Les zeugmes du dimanche matin, de Dickens et de Fruttero & Lucentini

Dickens, Fruttero & Lucentini, l’Affaire D. ou le crime du faux vagabond, 1991, couverture

«Mr. Honeythunder, en sa qualité de professeur de philanthropie, avait rencontré Mrs. Crisparkle la dernière fois que les deux figurines de porcelaine s’étaient vues, après une réunion publique de philanthropie, où les orphelins d’âge tendre avaient été gavés de gâteaux aux prunes et de paroles lénifiantes» (Dickens, p. 103).

«Mr. Sapsea a fait plus ample connaissance avec Mr. Jasper depuis cette première rencontre où ils se sont régalés de porto, d’épitaphe, de trictrac, de bœuf et de salade» (Dickens, p. 194).

Jasper «se déplace toujours sans bruit et sans raison apparente» (Dickens, p. 205).

«Troisièmement, les Philanthropes se [permettaient] non seulement de pousser leur adversaire dans les cordes, mais aux limites du désespoir […]» (Dickens, p. 300).

«Mettons-nous à la recherche d’aventures et d’appartements» (Dickens, p. 376).

«Nous étions donc arrivés au circus Maximus et à cette fameuse scène de la fumerie qui a fait s’écrouler les derniers espoirs du Crapaud» (Fruttero & Lucentini, p. 410).

«Il s’est passé que Le Chauffeur, en suivant attentivement l’affaire Drood, a oublié d’en faire autant avec les voitures qui le précédent […]» (Fruttero & Lucentini, p. 411).

«Jasper, selon Kerr, avait perdu non seulement toute mémoire de son crime, mais aussi son parapluie […]» (Fruttero & Lucentini, p. 431 n.).

Dickens, Fruttero & Lucentini, l’Affaire D. ou le crime du faux vagabond, Paris, Seuil, 1991, 473 p. Ill. Édition originale : 1989. Traduction de Simone Darses. La traduction du texte de Dickens est de Charles-Bernard Derosne (1874), revue et corrigée par Gérard Hug.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Portrait paradoxal

Dickens, Fruttero & Lucentini, l’Affaire D. ou le crime du faux vagabond, 1991, couverture

«Mr. Grewgious avait été parfaitement choisi pour la mission qu’il avait à remplir, car c’était un homme d’une intégrité incorruptible, mais, à première vue, il n’avait aucune autre qualité particulière. Qu’on imagine un homme aride et sec, qui, s’il avait été pressé dans un moule, aurait produit une poudre aussi fine que du tabac à priser. Mr. Grewgious avait sur la tête de rares cheveux, qui présentaient la consistance et la couleur de la filasse; cela ressemblait si peu à une chevelure humaine qu’on aurait plutôt cru que c’était une perruque; mais comment supposer que quelqu’un pût volontairement se faire une pareille tête ! Les traits de son visage peu expressif semblaient n’avoir été que grossièrement ébauchés; certaine entaille sur son front faisait penser que la Nature, au moment de mettre sur cette figure une touche de sensibilité et de raffinement, de colère avait jeté le ciseau en disant : “Véritablement, je ne me donnerai pas la peine d’achever cet homme; qu’il reste comme il est.”

En haut, le cou de Mr. Grewgious était trop long; en bas, ses chevilles et ses talons étaient trop osseux; il avait, des pieds à la tête, un air gauche et embarrassé, une démarche contrainte, et avec cela la vue si courte qu’il était incapable de voir lui-même le contraste déplaisant que ses longs bas blancs formaient avec ses vêtements noirs. Et pourtant, Mr. Grewgious avait en lui je ne sais quel étrange privilège qui faisait que l’ensemble de sa personne produisait presque une agréable impression.»

Charles Dickens, le Mystère d’Edwin Drood (1870, inachevé), dans Dickens, Fruttero & Lucentini, l’Affaire D. ou le crime du faux vagabond, Paris, Seuil, 1991, 473 p., p. 139-140. Édition originale : 1989. Traduction de Simone Darses. La traduction du texte de Dickens est de Charles-Bernard Derosne (1874), revue et corrigée par Gérard Hug.

Notes italiennes

Campari soda et vin rouge, Florence, décembre 2023

Il y a peu, l’Oreille tendue séjournait en Italie. Deuxième série de notes. (Les premières sont ici.)

Les plafonds des salles de colloques en Italie, c’est autre chose.

Plafond du Palazzo Greppi, Milan, décembre 2023

Plafond du Palazzo Greppi, Milan, décembre 2023

Du temps où elle enseignait, l’Oreille recommandait à ses étudiants de ne jamais terminer une présentation PowerPoint sur une diapositive contenant quelque chose comme «Merci de votre attention». Il faut, au contraire, y mettre quelque chose d’utile pour les auditeurs (références, liens web, etc.). Au moins trois conférenciers du congrès auquel participait l’Oreille auraient dû suivre ses enseignements.

Tableau pour le premier ministre du Québec, François Legault, en ces temps de grèves, notamment scolaires : «Exclus de l’école» (Emilio Longoni, «Chiusi fuori scuola», Pinacoteca Ambrosiana, Milan).

Emilio Longoni, «Chiusi fuori scuola», Pinacoteca Ambrosiana, Milan

Le vêtement rayé que refuseront de porter les Italiens n’a pas encore été dessiné.

Le 10e cercle de l’enfer ? Florence, un dimanche.

De l’eau en bouteille «ecogreen», à «impact co2 zéro» ? Avoir comme un léger doute.

Bouteille d’eau Ecogreen, Florence, décembre 2023

Anish Kapoor, ça peut être renversant.

Miroir d’Anish Kapoor, Florence, décembre 2023

Lire Patrick Boucheron. Aller à Sienne pour voir les fresques d’Ambrogio Lorenzetti. Tomber sur des salles fermées (en restauration). Soupirer.

Des sources conjugales proches de l’Oreille tendue, dans une rue de la même ville : «Ta faible consommation de Campari soda, c’est scandaleux.» C’était vrai, à ce moment-là.

Campari soda, Rome, décembre 2023

Il se passe de drôles de choses dans les douches romaines.

Avertissement, salle de bain, Rome, décembre 2023

Autopromotion 734

Façade de la Scala de Milan, 2011, photo de Jean-Christophe Benoit

Quand vous lirez ceci, l’Oreille tendue sera en Italie.

Pourquoi ? Pour donner la conférence d’ouverture du congrès de l’Association italienne d’études canadiennes, «Les cultures du Canada : au-delà du passé, vers le futur».

Son sujet ? «Le sport national des Québécois : parler de langue (ou : De quelques idées reçues)».

Le blogue risque donc de tourner au ralenti pour quelques jours. C’est comme ça.

 

[Complément du 25 février 2025]

Le texte de cette conférence a paru :

Melançon, Benoît, «Le sport national des Québécois : parler de langue», dans Maria Cristina Brancaglion, Marco Modenesi et Oriana Palusci (édit.), les Cultures du Canada : au-delà du passé, vers l’avenir. The Cultures of Canada : Beyond the Past, Towards the Future, Trente, Tangram Edizioni Scientifiche, coll. «Dialogues», 04, 2024, p. 107-125.

 

Illustration : façade de la Scala de Milan, 2011, photo déposée par Jean-Christophe Benoit sur Wikimedia Commons

 

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture

Accouplements 196

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Dans la plus récente livraison de l’excellente lettre d’information Sur le bout des langues de Michel Feltin-Palas, l’Oreille tendue découvre un néologisme créé par Umberto Eco, luthomiction («l’art de pisser dans un violon»).

Comment ne pas penser à ce dessin de Thibaut Soulcié pour la Revue dessinée ?

Violons-urinoirs, dessin de Thibault Soulcié, la Revue dessinée, 2022