L’homme pressé

En 1869, rapporte Jacques Marchand dans son livre la Presse sportive, à Grenoble, le Vélocipède vise «les sportsmen et les vélocemen» (p. 10 et p. 16). En 1886, une revue s’appellera le Véloceman (p. 16).

Le véloceman est-il plus rapide que le cycliste ? Une chose est sûre : à vélo, on ne peut faire autrement qu’être véloce.

 

Référence

Marchand, Jacques, avec la collaboration de l’Union syndicale des journalistes sportifs de France, la Presse sportive, Paris, Presse et formation. Éditions du Centre de formation et de perfectionnement des journalistes, coll. «Connaissance des médias», 1989, 79 p.

Technique de rupture

Comment rompre in absentia avec une aveugle ? Pour lui écrire, il faudrait connaître le braille. Autre solution, chez le Christian Gailly de K.622, le magnétophone :

Après un certain silence, de qualité très inquiétante, quoi qu’on attende du silence, on entend la voix du mari, assez fidèle ma foi : Je te quitte, Jeanne, je m’en vais, je pars, pour toujours, mais j’ai prévenu ta sœur, elle sera là demain matin, elle s’installe ici, elle vient vivre avec toi, voilà, adieu, Jeanne (p. 113).

On ne pense pas toujours suffisamment à ce genre de choses.

 

Référence

Gailly, Christian, K.622, Paris, Éditions de Minuit, 1989, 124 p.

Jurons modestement

Il y a les vrais sacres : tabarnac, cibouère, câââââlice, hostie, crisse, sacrament, etc.

Et il y a les versions édulcorées : tabouère, tabaraouette, torpinouche — et câline de bine.

Est-ce à cela que pensait cet entrepreneur de la région (officiellement bilingue) d’Ottawa ?

Conteneur à déchets

P.-S. — L’image vient du blogue de Jean-François Lisée sur le site du magazine l’Actualité par l’intermédiaire de @pimpettedunoyer.

Le français, langue européenne

Benoit Murray, le personnage principal du roman Tiroir no 24 de Michael Delisle, est adopté à six ans par la famille montréalaise qui possède la Boulange Cyr, ces «marchands de mokas» (p. 126). Treize ans plus tard, la situation commerciale est mauvaise, d’autant que vient de s’ouvrir en face une épicerie plus raffinée, Le Traiteur. Benoit finira par y travailler.

Qui dit raffinement culinaire dit souvent raffinement linguistique. Benoit va donc changer sa façon de parler. C’est madame Jean qui, la première, le souligne :

Mon Dieu, l’avez-vous entendu, «les pains à salade» ! Es-tu rendu avec un accent français, mon petit Benoit ? (p. 78)

Elle a entendu juste.

Je m’enferme dans les toilettes et je serre les dents. La vieille vache a raison. Il m’arrive d’avoir un accent. Ça m’échappe. C’est à force de travailler avec des Européens. C’est normal, mais ce n’est pas nécessaire de le claironner devant la clientèle (p. 79).

De qui Benoit a-t-il attrapé cet «accent français» ? De son patron, et amant, Jean-Pierre Lemaire. Celui-ci est… belge.

 

Référence

Delisle, Michael, Tiroir no 24, Montréal, Boréal, 2010, 126 p.