Des titres à éviter, bis

Sushi & sa chimie

Le 15 mars 2013, l’Oreille tendue dressait une liste de titres à éviter pour cause de jeu de mots.

Rebelote.

«Justin Trudeau et le pot. Un pari fumant» (la Presse, 23 août 2013, p. A1).

«L’hypothèque s’installe à demeure» (le Devoir, 17-18 août 2013, p. C4).

«Droits des homosexuels. C’est pas gai en Russie» (la Presse, 10 août 2013, p. A1).

«Un bibliothécaire à livre ouvert» (Métro, 6 août 2013).

«Le Commensal à la diète. La chaîne de restaurants se place sous la protection de la loi sur les faillites» (la Presse, 29 mai 2013, p. 6).

«La déprime mine le moral des futurs géologues» (la Presse, 22 avril 2013, cahier Affaires, p. 8).

«Environnement. Un terreau fertile pour les emplois» (la Presse, 16 mars 2013, cahier CV, p. 1).

Peter Szendy, À coups de points. La ponctuation comme expérience, Éditions de Minuit, 2013.

Qui prend pays prend brebis

Où il y a de la gêne vaut mieux éviter le plaisir

Une catastrophe (humaine, écologique, économique, sociale) touche le Québec depuis samedi dernier : un train a déraillé en plein centre de la petite ville de Lac Mégantic et causé la mort de plusieurs dizaines de personnes.

Les médias s’arrachent les experts. L’Oreille tendue a été frappée hier par le fait que beaucoup de ces experts, à la fin de leur intervention, répondant aux remerciements de l’animateur, disaient «Ça me fait plaisir».

C’est moi qui vous remercie; Y a pas de quoi; Je vous en prie : oui. Mais pas Ça me fait plaisir.

Tout tout proche

L’Oreille tendue ne manque jamais une occasion de le dire : ses lecteurs ont l’oreille tendue.

L’un d’eux, lisant Pierre Foglia dans la Presse, remarque l’expression de proximité.

Il se passe quelque chose et je ne parle plus ici d’édition. Je parle d’un changement qui va pas mal plus loin que le bio. Un intérêt, les 10 000 exemplaires en témoignent, pour une agriculture différente, de proximité, notamment dans la grande couronne de Montréal, sur des petites surfaces, sans machinerie lourde, une autre idée d’envisager le territoire, même une autre façon de remuer le sol, en surface sans en bouleverser la structure chaque fois… (1er juin 2013).

Ce lecteur ne s’arrête pas en chemin et il multiplie les exemples :

De quoi s’occupent donc les municipalités ? De questions bien concrètes et terre-à-terre comme la circulation, le transport public, le déneigement, la cueillette des ordures, les services de proximité sportifs et culturels (la Presse, 28 mai 2013, p. A17).

Le maire «fait le trottoir» régulièrement et pratique une politique de proximité. Lui-même locataire — pas les moyens d’acheter dans son propre fief —, il vit sur le Plateau depuis une quinzaine d’années et y pédale dix mois par année (le Devoir, 3 mai 2013, p. B10).

Les deux équipes ont joué un hockey de proximité en 2e période, avec comme résultat que chacune marque une fois, de telle sorte que la situation au tableau principal ne change pas, les locaux gardant leur priorité de deux buts après 40 minutes de jeu (l’Avantage, 3 décembre 2010).

Bruno [Roy] s’est créé des parents après les avoir trouvés… une mère d’amour de proximité, un père qu’il a choisi et à partir duquel il a façonné son destin d’écrivain (le Devoir, 18 janvier 2010, p. A7).

Il serait également nécessaire de favoriser une médecine de proximité en offrant davantage de services à domicile (le Devoir, 5 novembre 2007, p. A3).

Le milieu est d’autant plus convivial que les aînés et les enfants ont le loisir de profiter des lieux et des rues sans limite et avec l’usage, un urbanisme de proximité s’installe pour assurer une meilleure sécurité (la Tribune, 26 septembre 2005, p. A10).

Tout cela est probant. Danger : cliché.

P.-S. — Ce n’est pas pour se vanter, mais l’Oreille avait déjà un exemple dans sa sébile : «Vers un terrorisme de proximité ?» (le Devoir, 25-26 mai 2013, p. B1). On n’est jamais mieux servi que par ses proches.

L’art du titre sans poulet

Les révélations entendues à la Commission (québécoise) d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction, la Commission Charbonneau, du nom de la juge qui la préside, ont coûté son poste à Gilles Vaillancourt, le maire, que l’on croyait inamovible, de Laval.

Rebelote, en quelque sorte, avec son remplaçant, Alexandre Duplessis, qui vient de demander au gouvernement du Québec de mettre sa ville en tutelle.

Le 31 mai, au moment où l’on a appris la nouvelle, le journaliste Patrick Lagacé twittait ceci :

Alexandre Duplessis, chicken

Dans son journal, la Presse, le lendemain, il écrivait plutôt : «Alexandre Duplessis, dégonflé» (p. A5). Dans le corps de l’article que coiffe ce titre, il y a aussi «pissou».

Alexandre Duplessis serait donc un «chicken», un «dégonflé» ou un «pissou»; ça veut dire la même chose.

La Presse a choisi un mot au lieu des deux autres. Quelqu’un y serait-il chicken linguistiquement ?

 

[Complément du 26 décembre 2021]

Exemple littéraire, tiré des Noyades secondaires (2017) de Maxime Raymond Bock :

— À l’odeur, doit y avoir un animal mort là-dedans, certain.
— Chicken (p. 223).

 

Référence

Raymond Bock, Maxime, les Noyades secondaires. Histoires, Montréal, Le Cheval d’août, 2017, 369 p.

Rire dans son assiette

En janvier 2012, Alain Dubuc, dans le journal la Presse, s’en prenait au «néo-jovialisme» supposé de Jean-François Lisée.

Dans le même journal, le même Dubuc, le 24 mai, parle de la «Politique de souveraineté alimentaire» du gouvernement du Québec. Son titre ? «L’agrojovialisme» (p. A22).

On ne le dit pas assez : Alain Dubuc fait beaucoup pour le jovialisme au Québec.