C’était dans le Devoir du 14 juillet 2011 : «De plus, il s’est redéployé autour du paradigme anabolisant de la sécurité nationale […]» (p. A7).
«Paradigme anabolisant» ? Est-ce bien nécessaire ?
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
C’était dans le Devoir du 14 juillet 2011 : «De plus, il s’est redéployé autour du paradigme anabolisant de la sécurité nationale […]» (p. A7).
«Paradigme anabolisant» ? Est-ce bien nécessaire ?
L’invité de la semaine est le cahier Mon toit du quotidien la Presse.
«Le mobilier intégré : une solution fonctionnelle et architecturale» (8 janvier 2011, p. 5).
«Un choix esthétique et énergétique» (15 janvier 2011, p. 6).
(Une définition du zeugme ? Par là.)
L’Oreille tendue aime assez bricoler; elle a écrit un livre sur un mythe sportif québécois : elle ne peut donc qu’être sensible au cliché du mythe à boulons.
«Oubliez les quatre murs du CLSC et le règne du “chacun dans sa cour”, la région de Beauport déboulonne tous les mythes qui collent à notre système de santé» (le Devoir, 4 juin 2001).
«Permettez que l’on déboulonne le mythe des méga et gigahertz en lieu et titre des statues de Lénine» (le Devoir, 4 septembre 2001).
«Vidéo : les mythes alimentaires déboulonnés» (la Presse, 14 mai 2011, cahier Gourmand, p. 4).
Si les mythes sont déboulonnés, c’est nécessairement qu’ils ont été préalablement boulonnés. Question : (dé)boulonneur de mythe, c’est un métier ?
P.-S. — Le mythe peut aussi se dégonfler : «Breton dégonflera le mythe du déficit zéro» (le Devoir, 26-27 avril 2003). (Dé)gonfleur de mythe ? Que de questions sans réponse !
[Complément du 2 décembre 2012]
On pourrait aussi être (dé)gonfleur d’épouvantails : «Le politologue Stéphane Paquin, à son tour, dégonfle certains épouvantails liés à la mondialisation» (le Devoir, 1er-2 décembre 2012, p. F7).
[Complément du 4 septembre 2014]
Le stéréotype, fût-il sexuel, est aussi boulonné : «Élise Gravel déboulonne les stéréotypes sexuels dans son nouveau livre jeunesse» (@LibrairieMonet).
[Complément du 17 décembre 2014]
On peut aussi, semble-t-il, (dé)boulonner des tabous (@eli_B), des idées reçues (la Presse, 23 janvier 2013, cahier Affaires, p. 7), des clichés (@plusonlit) et des perceptions (le Devoir, 10-11 novembre 2012, p. A12).
Tant de boulons, si peu de clés.
[Complément du 16 janvier 2015]
Les mensonges auraient aussi des boulons.
Pour déboulonner ce commode mensonge de l'enfer fiscal québécois — qui justifie le recours au paradis du même nom.http://t.co/4TDaqNbSeZ
— Normand Baillargeon (@nb58) January 15, 2015
[Complément du 4 octobre 2015]
Les règles seraient encore équipées de boulons : «La fameuse règle du 70 % déboulonnée» (la Presse+, 4 octobre 2015).
[Complément du 11 janvier 2016]
On ne se le dit pas assez : le préjugé itou est boulonné.
Avec son «Lac des cygnes» afro-gai, Dada Masilo déboulonne les préjugés #danse https://t.co/qwVkWWxSuN pic.twitter.com/qYEtzaNMEt
— Le Devoir (@LeDevoir) January 10, 2016
[Complément du 28 janvier 2016]
Le mariage aussi aurait des boulons.
Roman. L'Américaine Meg Wolitzer déboulonne avec malice le mariage dans "La Doublure". https://t.co/O1oa7TbdxZ
— Le Monde des livres (@MondedesLivres) January 28, 2016
[Complément du 21 février 2016]
Le cinéaste québécois Claude Jutra, trente ans après sa mort, est accusé de pédophilie. Interrogation dans la Presse+ du 19 février : «Peut-on déboulonner Claude Jutra sans déboulonner tout ce qu’il a touché ?» Il serait donc possible de déboulonner une personne / un personnage historique, voire «tout ce qu’il a touché». Ça commence à faire beaucoup.
[Complément du 3 juillet 2016]
Il y aurait des métaphores gonflées : «Économiste contestataire, Ianik Marcil dégonfle les métaphores trompeuses de ses confrères» (le Devoir, 2-3 juillet 2016, p. E8).
[Complément du 29 juillet 2016]
La légende a-t-elle des boulons ? Oui, selon Ian Manook (les Temps sauvages. Roman, Paris, Albin Michel, coll. «Le livre de poche. Policier», 34208, 2016 [2015], 573 p., p. 71).
[Complément du 3 août 2016]
Une certitude à boulons ? C’est ce que donne à penser le Devoir du jour (p. B6).
[Complément du 16 août 2016]
Vous vous demandiez comment tenaient les à prioris ? Ne cherchez plus.
Article qui déboulonne certains à prioris https://t.co/rQPtptSAIt
— Annie Desrochers (@NieDesrochers) August 16, 2016
[Complément du 29 décembre 2016]
On pourrait encore, semble-t-il, «dégonfler» une «thèse» (le Devoir, 24-25 décembre 2016, p. E8).
[Complément du 16 août 2017]
Les symboles ? Les symboles aussi : «Les symboles sécessionnistes déboulonnés» (la Presse+, 16 août 2017).
[Complément du 26 septembre 2017]
C’est écrit dans le Devoir des 23-24 septembre : «Éléphant, le conte moderne de Martin Suter, déboulonne les transformations génétiques» (p. F5). Elles ont donc des boulons elles aussi ?
Même jour, même journal, p. B1 : «Élections allemandes. L’indéboulonnable Merkel.»
[Complément du 11 octobre 2017]
Une figure à boulon(s) ? «Que garder et que déboulonner dans la figure de Lénine ?» se demande en effet France Culture sur Twitter.
[Complément du 4 mars 2018]
C’est écrit dans le Devoir de la fin de semaine : «elle déboulonnait les codes» (Magazine D, p. 3). C’est nouveau, ça.
[Complément du 3 mai 2018]
Les allégations aussi en auraient : «Des allégations déboulonnées une à une par le juge» (la Presse+, 3 mai 2018).
[Complément du 2 juillet 2018]
Les athlètes itou. Que dire d’un sportif dont la place dans son équipe est assurée ? Il est «indéboulonnable». C’est du moins ce qu’a déclaré Rémi Garde, l’entraîneur de l’Impact de Montréal — c’est du soccer et donc du football, et vice versa —, après le match de samedi dernier, au sujet d’un de ses milieux de terrain, Samuel Piette.
[Complément du 6 août 2018]
Il y a plus radical : «Dix mythes à abattre au pas de course» (la Presse+, 1er août 2018).
[Complément du 28 septembre 2018]
Les préoccupations aussi, dit-on : «Bref, c’est fascinant de voir, au fil des cinq matchs préparatoires qu’il a disputés, combien il a déboulonné une à une les préoccupations qu’il pouvait susciter» (Athlétique, 27 septembre 2018).
[Complément du 6 septembre 2020]
Dans l’actualité récente, il a beaucoup été question de la statue du premier premier ministre du Canada, John A. MacDonald, déboulonnée à Montréal le 29 août par des manifestants.
Signalons deux usages lexicaux qui paraissent nouveaux en contexte statuaire québécois.
Boulonnage : «Sculpteur recherché en vue du “boulonnage” d’un bronze de Jacques Parizeau» (le Devoir, 1er septembre 2020, p. A3).
Autodéboulonner : «Allez ! C’est le temps de vous autodéboulonner…» (caricature de Pascal, le Devoir, 2 septembre 2020, p. A6)
Continuons à tendre l’oreille.
[Complément du 29 septembre 2020]
Les rumeurs aussi auraient des boulons ? C’est le Journal de Montréal qui le dit : «Le DG déboulonne les rumeurs.»
[Complément du 26 octobre 2021]
Découverte ornithologique du jour : les noms d’oiseaux auraient des boulons. Il faudrait, semble-t-il, les leur enlever. C’est Radio-Canada qui le dit.
[Complément du 11 novembre 2021]
Peut-être ne le saviez-vous pas, mais les rois auraient aussi des boulons : «Un déboulonnage en règle du roi au panache et au cheval blancs» (Twitter).
[Complément du 25 janvier 2023]
Autre occurrence du tabou à boulons, dans la Presse+ du jour : «Déboulonner les tabous de la maladie mentale.»
D’autres exemples ? Par là.
[Complément du 26 février 2023]
Un «succès médiatique» à «déboulonner» (Kevin Lambert, Que notre joie demeure, Montréal, Héliotrope, 2022, 381 p., p. 126) ? Pourquoi pas.
[Complément du 5 novembre 2024]
Des habitudes ? Des habitudes : «Mais comme dans tout processus, déboulonner des habitudes peut prendre du temps» (la Presse+, 4 novembre 2024).
L’Oreille tendue peut-elle, avec tout le respect qui s’impose quand on s’adresse à une société d’État, suggérer à Radio-Canada d’interdire, avec la plus grande fermeté, l’utilisation, au début de n’importe quelle réponse à n’importe quelle question, de l’expression «Écoutez», parfaitement vide de sens à la radio (on n’y fait que ça, écouter) ? Pareille interdiction limiterait dramatiquement — il est vrai — le vocabulaire de la chroniqueuse économique de certaine émission (montréalaise) du matin.
P.-S. — On évitera bien évidemment de remplacer écoutez par ’garde.
S’agissant de la même étude, deux points de vue, le même jour (hier), avec des photos semblables (un corps sans tête, au ventre bien rebondi).
Le Devoir : «L’obésité progresse toujours au Canada. Une personne sur quatre est maintenant considérée comme obèse au pays» (p. A2).
La Presse : «Les Canadiens sont moins gros que les Américains» (p. A10).
Quel est le proverbe déjà ? Quand on se regarde, on se désole; quand on se compare, on se console ?