L’art du portrait : ça n’arrête pas

Laurent Mauvignier, Seuls, 2004, couverture«Il n’aimait pas son visage ni sa petite taille, ses cheveux et les épis qui déformaient la tête dans le miroir, tous les jours, avec l’obligation de les couvrir de gel pour les rabattre derrière les oreilles. Il n’aimait pas sa voix. Il n’aimait pas ses lunettes aux contours épais ni le menton qu’il avait, qu’il trouvait trop petit sous le sourire qu’il tenait fermé, histoire de cacher les dents jaunes et mal placées — on aurait dit une bataille avec des lances dans tous les coins, qui volent et vont chahuter l’espace. Alors il ne disait rien et trouvait normal que Pauline n’ait pas songé à être amoureuse de lui.»

Laurent Mauvignier, Seuls. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2004, 171 p., p. 10-11.

Dépositaire de jurons

Dans la 462e  livraison de ses Notules dominicales de culture domestique (et de villégiature exotique), servie le 26 septembre, Philippe Didion narre des problèmes de plomberie.

Vie domestique. J’avais dit il faut appeler un plombier. Même si ce n’était pas grand-chose, un système de robinet à changer, du nanan même pour le débutant. Seulement quand j’ai voulu couper l’eau et que j’ai confondu l’avant et l’après compteur, le robinet d’arrivée d’eau avec celui de la vidange et que ce dernier m’est resté dans la main, ça s’est vite transformé en Laurel et Hardy plombiers avec ma pomme dans les deux rôles. Un geyser dans la cuisine. Impossible de remettre le robinet à cause de la pression. Une seule arme, mon doigt, pour colmater la fuite en attendant que Caroline trouve à la cave le moyen de couper l’arrivée d’eau de l’immeuble. Cela n’a duré que quelques minutes, meublées d’un flot de jurons dont je ne me savais même pas le dépositaire, et puis on a réussi à s’en sortir. J’ai appelé le plombier. Après, je me suis changé et j’ai pris en route la manifestation qui passait sous nos fenêtres légèrement embuées. 11 000 personnes. J’étais le seul à avoir les cheveux mouillés.

Les jurons : créatures de l’ombre et de la lumière.

Les amis de ses amis

La moitié de la progéniture de l’Oreille tendue vient de s’inscrire à Facebook. Que faire de ceux qui décident de devenir son ami ? Il faut les adder (to add), ou pas. Mince consolation : cela aurait pu être friender.