Zadig au théâtre

 

Voltaire, buste

Le Devoir du 8 février publie un compte rendu de la reprise de Z comme Zadig, le spectacle d’Ariel Ifergan tiré de Zadig, le conte philosophique de Voltaire. (C’est ici.)

Le spectacle a été monté pour la première fois il y a dix ans. L’Oreille tendue en avait rendu compte pour le Bulletin de la Société Voltaire. (C’est .)

Il fallait le faire

Éric Chevillard, Ronce-Rose, 2017, couverture

Avec un pareil cahier des charges, ça n’allait pas être facile.

• Une narratrice enfant (cette engeance), «raisonneuse» autoproclamée.

• Une intrigue qui n’a de sens que si cette narratrice fait preuve d’une naïveté inoxydable, notamment quant au métier de ses protecteurs, Mâchefer et Bruce, disparus sans explication.

• Des phrases — ô combien volontairement ! — improbables : «Mais moi, là, je suis toute seule à la maison avec personne d’autre à manger» (p. 35); «Mais la vie continuait. Quelquefois, on se demande pourquoi» (p. 57); «J’ai repris en mangeant mon orange les forces que j’avais perdues en l’épluchant» (p. 108).

• Un journal intime — «mon carnet secret» (p. 12) — que la narratrice écrit sous les yeux des lecteurs en disant aux lecteurs qu’elle écrit un journal intime sous leurs yeux, en temps réel : «J’ai repris ma marche dans la ville, comme si je sortais de mon carnet pour continuer l’histoire en vrai, debout dans une phrase nouvelle qui va je ne sais où et que je ne pourrai écrire que quand je serai arrivée au bout» (p. 101).

• L’absolue nécessité d’intéresser son lecteur au sort de la narratrice, malgré les prouesses verbales.

• Un renversement radical, qui ne bousille pas tout, bien au contraire, en quelque sorte.

Vous devriez aller le constater sur place : Éric Chevillard réussit à faire tenir tout ça dans Ronce-Rose (2017). Ce n’est pas donné à tout le monde.

P.-S. — Un conte plutôt qu’un roman ? Peut-être bien.

 

Référence

Chevillard, Éric, Ronce-Rose. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2017, 139 p.

La néologIE du mercredi matin

Poétocratie, couvertureAthlétométrie : méthode d’analyse statistico-sportive défendue par Philippe Navarro (2014).

Cauchemarologie : étude cauchemardeuse (@franceculture).

Dette-cratie : la soumission par la dette (en vidéo).

Éphébophilie : est aux adolescents ce qu’est aux enfants la pédophilie.

Exomusicologie : «Qu’est-ce que l’exomusicologie ?» (@dcdb) La question se pose, en effet.

Extrêmophilie : «De + en +, on doit tenir compte que nos sondes pourraient contaminer les planètes qu’elles visitent : extrêmophiles. http://news.nationalgeographic.com/2016/09/mars-journey-nasa-alien-life-protection-humans-planets-space/» (@MatthieuDugal).

Ludothérapie : jouer pour guérir (@franceculture).

Nanarophilie : la passion du navet, pour Antonio D. Leiva et Simon Laperrière (2015). Pas le légume.

Néomanie : l’amour du nouveau (@franceculture).

Poétocratie : les poètes au pouvoir, chez Fabula.

Sociocratie : «un mode de gouvernance inventé par l’ingénieur Gerard Endenburg aux Pays-Bas, [qui] existe depuis les années 70. Tout comme l’holacratie, la sociocratie fonctionne selon des cercles de concertation et rejette la pyramide hiérarchique pour les prises de décision» (la Presse, 20 juin 2015, cahier Affaires, p. 9).

Teutomanie : l’amour de l’Allemagne, selon Victor Klemperer (1996, p. 307).

Tocophobie : la peur d’accoucher, dixit la Presse+ du 7 février 2017.

 

Références

Dominguez Leiva, Antonio et Simon Laperrière, Éloge de la nanarophilie, Neuilly-lès-Dijon, Le murmure, coll. «Borderline», 2015, 75 p.

Klemperer, Victor, LTI, la langue du IIIe Reich. Carnets d’un philologue, Paris, Albin Michel, coll. «Agora», 202, 1996, 372 p. Traduit de l’allemand et annoté par Élisabeth Guillot. Présenté par Sonia Combe et Alain Brossat.

Navarro, Philippe, La puck roulait pas pour nous autres… 44 saisons de la LNH décortiquées, Québec, Sylvain Harvey, 2014, 191 p. Préface de Mathias Brunet.

Citation bibliographicoferronienne du jour

Jacques Ferron, Gaspé-Mattempa, 1980, couverture

«Tu ne sais donc pas qu’avant de découvrir l’Amérique, tu examines la bibliographie. Après avoir compulsé les publications, tu te rends compte que tu as des devanciers, d’abord des imaginatifs qui formulent des hypothèses, ensuite des gens de bon métier qui démontrent que les hypothèses correspondent à la réalité, ce qui n’arrive pas souvent. Moi-même, maudit homme, je cherche depuis trente ans et je n’ai encore rien trouvé. Mais j’en ai appris assez pour savoir que tes deux ou trois hypothèses, en plus de ne mener à rien, ont déjà été formulées plusieurs fois. Tiens, voici les références…»

Jacques Ferron, Gaspé-Mattempa, Trois-Rivières, Éditions du Bien public, 1980, 52 p., p. 41-42.

Les zeugmes du dimanche matin et de Patrick Senécal

Patrick Senécal, Malphas, couvertures des quatre tomes

«Seule la Black à la queue de cheval inscrit les titres des livres avec un large sourire et un stylo» (2011, p. 39).

«Je ne sais pas si [Valaire] est rentrée tard, mais elle a le même air que la veille : en forme et en criss» (2011, p. 90).

«Haletante, Paméla revint à la cuisine et décrocha le téléphone. Au même moment, la porte s’ouvrit et un bel homme d’une quarantaine d’années, vêtu d’un manteau de qualité et d’un chapeau sombre, fit son entrée avec calme, en exhibant un sourire et la clé qui lui avait permis de déjouer la serrure» (2013, p. 2).

«Recevoir un coup de téléphone, de la visite et de la marde» (2013, p. 55).

«Je retourne à la cuisine et à mes moutons […]» (2013, p. 65).

«Prendre un joint, son pied et quatre verres» (2013, p. 129).

«Il doit le canaliser [ce «hurlement intérieur»], le transformer en autre chose, et il sait comment : aussitôt chez lui, il se masturbera sur les photos de Rachel, et il laissera jaillir autant son foutre que son cri, un long cri de jouissance qui camouflera le désespoir qu’il contient…» (2014, p. 300-301).

 

Références

Senécal, Patrick, Malphas 1. Le cas des casiers carnassiers, Québec, Alire, coll. «GF», 16, 2011, 337 p.

Senécal, Patrick, Malphas 3. Ce qui se passe dans la cave reste dans la cave, Québec, Alire, coll. «GF», 24, 2013, 562 p.

Senécal, Patrick, Malphas 4. Grande liquidation, Québec, Alire, coll. «GF», 31, 2014, 587 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)