Coïncidence animale heureuse

Soit la Presse du 31 juillet 2010.

En page A21 : «Policiers, oui, poulets, non.» Des agents de la paix, en France, sont froissés par une publicité les désignant comme poulets.

En page 2 du cahier Cinéma : «Après les cochons, les “bœufs”.» L’article porte sur le film québécois Filière 13 : ses trois principaux comédiens jouent aujourd’hui le rôle de policiers (de bœufs), eux qui apparaissaient auparavant dans un film intitulé les 3 P’tits Cochons.

Poulets et bœufs sont bel et bien de la même espèce.

Une publicité de poulets et de policiers

Euphémisme délicat (littéralement) du jour

Dépêche de l’Agence France-Presse, publiée dans le Devoir du 4 août 2010 : «Un homme en délicatesse avec ses employeurs a tué huit collègues de travail hier […]» (p. A5).

«Être en délicatesse avec qqn», selon le Petit Robert : «avoir à se plaindre de lui; être dans une situation délicate avec lui».

Heureusement que le meurtrier n’était qu’«en délicatesse». Sinon, cela aurait pu être grave.

À ne pas oublier

Quoi qu’en pensent le Figaro et la Presse (2 septembre 2010, p. A16), quand une célébrité publie le récit de sa vie, elle ne publie pas une œuvre dont le genre serait le féminin, de belles mémoires. Cette célébrité publie de gros mémoires, au masculin.

Mieux encore, en bonne typographie, le mot prend toujours la majuscule : des Mémoires spitants.

Bref, les mémoires de Tony Blair ne sont pas barbantes / passionnantes. Ses Mémoires sont barbants / passionnants.

Tout se perd.

 

[Complément du 31 août 2011]

L’Oreille tendue, le 31 août 2011, a fait paraître un texte sur l’ex-joueur de hockey Jean Béliveau dans le quotidien le Devoir (p. A7). Imaginez combien elle fut marrie de découvrir qu’un correcteur, pensant bien faire, avait enlevé la majuscule qu’elle avait mise à «Mémoires». Elle ne s’en remettra peut-être pas.

 

[Complément du 14 mai 2015]

Merci, @MondedesLivres, pour ce tweet :

[Complément du 17 novembre 2025]

L’Oreille tendue est une fidèle lectrice de Mauricio Segura; elle a lu tous ses romans. En outre, elle a été l’éditrice de son unique essai. Imaginez son désarroi quand elle a lu ceci dans les Amandiers en fleurs (2025), le plus récent roman de Segura : «Bien des années plus tard, dans ses mémoires colossales et, faut-il le dire, assommantes, il écrirait d’ailleurs […]» (p. 108). Séchons nos larmes et corrigeons : «Bien des années plus tard, dans ses Mémoires colossaux et, faut-il le dire, assommants, il écrirait d’ailleurs […].»

 

Référence

Segura, Maurice, les Amandiers en fleurs. Roman, Montréal, Boréal, 2025, 193 p.

L’art du portrait, toujours

 Henri Calet, Cinq sorties de Paris, 1989, couverture

«Léonard [de Vinci] ne passa que ses trois dernières années au Clos Lucé. Le bâtiment est en briques, avec un pignon à redans de genre flamand, si je me souviens bien. La dame qui nous conduisit, et qui était plus vraisemblablement une vieille demoiselle, avait les cheveux tirés et portait des lunettes, ce qui lui donnait un air de sévérité. Elle était en pantoufles. Quoi qu’il en fût, je savourais son langage châtié, précis, assez monotone au demeurant. Elle utilisait le passé simple avec facilité.

Elle me fit voir quantité d’objets précieux : une page d’évangéliaire illustrée par Fouquet, trois plats de Bernard Palissy, et même des petits automates qu’elle fit distraitement fonctionner. Rien ne la déridait.»

Henri Calet, Cinq sorties de Paris, Paris, Le Tout sur le tout, 1989, 96 p., p. 43.