Seizième anniversaire de l’Oreille tendue

Statistiques de consultation de ce blogue, 2010-2025

L’Oreille tendue est née il y a pile-poil seize ans. Avec ses bénéficiaires, elle célèbre donc aujourd’hui ses noces de saphir, non sans certaines préoccupations (voir à la fin du texte).

En chiffres, cela donne :

5968 billets, dont 1111 contiennent au moins un «Complément» (certains en contiennent plusieurs, notamment celui sur la ruée vers les bars);

un peu plus de 3 445 069 vues;

3999 photos;

298 vidéos;

19 114 URL uniques pour 37 331 liens (internes ou externes);

beaucoup de collaborateurs (merci à tous);

plus de 336 375 «tentatives de connexion malveillantes bloquées»;

249 962 «commentaires indésirables bloqués».

L’entrée la plus populaire ? Encore et toujours swag, avec 581 922 visionnements. «Depuis le 1er jour», dixit WordPress, sa meilleure journée est le 2 mars 2024 (explication ci-dessous). Auparavant, il s’agissait du 29 avril 2012, avec 6 094 vues, essentiellement pour ce texte.

Les quinze articles les plus populaires ?

Du postcool [swag]

Unicité vitale [yolo]

Sic

Histoires (d’abord) de chalet [sauf une fois]

Divergences transatlantiques 012 [thermos]

Au carré [malaisant]

Le dilemme de l’autobus

De la germaine

Divergences transatlantiques 015 [gosses]

Défense et illustration de la garnotte

Non, point du tout [pantoute]

Rime en -ag [vagg]

bs

Du mot(t)on

Crissement riche

Qu’est-ce que ce blogue ? L’Oreille tendue a donné un long entretien à ce sujet à Emmanuelle Lescouët en 2021; ça se trouve sur le Carnet de la Fabrique du numérique sous le titre «Penser publiquement la recherche». Elle a aussi publié un article sur le sujet dans les Cahiers internationaux de sociolinguistique en 2022. Il lui est aussi arrivé de répondre à ses propres questions, par exemple ici et .

L’Oreille tendue, c’est un blogue. C’est aussi des livres tirés, complètement ou partiellement, d’icelui.

Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 125 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso. Édition revue et augmentée : Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 159 p. Préface d’Olivier Niquet. Illustrations de Julien Del Busso.

Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill. Réimpression : 2021.

L’Oreille tendue, Montréal, Del Busso éditeur, 2016, 411 p.

Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

La vie et l’œuvre du professeur P. Sotie, Montréal, À l’enseigne de l’Oreille tendue, 2022, 56 p.

Il y en aura quelques morceaux dans un manuscrit en cours de rédaction : le Hockey en nous. Sport et culture au Québec (parution prévue en 2026).

On continue ? On continue.

Non sans inquiétudes, cependant. Google a changé son mode de fonctionnement au cours des dernières années. La société a d’abord modifié son algorithme de classement des résultats de recherche, histoire de favoriser les grands groupes médiatiques. Par la suite, au lieu d’offrir des liens vers des sites (par exemple, ce blogue), elle a préféré offrir des réponses générées par l’intelligence artificielle. Or Google est en position de quasi-monopole au sein des moteurs de recherche. Conséquence ? Les blogues sont de moins en moins référencés dans les résultats de recherche, ce qui entraîne une baisse considérable de leur achalandage (explication ici, par exemple; démonstration, en image, au début de ce billet). C’est le cas de l’Oreille tendue. C’est regrettable, mais évidemment pas au point de fermer boutique.

Une dernière chose : l’utilisation des ressources d’Internet par l’intelligence artificielle n’est pas une vue de l’esprit. Le 2 mars 2024, un samedi, l’Oreille tendue a été visitée près de 10 000 fois. Il ne s’agissait pas d’humains venus la lire. Il s’agissait d’une machine qui, anonymement, en a pompé tout le contenu… pour le recracher sans citer ses sources, probablement contre rétribution. On est bien peu de chose.

De la suite dans les idées (encyclopédiques)

Les 28 volumes de l’Encyclopédie

Dans son édition des 29-30 mai 2010, le quotidien montréalais le Devoir titrait : «Médias. Wikipédia, l’encyclopédie Diderot et d’Alembert du XXIe siècle ?»

Dans l’édition d’hier, presque quinze ans plus tard : «Contribuer à Wikipédia, ce Diderot 2.0.»

Cette association de Wikipédia et de l’Encyclopédie, qu’ont dirigée au XVIIIe siècle Diderot et D’Alembert, a déjà intéressé l’Oreille tendue. Ça se lit ici.

P.-S.—En effet : c’est le même journaliste qui signe les deux textes.

P.-P.-S.—«Contribuer à Wikipédia, ce Diderot 2.0.» est le titre en ligne. Dans la version papier du journal, c’est «Wikipédia, la force du nombre».

P.-P.-P.-S.—Cet article porte sur un ouvrage récent, dirigé par Jean-Michel Lapointe et Marie D. Martel, le Mouvement Wikimédia au Canada (Presses de l’Université de Montréal, 2025).

Curiosités voltairiennes (et numériques)

Marcello Vitali-Rosati, Éloge du bug, 2024, couverture

«“Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin” : c’est la réplique finale du roman de Voltaire et celle-ci s’adapte bien à notre raisonnement en proposant un pont entre un jardin ancien, celui d’Épicure, et des jardins modernes. Il faut cultiver notre jardin. Cultiver un jardin n’est pas toujours facile, ni satisfaisant, ni productif. Le jardin est un refuge nous permettant de nous retrouver dans un lieu qui n’est pas structuré par les grands pouvoirs étatiques et économiques de notre époque. C’est un lieu plus petit, ouvert, en plein air, mais protégé. Le jardin n’est pas un lieu d’exploitation extensive, on ne le cultive pas comme on cultive les grandes étendues. Le jardin est un lieu et non un espace. Mais il y a aussi un autre élément crucial — présent dans la réplique de Candide également : le jardin peut — et doit — être partagé. C’est notre jardin et pas mon jardin. Le jardin et sa culture nous renvoient finalement à la nécessité de faire nous-mêmes des choses que nous ne voulons pas déléguer aux grandes entreprises numériques et de les faire ensemble. “Perdre” donc du temps en se consacrant à des occupations matérielles qui sont autant méprisées par la rhétorique de l’immatérialité mais qui seules peuvent nous redonner notre autonomie perdue.»

Marcello Vitali-Rosati, Éloge du bug. Être libre à l’époque du numérique, Paris, Éditions Zones, 2024, 208 p. PapierHTMLPDF

Voltaire est toujours bien vivant.

 

P.-S.—Les derniers mots de Candide sont «Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin.»

P.-P.-S.—L’Oreille tendue a présenté ce texte le 1er octobre 2024.

La clinique des phrases (122)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

La vie est faite de mystères. Parmi ces mystères, il y a des mystères linguistiques. Parmi ces mystères linguistiques, il y a, du moins au Québec, la popularité de l’expression «les xxxxx de ce monde», notamment s’agissant d’entreprises numériques (exemple ici).

Il n’y a pas que le numérique dans la vie.

Soit la phrase suivante, tirée des pages sportives d’un quotidien montréalais :

Il revient donc à Courtois et à ses adjoints de trouver le moyen pour que la mayonnaise prenne entre ces petits nouveaux et les éléments qui étaient présents l’an dernier, comme les Caden Clark ou les Bryce Duke de ce monde.

Simplifions :

Il revient donc à Courtois et à ses adjoints de trouver le moyen pour que la mayonnaise prenne entre ces petits nouveaux et les éléments qui étaient présents l’an dernier, comme Caden Clark ou Bryce Duke.

À votre service.

Les rustines des Hells

Kevin Lambert, Tu aimeras ce que tu as tué, éd. de 2021, couverture

Soit la phrase suivante, tirée du premier roman de Kevin Lambert, Tu aimeras ce que tu as tué : «Toutes les bâtisses de Chicoutimi sont construites sur une faille patchée par du béton et de l’asphalte» (p. 191).

Cela peut être appliqué à la pompe sanguine : «mon cœur / Y est patché plein de trous», chantait Gerry Boulet, du groupe Offenbach, dans «Faut que j’me pousse» (1969).

Patché(e) ? Rapiécé(e), dans le français populaire du Québec. Le mot y est féminin : une patch.

Ce n’est pas tout. Le patch, en informatique, c’est la rustine. En médecine, un médicament. Le mot est alors masculin, du moins en français de référence. Pas au Québec, où on a surtout recours au féminin. (Oui, c’est une divergence transatlantique.)

Ne nous arrêtons pas en si bon chemin. Qui, dans la hiérarchie des motards criminels, qu’on dit parfois parfois et bizarrement criminalisés, grimpe les échelons gagne ses patchs. Le mot est dangereux.

À votre service.

 

Référence

Lambert, Kevin, Tu aimeras ce que tu as tué. Roman, Montréal, Héliotrope, «série P», 2021, 209 p. Édition originale : 2017.