Sauvé par une babouche

Dans Eh bien, dansez maintenant…, Marc Lambron se fait «menu chroniqueur des très riches heures de la sarkozye» (p. 174), en l’occurrence de la première année de la présidence de Nicolas S. Sa série de «croquis» (p. 231) — du prince lui-même, de ses épouses, de ses prédécesseurs, de ses sous-fifres, de ses adversaires — se laisse lire d’un œil distrait.

Puis, subitement, on tombe sur la phrase suivante : «Garant de la laïcité, n’allant d’ailleurs guère à la messe, [Nicolas Sarkozy] soutenait pourtant que la ferveur des croyants doit être mise au service de l’intérêt civique, prompt à baiser tactiquement la mule du pape, sinon la babouche de l’imam» (p. 90-91). Avant l’apparition de la babouche, on aurait pu s’interroger sur le rapport du président français aux animaux. Heureusement que cette babouche est là.

 

Référence

Lambron, Marc, Eh bien, dansez maintenant…, Paris, Grasset, 2008, 231 p.

Le zeugme du dimanche matin et de Jean Echenoz

Jean Echenoz, Des éclairs, 2010, couverture

«Non qu’il soit ni se sente contraint par qui que ce soit de produire, trouver des idées nouvelles et inventer toujours, c’est juste que c’est plus fort que lui, étant à cet égard et à ses yeux — car détenant, il faut bien le dire, une assez haute idée de lui-même — plus imaginatif que tout le monde.»

Jean Echenoz, Des éclairs. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2010, 174 p., p. 43.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Lettre au Gros Bon Sens

Cher Gros Bon Sens,

Je viens de voir la publicité que vous signez aujourd’hui dans la Presse (p. A15) pour un nouveau véhicule de Nissan.

Publicité fautive de Nissan, la Presse, 2010

 

Pareille publicité, en couleurs, sur deux pages, doit coûter fort cher. J’imagine que vous voulez limiter le prix de vos véhicules. Je comprends tout ça.

Sont-ce des raisons suffisantes pour faire des économies en matière de langue ? Cela vous aurait-il coûté beaucoup plus cher d’engager quelqu’un qui maîtrise l’emploi du subjonctif ?

Signé : Un lecteur qui trouve que c’est bien beau parler d’innovations, encore faut-il que ça soit écrit correctement.

La bosse de la publicité

Le Réseau de transport de la Capitale — il s’agit évidemment de Québec — est en campagne publicitaire.

Publicité pour les transports en commun, Ville de Québec, 2010

Celle-ci permet de rappeler une fois de plus la forte présence du tutoiement dans la publicité québécoise : «ton quotidien», «essaie-le».

Elle donne l’occasion d’indiquer au non-autochtone que le mot bus au Québec rime parfois avec prépuce (le busse), mais aussi avec crosse (le bosse). Par ailleurs, le verbe bosser désigne moins le travail («T’as intérêt à bosser») que le fait de donner des ordres («Arrête de me bosser»).

Cette campagne publicitaire oblige surtout à se poser une question : que fait là le mot «bus» ? Est-il simplement juxtaposé à «ton quotidien» ? Faut-il plutôt l’entendre comme un verbe, ce qui nécessiterait la prononciation en –osse ? Busse ton quotidien n’aurait, en effet, aucun sens. Bosse ton quotidien, guère plus, objectera-t-on, mais ce ne serait pas la première fois qu’un publicitaire sacrifierait le sens à un effet de manche.

On ne saurait mieux dire

Un spectacle sera bientôt consacré au chanteur québécois Jean-Pierre Ferland. Le metteur en scène, Serge Postigo, expliquait cette semaine à la radio de Radio-Canada qu’il ne voulait pas que Ferland se sente «hommagé» par ce spectacle. L’Oreille tendue est parfaitement d’accord avec Serge Postigo : elle ne souhaite pas elle non plus que Ferland soit «hommagé».