Cochon saignant

Emmanuel Bouchard, Parallèle 45, 2024, couverture

Soit ceci, tiré du roman Parallèle 45 (2024), d’Emmanuel Bouchard :

Un jour, quelques mois avant sa mort, mon père avait disparu pendant une journée entière sans donner de nouvelles, ce qui n’était pas dans ses habitudes quand il ne travaillait pas. Ma mère se faisait du sang de cochon (p. 133).

Se faire du sang de cochon ? Explication du dictionnaire numérique Usito : «s’inquiéter, se tourmenter». En ce sens, il peut être légitime de remplacer le cochon par la punaise.

À votre service.

 

Référence

Bouchard, Emmanuel, Parallèle 45, Montréal, Mains libres, 2024, 197 p. Ill.

Ursidé médian

Yogi Bear, «Hi kids ! Don’t feed the bears», 1961

Soit les deux phrases suivantes :

«Certes, il faut être beaucoup plus ambitieuse que la moyenne des ours pour être mairesse de Montréal» (la Presse+, 24 octobre 2024).

«“Nous sommes de petites bêtes”, m’a souvent confié Odile, pour qui la distinction entre les animaux et les êtres humains est moins tranchée que pour la moyenne des ours» (la Presse+, 28 novembre 2024).

Qu’est-ce que cette moyenne des ours ? En français de référence, on pourrait proposer citoyen lambda ou commun des mortels comme synonymes. Le dictionnaire numérique Usito suggère «la plupart des gens».

D’où cela viendrait-il ? Un groupe de discussion en ligne évoque une origine états-unienne. Il s’agirait d’une phrase du personnage de Yogi Bear se vantant d’être plus malin que l’ours moyen («I’m smarter than the av-er-age bear !»).

Les voies de la lange sont souvent impénétrables.

P.-S.—Ne parlons même pas de la prononciation du mot ours.

P.-P.-S.—Dans le magazine The New Yorker de cette semaine : «I don’t look like your average bear

 

Illustration : «Hi kids ! Don’t feed the bears», 1961, photo déposée sur Wikimedia Commons

Tout recommencer, ou pas

«Lane Hutson, nouveau contremaître de la reconstruction», site RDS.ca, 13 octobre 2024

Les équipes sportives ne peuvent pas toujours être au sommet du classement année après année. Il arrive des moments où elles doivent se transformer. Comment appeler cette transformation ?

Prenons l’exemple des Canadiens de Montréal — c’est du hockey. On y a entendu plusieurs expressions au fil des ans. D’autres sont possibles.

Reset (dans la langue de Marc Bergevin) ou réinitialisation (en français).

Retool (bis) ou rééquipement (bis). Dans le même esprit : réoutillage.

Réingénierie, mot importé du vocabulaire de la pédagogie, en passant par la politique, auquel certains préfèrent reconfiguration des processus.

Reconstruction (rebuild). En bonne logique entrepreneuriale, celle-ci nécessiterait un contremaître (voir l’image ci-dessus, tirée du site de RDS du 13 octobre 2024) ou un reconstructeur, voire, au besoin, des vacances de la reconstruction.

Refondation. Le terme existe dans le système de santé québécois, mais il ne paraît pas avoir migré à l’aréna.

Rajeunissement. Si c’était aussi facile que cela, ça se saurait !

Pour faire plus simple, on peut parler de mot en r-. C’est imprécis mais inclusif.

P.-S.—Comme on le sait, à un certain moment, histoire d’être dans le mix, il faut cesser de se contenter du mot en r-.

P.-P.-S.—Oui, bien sûr, c’est de la langue de puck.

 

[Complément du 23 novembre 2024]

Titre du jour dans la Presse+ : «Sénateurs d’Ottawa. Faudra-t-il déconstruire la reconstruction ?» Les derridiens apprécieront.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey. Édition revue et augmentée, Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 159 p. Préface d’Olivier Niquet. Illustrations de Julien Del Busso.

Melançon, Benoît, Langue de puck, édition revue et augmentée de 2024, couverture