«Ma langue est la limite de mon monde» (Ludwig Wittgenstein, cité dans la 47e livraison de la Lettre d’information, septembre-octobre 2012, de l’Observatoire européen du plurilinguisme).
Le jovialisme en mutation ?
On connaissait déjà jovialisme et jovialiste.
En 2004, dans leur Dictionnaire québécois instantané, l’Oreille tendue et Pierre Popovic, à jovialisme, jovialiste, écrivaient ceci :
Variante québécoise de l’épicurisme, prêchée par le «philosophe» André Moreau. Prend une extension de plus en plus large. «La vision “jovialiste” de Landry consterne Parizeau» (le Devoir, 9 juin 2000). «La nouvelle proposition libérale : du “jovialisme constitutionnel”, selon Facal» (la Presse, 18 janvier 2001). «Véritable boursouflure d’orgueil, le jovialiste beurre tellement épais […]» (le Devoir, 16-17 juin 2001).
On était donc passé d’une conception du jovialisme comme revendication du plaisir à un sens proche de déni de la réalité. Autre exemple, qui confirme ce glissement : «À la moindre indication que les prévisions financières de Loto-Québec sont jovialistes, le projet du bassin Peel devrait être abandonné» (la Presse, 23 février 2006, p. A22).
On découvre maintenant néo-jovialisme et néo-jovialiste.
Dans la Presse du 27 janvier, Alain Dubuc s’en prend à un récent ouvrage de Jean-François Lisée, Comment mettre la droite K.-O. en 15 arguments. Le titre de son article ? «Les méfaits du néo-jovialisme» (p. A19). Que reproche (notamment) Dubuc à Lisée ? «Cela a entraîné mon collègue dans une croisade néo-jovialiste dont ce pamphlet est l’aboutissement.»
Voilà qui fait naître une question : néo par rapport à quoi ? À Moreau ? Au sens dérivé des mots jovialisme et jovialiste ? En sommes-nous à la première ou à la deuxième mutation ?
Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : on n’arrête pas le progrès.
Références
Lisée, Jean-François, Comment mettre la droite K.-O. en 15 arguments, Montréal, Stanké, 2012, 150 p. Ill.
Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.