Chantons la langue avec Renaud

Renaud, Marche à l’ombre, 1980, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Renaud, «It is not because you are», Marche à l’ombre, 1980

 

When I have rencontred you
You was a jeune fille au pair
And I put a spell on you
And you roule a pelle to me
Together we go partout
On my mob it was super
It was Friday on my mind
It was a story d’amour
It is not because you are
I love you because I do
C’est pas parce que you are me qu’I am you
Qu’I am you
You was really beautiful
In the middle of the foule
Don’t let me misunderstood
Don’t let me sinon I boude
My loving, my marshmallow
You are belle and I are beau
You give me all what you have
I say thank you, you are bien brave
It is not because you are
I love you because I do
C’est pas parce que you are me qu’I am you
Qu’I am you

This is a musical bridge

I wanted marry with you
And make love very beaucoup
To have a max of children
Just like Stone and Charden
But one day that must arrive
Together we disputed
For une stupid story of fric
We decide to divorced
It is not because you are
I love you because I do
C’est pas parce que you are me qu’I am you
Qu’I am you
You chialed comme une madeleine
Not me, I have my dignité
You tell me «You are a sale mec !»
I tell you «Poil to the bec !»
That’s comme ça that you thank me
To have learning you English ?
Eh ! that’s not you qui m’a appris
My grand-father was rosbeef !
It is not because you are
I love you because I do
C’est pas parce que you are me qu’I am you
Qu’I am you
It is not because you are
I love you because I do
C’est pas parce que you are me qu’I am you
Qu’I am you
Qu’I am you

 

Accouplements 253

Forbidden et Get Smart, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Il y a une dizaine de lustres, l’Oreille tendue regardait régulièrement, en famille, la série télévisée Get Smart (1965-1970). Elle y suivait les missions loufoques de l’agent 86 (Don Adams) et sa relation avec l’agente 99 (Barbara Feldon).

Elle ignorait alors — et jusqu’à tout récemment — l’existence des amours nécessairement secrètes de 99 (Adolphe Menjou) et 66 (Barbara Stanwyck) dépeintes dans le film Forbidden (1932) de Frank Capra.

La série télévisée était bon enfant; le film, pas du tout. Tourné avant l’imposition du Code Hays, il expose une histoire amoureuse et familiale particulièrement tordue.

Voilà deux univers que tout sépare, au-delà des nombres.

P.-S.—Il y aura aussi une 66 (Elaine Hendrix) dans Get Smart, mais dans la version de 1995.

Chantons la langue avec Pauline Julien

Collectif, le Disque de l’Automne show, 1974, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Pauline Julien, «Mommy», le Disque de l’Automne show, 1974

 

Mommy mommy, I love you dearly
Please tell me how in French
My friends used to call me ?
Paule, Lise, Pierre, Jacques ou Louise
Groulx, Papineau, Gauthier
Fortin, Robichaud, Charbonneau

Mommy mommy, how come it’s not the same
Oh mommy mommy, what happened to my name
Oh mommy, tell me why it’s too late, too late
Much too late

Mommy mommy, I love you dearly
Please tell me where we used to live in this country
Trois-Rivières, Saint-Marc, Grand-Mère
Gaspé, Dolbeau, Berthier
Saint-Paul, Tadoussac Gatineau

Mommy mommy, how come it’s not the same
Oh mommy mommy, there’s so much in a name
Oh mommy, tell me why it’s too late, too late
Much too late

Mommy mommy, I love you dearly
Please sing the song you sang when I was a baby
Fait dodo, Colas mon p’tit frère
Fait dodo, mon p’tit frère fait dodo tu auras du lolo

Mommy mommy, I remember the song
Oh mommy mommy, something seems to be wrong
Oh mommy, tell me why it’s too late, too late
Much too late

Mommy mommy, I love you dearly
Please tell me once again that beautiful story
Un jour, ils partirent de France
Bâtir ici quelques villages, une ville, un pays

Mommy mommy, how come we lost the game
Oh mommy mommy, are you the one to blame
Oh mommy, tell me why it’s too late, too late
Much too late

 

P.-S.—Parmi les interprètes qui ont repris cette chanson, il y a Marie-Jo Thério.

 

Puissance du roman

Julia Deck, Ann d’Angleterre, 2024, couverture

«Le roman est l’instrument de la connaissance.»

Il y a plusieurs mystères dans la vie. Pourquoi, par exemple, Caroline Dawson a-t-elle sous-titré «roman» Là où je me terre et Jean-Philippe Pleau «roman (mettons)» Rue Duplessis ? Ce sont à l’évidence deux récits de transfuge de classe. Leur dimension romanesque, si tant est qu’elle existe, est fort mince.

Ce n’est pas le cas d’Ann d’Angleterre de Julia Deck. Celle-ci parle de sa vie et de sa relation avec sa mère, qui vient d’être victime d’un accident cérébral, et de leur parcours de combattantes dans le système hospitalier français. On est alors du côté du témoignage, des souvenirs, de l’autobiographie ou de l’autoportrait (la narratrice ne cache pas ses torts et ses tares). Pourtant, le livre relève clairement du genre romanesque par plusieurs aspects.

Ann d’Angleterre est un roman d’abord par la reconstruction que propose Deck du récit de sa famille maternelle britannique. Dans quel milieu sa mère (la Ann du titre) a-t-elle grandi ? Qui étaient ses parents, sa sœur, ses nièces ? Qu’a-t-elle vécu avant de devenir sa mère ? Par la force des choses, la narratrice ne peut proposer que sa propre version, longtemps à posteriori, de ces divers parcours.

Il y a aussi que la Julia qui écrit à la première personne devient, à un moment du livre, une Julia à la troisième personne — à la fois celle qui raconte et celle qui est racontée. La narratrice devient son propre personnage. Cette prise de distance concourt à problématiser ce qui se dit.

Il y a encore que le genre romanesque, pour Julia Deck, qui a publié à ce jour cinq romans, est par excellence celui de de l’indétermination finale : «Mes livres se terminent toujours de manière incertaine. Je ne cherche pas la réponse, vécut-elle heureuse jusqu’à son dernier jour ou misérable comme un caillou. Je cherche la résolution, le point où la vague retombe pour donner naissance à une autre. Les réponses ne servent à rien, c’est l’artifice et la mort» (p. 237). Or une des intrigues d’Ann d’Angleterre repose sur un «trouble de la filiation» (p. 247) qui ne sera pas résolu. Au lecteur de juger, avec ce que la romancière a choisi de lui donner à lire.

On pourrait enfin souligner le fait que tout, dans ce livre, passe par le langage et par une réflexion sur le langage. Comment la narratrice pourrait-elle «remplir» sa «mission» auprès de sa mère (p. 191) quand elle ne maîtrise pas l’«idiome» (p. 200) hospitalier et ses «éléments de langage» (p. 177-178) ? Que cela se déroule en France n’est pas innocent : «Je suis née à Paris, et je peux révéler des secrets bien gardés : ici, la monnaie d’échange n’est pas l’argent, c’est la maîtrise du langage» (p. 121).

Une phrase énoncée deux fois dans des termes presque identiques, à un bout et à l’autre du roman, révèle précisément où loge l’autrice : «Que les choses soient claires. Je ne crois pas aux flashes, aux visions, à toutes ces fariboles fabriquées pas cher pour augmenter le réel à peu de frais quand il n’y a que le langage pour lui donner corps, épaisseur, direction» (p. 17; voir également p. 220). On dirait un art romanesque, comme on dit un art poétique.

P.-S.—Si l’Oreille tendue avait lu ce livre plus tôt, il aurait évidemment été retenu ici.

P.-P.-S.—De Julia Deck, l’Oreille a présenté Propriété privée de ce côté et Sigma de celui-là.

 

Références

Dawson, Caroline, Là où je me terre. Roman, Montréal, Éditions du remue-ménage, 2022, 201 p. Édition originale : 2020.

Deck, Julia, Ann d’Angleterre. Roman, Paris, Seuil, 2024, 250 p.

Pleau, Jean-Philippe, Rue Duplessis. Ma petite noirceur. Roman (mettons), Montréal, Lux éditeur, 2024, 323 p. Ill.

Chantons la langue avec Léo Ferré

Léo Ferré, la Langue française, 1962, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Léo Ferré, «La langue française», album la Langue française, 1962

 

C’est une barmaid
Qu’est ma darling
Mais in the bed
C’est mon travelling
Mon best-seller
Et mon planning
C’est mon starter
After shaving
J’suis son parking
Son one man show
Son fuel son king
Son slip au chaud
Rien qu’un p’tit flash
Au five o’clock
J’paie toujours cash
Dans l’bondieuscope
Et j’cause français
C’est un plaisir

C’est ma starlette
Ma very good
Mon pick galette
Mon Hollywood
C’est ma baby
Au tea for two
C’est ma lady
Au one two two
J’suis son jockey
Son steeple-chase
J’sais la driver
À la française
Dans le sleeping car
After paillasse
À son milk bar
Je m’tape un glass
Et j’cause français
C’est un plaisir

C’est ma call girl
Ma savourex
Qu’efface sa gueule
À coups d’kleenex
C’est ma Lucky
C’est ma Pall Mall
Ma Camel qui
Fait ça pas mal
Quand c’est OK
On fait l’remake
Quand c’est loupé
On fait avec
J’lui fais l’mohair
Et la syntaxe
Très rocking chair
Je shoot relax
Et j’cause français
C’est un plaisir

C’est une barmaid
Qu’est ma darling
Mais in the bed
C’est du forcing
C’est du pam pam
À chaque coup d’gong
C’est plus une femme
C’est un ping-pong
Quand je suis out
Elle m’sex appeal
Et dans l’black out
Je smash facile
Sur son standing
In extremis
J’fais du pressing
Au self service
Et j’cause français
C’est un plaisir

C’est mon amour
Mon coqu’licot
Mon petit bonjour
Mon petit oiseau
And je speak French
C’est un pleasure