Nelly Kaprièlian dit des niaiseries

Le masque et la plume, émission de radio, logo

Depuis plusieurs années, l’Oreille tendue écoute religieusement l’émission dominicale le Masque et la plume. On y parle, en alternance, de littérature, de cinéma ou de théâtre. Quatre critiques y sont réunis autour de Jérôme Garcin.

Ce n’est pas par intérêt esthétique que l’Oreille suit l’émission. Des phrases comme «J’ai a-do-ré» ou «C’est bien écrit» ne servent pas à grand-chose en critique littéraire. En revanche, les échanges entre les collaborateurs, chacun campé dans son rôle, ont une réelle valeur anthropologique : coups de gueules, vannes, cacophonie — voilà qui amuse et étonne, vu du Québec.

Dans la livraison du 24 avril, il était question du plus récent roman de Joël Dicker, l’Affaire Alaska Sanders (2022). Nelly Kaprièlian, des Inrockuptibles, comme les autres participants, n’a pas apprécié l’œuvre, et particulièrement ce qu’elle appelle son «style». Elle en profite pour dire deux niaiseries.

Première niaiserie : «Je croyais que c’était traduit de l’américain par un traducteur québécois.» Ne suit évidemment aucune démonstration : du fiel hexagonal à l’état pur.

Deuxième niaiserie : «J’adore le Québec et les Québécois. Commencez pas à me regarder comme ça.» Traduisons : j’ai préparé une petite phrase fielleuse; je sais qu’elle est fielleuse; je ne peux pas résister à la tentation de la dire; je la dis, tout en faisant semblant d’en atténuer la portée (j’aime les Québécois, même s’ils sont nuls [en traduction]).

En si peu de mots, tant de bêtise(s) : il faut admirer.

 

[Complément du 11 mai 2022]

«Chacun campé dans son rôle» ? Allons-y voir.

 

Cinéma

Michel Ciment : «C’est un film bulgare de l’année dernière, mais John Ford a déjà fait bien mieux, quoi qu’en pense la presse parisienne unanime.»

Pierre Murat : «C’est un film sympatoche, mais inférieur aux grands films russes. Je ne vous raconterai pas la fin.»

Xavier Leherpeur : «Vous n’avez rien dit encore de la grammaire du film.»

Éric Neuhoff : «Manifestement, la réalisatrice est mal baisée.»

Sophie Avon : «Le film est imparfait, certes, mais il est beau.»

Jean-Marc Lalanne : «On peut lire le film, jusque dans son rapport aux corps et aux fantasmes, comme une métaphore de la déliquescence dans les Balkans aujourd’hui.»

Camille Nevers : «Ce n’est pas mon film préféré de ce réalisateur.»

Éva Bettan : «Je n’aime pas utiliser ce mot-là, mais je vais l’utiliser quand même.»

 

Littérature

Arnaud Viviant : «En apparence, c’est un roman sur la culture de la betterave, mais c’est un grand livre politique. J’ai a-do-ré.»

Olivia de Lamberterie : «Je n’aime pas les betteraves, mais mon mari, si. J’ai a-do-ré.»

Nelly Kaprièlian : «Ce n’est pas traduit par un traducteur québécois. J’ai a-do-ré.»

Jean-Claude Raspiengas : «Vous pouvez bien rigoler, tous autant que vous êtes, mais le travail du style est magnifique. J’ai a-do-ré.»

Frédéric Beigbeder : «La romancière est jolie. J’ai a-do-ré.»

Éric Neuhoff : «Ouais, elle est pas mal. J’ai a-do-ré.»

Michel Crépu : «De quel livre parle-t-on ? Quoi qu’il en soit, j’ai a-do-ré.»

Jean-Louis Ézine : «Je n’ai pas tout lu, mais ça m’a fait penser à une phrase d’Henri Calet. J’ai a-do-ré.»

Patricia Martin : «J’ai a-do-ré.»

 

Théâtre

Jacques Nerson : «Ça ne va pas du tout. Gérard Philippe, c’était bien bien mieux.»

Vincent Josse : «Je suis trop jeune pour avoir vu ce spectacle.»

Fabienne Pascaud : «Mais voyons, Jacques !»

Armelle Héliot : «Elle est géniale, cette petite comédienne. Ils sont tous bons, les acteurs.»

 

L’animateur

Jérôme Garcin : «Moi, je ne suis pas critique.»

Autopromotion 631

Carte de la francophonie mondiale, 2022

Ce soir, un peu après 20 h, l’Oreille tendue répondra aux questions de Jacques Beauchamp dans le cadre de l’émission spéciale la Francophonie dans tous ses états de la radio de Radio-Canada.

Il sera notamment question du niveau qui baisserait, ou pas.

 

[Complément du 21 mars 2022]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

 

Illustration : la Langue française dans le monde 2022, Paris, Gallimard et Organisation internationale de la Francophonie, 2022, «Synthèse»

 

Référence

Melançon, Benoît, Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

Benoît Melançon, Le niveau baisse !, 2015, couverture

Autopromotion 610

Wikipédia, logo, 9 juin 2021

Ce matin, autour de 9 h 15 (heure de Montréal), l’Oreille tendue parlera de la fiabilité de l’encyclopédie numérique Wikipédia au micro de Patricia Bitu Tshikudi à l’émission de radio le 6 à 9 (Radio-Canada, Winnipeg).

Il sera notamment question de l’article «Wikipédia, plus fiable qu’on ne le croit».

P.-S.—En effet, ce n’est pas la première fois que l’Oreille cause de Wikipédia; voyez ici.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien .

Autopromotion 605

Fenêtre encyclopédique, Montréal

Entre 14 h et 15 h, l’Oreille tendue sera au micro de Marie-Louise Arsenault, à l’émission radiophonique Plus on est de fous, plus on lit ! (Radio-Canada), pour parler de dictionnaires et de la place que ceux-ci devraient faire, ou pas, à iel.

P.-S.—Iel ? «Iel, iels. Pronom personnel. Rare. Sujet de la troisième personne du singulier et du pluriel, employé pour évoquer une personne quel que soit son genre» (Dico en ligne Le Robert, octobre 2021). Voir aussi sa définition, plus étendue, dans le Wiktionnaire.

 

Quelques références utiles…

Bimbenet, Charles, «Pourquoi Le Robert a-t-il intégré le mot “iel” dans son dictionnaire en ligne ?», article électronique, Dico en ligne Le Robert, 16 novembre 2021.

Candea, Maria et Laélia Véron, «Votre dictionnaire est-il de droite ?», fichier sonore, Parler comme jamais, épisode 6, Binge audio, 2020.

Meschonnic, Henri, Des mots et des mondes. Dictionnaires, encyclopédies, grammaires, nomenclatures, Paris, Hatier, coll. «Brèves Littérature», 1991, liv/311 p. Ill.

Rey, Alain, Encyclopédies et dictionnaires, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 2000, 1982, 127 p.

Stamper, Kory, Word by Word. The Secret Life of Dictionaries, New York, Pantheon, 2017, xiii/296 p.

Le compte rendu de l’Oreille tendue est .

Villers, Marie-Éva de, Profession lexicographe, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Profession», 2006, 70 p. Ill.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.