L’Oreille est rassurée

Dans le Dictionnaire québécois instantané qu’elle cosignait en 2004, l’Oreille tendue octroyait des prix aux mots à succès au Québec, les «Perroquets» (d’or, d’argent, de bronze). Le mot extrême était arrivé en tête.

Depuis, périodiquement, elle de demande si le mot a encore cours, d’où la rubrique «Extrême».

Les journaux de la fin de semaine la rassurent : «Oser la rénovation extrême», titre la Presse+; «Au-delà des sports extrêmes», répond le Devoir.

Ouf.

 

Référence

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.

Benoît Melançon, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, 2004, couverture

Nostalgie extrême ?

Roy MacGregor, l’Enfant du cimetière, 2009, couverture

Il y a un petit temps que l’Oreille tendue n’est pas allée musarder du côté de l’extrême. Aujourd’hui, chassons-le quand il croise l’oxymore (définition ici).

Cela donne…

un «Anti-extrémisme extrême» (le Devoir, 16-17 avril 2016, p. B1).

un «Minimalisme extrême» (la Presse, 17 mars 2012, cahier «Maison», p. 1).

des «Dépouillements extrêmes» (le Devoir, 19-20 mars 2011, p. E8).

de l’«étapisme extrême» (la Presse, 6 mars 2008, p. A26).

une équipe de crosse qui s’appelle «le mini-Extrême de Sherbrooke», dans l’Enfant du cimetière, de l’excellent Roy MacGregor (2009).

On n’arrête pas le progrès (à mi-chemin).

 

Référence

MacGregor, Roy, l’Enfant du cimetière, Montréal, Boréal, coll. «Carcajous», 13, 2009, 164 p. Traduction de Marie-Josée Brière. Édition originale : 2001.

La totale

L’Oreille tendue écrivait, le 27 janvier 2011, que l’adjectif ultime semblait être en lice pour remplacer extrême (c’est ici).

À la Presse, on l’a bien vu. Le quotidien titrait, le 13 février 2012 : «Véhicules ultimes pour skieurs extrêmes» (cahier Affaires, p. 14).

Tout est dans tout, et réciproquement.

À la fine pointe

L’adjectif extrême est partout dans la langue courante; la catégorie du même nom, en bas, à droite, en fait foi.

Extrême, ici substantivé, est aussi passé dans la langue savante : l’Université de Londres, dans le cadre de son institut parisien, organise, le 3 juin prochain, un colloque intitulé «Autour de l’extrême littéraire». On se souviendra que la critique littéraire aime parler de «l’extrême contemporain».

Il est rassurant de savoir que sont toujours ainsi repoussées les limites du savoir.