musique-là me restera toujours
Rien ne peut la changer ni la vie ni le temps
C’est la magie des mots quand on berce un enfant
Le chant de la palombe à l’éveil du printemps
C’est l’envol de l’abeille dans le matin naissant
En un mot comme en cent, c’est la pointe d’accent
Mon beau pays s’appelle Euskal-Herri
J’ai dans le sang une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
On oublie les chagrins les instants de bonheur
Les jardins sous la pluie les étés sous les fleurs
On oublie les soleils et les neiges d’antan
Mais on garde toujours une pointe d’accent
Les fameux mousquetaires avaient disait l’histoire
Au bout de leur épée une pointe d’accent
C’était un don du ciel et un titre de gloire
Henri IV était fier de l’avoir en naissant
Mon beau pays salut l’Occitanie
Nous avons tous une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
Toi qui cherches un ami en pays d’Euskadi
S’il prononce des mots que tu ne comprends pas
Dès le premier regard tu le reconnaîtras
Il aura dans les yeux une pointe d’accent
Et à toi qui t’en vas ami de mon enfance
Je dis n’emporte pas la terre à tes souliers
Mais accroche à ton cœur ce joli coin de France
Et sa pointe d’accent qu’on ne peut oublier

Mon beau pays salut l’Occitanie
Nous avons tous une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
Mon beau pays s’appelle Euskal-Herri
J’ai dans le sang une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent

Chantons la langue avec Manu Militari

Manu Militari, «Je me souviens», 2012, illustration

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Manu Militari, «Je me souviens», 2012

 

On met l’cap sur un rêve mais la traversée est longue
Combien trépassent avant d’toucher l’Nouveau-Monde
On est Breton, Normand, Irlandais
Ou peu importe, on s’mélange espérant vivre en paix

Grand-maman dit même qu’on a du sang amérindien
J’me demande si on n’a plus dans nos veines ou sur nos mains
On fait une guerre, on la perd, j’me sens trahi
Comme un flo rejeté par sa mère patrie

Mes nouveaux maîtres m’exploitent, j’commence à être écœuré
J’m’en remets à Dieu mais entre nous deux y a monsieur l’curé
Chaque jour j’laboure une terre qui m’appartenait
Chaque nuit j’rêve de violer leur accord de paix

Ma fierté est à poil et des mains sales la tripotent
J’prends les armes en r’joignant les Patriotes
Mais pendant qu’on pend mes chefs au Pied-du-Courant
Ma maison brûle sur les rives d’un Richelieu rouge sang

On m’a volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Pourquoi jamais j’me suis battu pour rien
Parce qu’on m’a volé volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Je me souviens

J’voudrais grimper la montagne mais y’en a pas d’facile
Quand ta langue t’empêche de sortir du bas d’la ville
Faique j’me barre le dos dans leurs vieilles usines
Et la reine récolte le miel que les Queb’ butinent

Moi j’mets la table, chu remercié qu’par des miettes
J’prends des balles pour leur empire sur les plages de Dieppe
Quand une voix mondiale s’lève comme un souffle d’après-guerre
Elle dit qu’elle veut sa liberté pis qu’aucune arme la f’rait taire

Sur toute la terre les rebelles montent le ton
Mais plus les idées sont belles moins les méthodes le sont
Moi j’reste tranquille mais pense pas que j’ferme ma trappe
J’manifeste trempé jusqu’aux os sous une pluie d’matraques

J’gagne du terrain j’ai p’t’être pas toutes mes droits
Mais j’peux presque sentir mon rêve au bout d’mes doigts
On m’dit tu veux ton pays, vote pour qu’ça dépende de toi
L’occasion se présente deux fois

On m’a volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Je me souviens

D’mande-toi pas pourquoi y a encore des gens qui s’battent
Quand dans leur propre pays leur langue reste un handicap
Et si tu cherches des preuves, elles s’révèlent parfois
Mais la majorité du peuple est aveugle par choix

La planète tourne autour d’une seule musique
Moi j’refuse d’accorder ma voix avec leur pensée unique
J’veux rester qui j’suis, j’veux qu’tu restes qui t’es
If you don’t understand me on va devoir s’quitter

Moi ma langue est sous respiration subventionnée
Je l’sais c’est pas d’ta faute si on aime pus qui on est
Pour qu’les radios jouent du francophone faut les pousser
Notre culture est une vieille fille que personne veut épouser

Même nous on danse avec une autre dès qu’on a la chance
Combien d’Queb’ renient leur accent en France
Combien disent c’est pas grave, fais-en pas toute une montagne
Quand depuis 1759 moi j’ai perdu mon calme

Mais j’ai volé les Hurons
Et autres peuples qu’eux seuls s’rappellent du nom
Abénaquis, Iroquois, Micmacs et Cris
Ainsi l’histoire s’écrit

Les canons parlent, ceux qui en ont pas font d’la place
Mais comme dirait Vigneault toutes les humains sont d’ma race
Demain j’m’éteindrai face à d’autres tribus qui naissent
J’me souviendrai qu’nos différences sont richesse

 

P.-S.—On ne confondra pas «Je me souviens» (ici) et «Je me souviens» ().