Citation épistolaire du jour

26 lettres, Montréal, 2014, couverture

«Peut-être trouveras-tu étrange de recevoir une lettre de ton père. Surtout que, lorsque tu seras en âge de la lire, il se sera écoulé quelques années.

Or, le décalage entre l’envoi et la réception de cette lettre me remplit de joie. Les mots, dans le temps, auront pris une autre densité. Le moment de la lecture viendra réanimer le moment de l’écriture, et fera exister un fil tendu entre deux temps hors du temps, par lequel celui que je suis aujourd’hui et celle que tu seras demain seront liés.»

Olivier Choinière, «Affaires (les vraies)», dans Olivier Choinière (édit.), 26 lettres. Abécédaire des mots en perte de sens, Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 02, 2014, p. 14-17, p. 15.

Dans pas long, comme

Sandra Gordon, les Corpuscules de Krause, 2010, couverture

Cela est imminent : tout à l’heure.

Au Québec, on entend aussi une version comprimée de l’expression. Mais comment l’écrire ?

Léandre Bergeron, en 1980, propose «T’à l’heure» (p. 478).

Sandra Gordon (2010, p. 43) et Alice Michaud-Lapointe (2014, p. 147) optent pour «talheure».

Martin Winckler laisse tomber l’allusion graphique au temps : «talleur» (2011, p. 31).

Si peu d’heures (c’est le cas de le dire), tant de questions.

P.-S. — T’à l’heure / talheure / talleur s’emploie le plus souvent pour un avenir proche. Il arrive aussi qu’il désigne un futur plus éloigné et généralement connoté négativement : ce que tu fais n’a peut-être pas de conséquences immédiates, mais attention t’à l’heure / talheure / talleur.

P.-P.-S. — Dans pas long ? Ici.

 

[Complément du 16 mars 2016]

Erika Soucy, dans les Murailles, retient «t’à l’heure» (2016, p. 145).

 

[Complément du 27 août 2016]

Variante graphique, repérée sur Twitter.

 

[Complément du 10 novembre 2016]

Pour Michel Tremblay aussi, en 2007, c’est «t’à l’heure» (p. 44).

 

[Complément du 18 août 2022]

Taleur, sans double l, est aussi attesté : «Attache-toé après de quoi de solide, mon Laganière, tu vas décoller taleur» (la Bête creuse, p. 366).

 

Références

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise, Montréal, VLB éditeur, 1980, 574 p.

Bernard, Christophe, la Bête creuse. Roman, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 14, 2017, 716 p.

Gordon, Sandra, les Corpuscules de Krause. Roman, Montréal, Leméac, 2010, 237 p.

Michaud-Lapointe, Alice, Titre de transport, Montréal, Héliotrope, série «K», 2014, 206 p.

Soucy, Erika, les Murailles, Montréal, VLB éditeur, 2016, 150 p.

Tremblay, Michel, Albertine, en cinq temps, Montréal et Arles, Leméac et Actes Sud, coll. «Papiers», 2007, 61 p. Édition originale : 1984.

Winckler, Martin, les Invisibles, Paris, Fleuve noir, 2011, 277 p.

Gilles Tremblay (1938-2014)

Arsène et Girerd, On a volé la coupe Stanley, 1975, p. 39

Gilles Tremblay est mort ce matin. Après avoir été ailier gauche pour les Canadiens de Montréal — c’est du hockey — de 1960 à 1969, il a été commentateur des matchs de l’équipe à la télévision de Radio-Canada de 1971 à 1999. Il a donc été un des premiers joueurnalistes de l’histoire de ce sport.

Contrairement à son coéquipier Jean Béliveau, il n’apparaît que dans peu d’œuvres artistiques. Il fait une courte apparition dans la pièce de théâtre la Coupe Stainless de Jean Barbeau (1974) et dans la bande dessinée d’Arsène et Girerd On a volé la coupe Stanley (1975, p. 39; voir ci-dessus), et son nom est mentionné à plusieurs reprises dans Des histoires d’hiver avec encore plus de rues, d’écoles et de hockey de Marc Robitaille (2013).

À la télévision, il a notamment travaillé avec Richard Garneau et René Lecavalier. Il a manifestement servi de modèle au personnage de Granger dans un roman du premier, Train de nuit pour la gloire ou 45 jours à la conquête de la coupe Stanley (1995). François Hébert l’a uni indissociablement au second, lui qui écoutait «religieusement les commentaires de ces fins exégètes que sont René Lecavalier et Gilles Tremblay, qui me font un peu penser, toutes proportions gardées, à Don Quichotte et Sancho Pança» (1996, p. 212).

Gilles Tremblay a cependant eu droit à sa biographie, signée par Guy Robillard (2008).

P.-S. — On signalera aussi, pour mémoire, les attaques de Michel-Wilbrod Bujold contre les Tremblay — Gilles, Mario, Réjean — à la fin de ses Hockeyeurs assassinés (1997, p. 131-135).

 

[Complément du 30 novembre 2014]

La culture télévisuelle de l’Oreille tendue laisse parfois à désirer. Un lecteur qui en a une meilleure lui fournit l’information suivante :

Le personnage de Gilles Tremblay apparaissait dans les sketchs de Rock et belles oreilles aux côtés de René Lecavalier, joué brillamment par André Ducharme. «Gilles» ne disait jamais un mot… Au début, le «rôle» était tenu par Sylvain Ménard, le directeur technique de RBO; ensuite on l’a remplacé par un mannequin, muet lui aussi.

Merci.

 

[Complément du 10 mai 2018]

Sur son blogue, le Machin à écrire, Nicolas Guay a une très belle série de souvenirs, sous le titre «Passé simple». Voici le 35e texte, «Papa» :

Papa qui porte des favoris. Papa qui me précède dans les pistes de ski de fond du parc des Salines. Papa qui dit : « T’es bin sarfe » pour me taquiner. Papa parti travailler. Papa qui m’envoie en pénitence dans ma chambre. Le son matinal du rasoir électrique de papa alors que je suis encore couché. Papa qui me coupe les cheveux. Papa qui simonize la voiture. Papa qui commente à voix haute les nouvelles à la télé. Papa, ailleurs dans la maison pendant que je fais des dessins dans ma chambre. Papa qui taille les haies avec de grands ciseaux. Papa qui se moque des mimiques et du parler de Gilles Tremblay à la Soirée du hockey.

 

Références

Arsène et Girerd, les Enquêtes de Berri et Demontigny. On a volé la coupe Stanley, Montréal, Éditions Mirabel, 1975, 48 p. Bande dessinée. Premier et unique épisode des «Enquêtes de Berri et Demontigny». Texte : Arsène. Dessin : Girerd.

Barbeau, Jean, la Coupe Stainless, dans la Coupe Stainless. Solange, Montréal, Leméac, coll. «Répertoire québécois», 47-48, 1974, p. 7-89.

Bujold, Michel-Wilbrod, les Hockeyeurs assassinés. Essai sur l’histoire du hockey 1870-2002, Montréal, Guérin, 1997, vi/150 p. Ill.

Garneau, Richard, Train de nuit pour la gloire ou 45 jours à la conquête de la coupe Stanley. Roman, Montréal, Stanké, 1995, 239 p.

Hébert, François, «La Bible de Thurso», Liberté, 152 (26, 2), avril 1984, p. 14-23. Repris dans Jean-Pierre Augustin et Claude Sorbets (édit.), la Culture du sport au Québec, Talence, Éditions de la Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine et Centre d’études canadiennes, coll. «Publications de la MSHA», 220, 1996, p. 207-213. https://id.erudit.org/iderudit/30741ac

Robillard, Guy, Gilles Tremblay. 40 ans avec le Canadien, Montréal, Éditions Au carré, 2008, 239 p. Ill. Préfaces de Jean Béliveau et Réjean Tremblay.

Robitaille, Marc, Des histoires d’hiver avec encore plus de rues, d’écoles et de hockey. Roman, Montréal, VLB éditeur, 2013, 180 p. Ill.

Le cothurne et le gouret

Pas plus tard que mardi, le chroniqueur théâtral du Devoir, Alexandre Cadieux, parlait théâtre et hockey.

Son point de départ ? Le rappel qu’avant la parution de l’excellent Numéro six d’Hervé Bouchard il y eut un spectacle théâtral, Hivers : passages du numéro six dans les mineures (Théâtre CRI, Jonquière, novembre 2013, mise en scène de Guylaine Rivard).

Cadieux profite de l’occasion pour évoquer d’autres spectacles ou textes de théâtre fondés sur le sport national canadien : Fridolinons 45 — on peut en lire un extrait ici —, la Ligue nationale d’improvisation, le Chemin du roy, Moi, dans les ruines rouges du siècle.

À son tour, l’Oreille tendue, incorrigible bibliographe, en profite pour mettre en ligne une courte bibliographie, évidemment perfectible, sur le sujet. Bref : suggestions bienvenues.

 

[Complément du 24 avril 2015]

Peut-on lire un match de hockey comme une pièce de théâtre ? Peut-on le rapporter à la dramaturgie québécoise récente ? Oui, deux fois oui. La preuve en a été faite à l’émission de radio La soirée est (encore) jeune de Radio-Canada le 18 avril 2015. On écoute ici.

 

Bibliographie. Version du 24 juin 2025

Textes de théâtre

Archambault, François, Quelque chose comme une grande famille, pièce inédite, 2018.

Barbeau, Jean, la Coupe Stainless, dans la Coupe Stainless. Solange, Montréal, Leméac, coll. «Répertoire québécois», 47-48, 1974, p. 7-89.

Bélanger, Yves, Game, Montréal, Dramaturges éditeurs, 1997, 94 p.

Brown, Kenneth, Life After Hockey, Toronto, Playwrights Union of Canada, 1985, 36 p. Texte polycopié.

Brown, Kenneth, «Alma’s Night Out», dans David Gowdey (édit.), Riding on the Roar of the Crowd. A Hockey Anthology, Toronto, Macmillan, 1989, p. 303-318.

Bumps, Bruises and Bedtime Stories, spectacle inédit, 2011.

Corbeil, Guillaume, les Boys, adaptation du film du même nom (1997), pièce non publiée, 2025.

Corbeil-Coleman, Charlotte, Sudden Death, pièce inédite, 2013.

Durham, James, The Big League, Winnipeg, Scirocco Drama, 2005, 63 p.

Gélinas, Gratien, les Fridolinades, Montréal, Typo, 2014, 405 p. Ill. Anthologie préparée par Anne-Marie Sicotte. Réédition : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides, 2018, 432 p. Extrait .

Germain, Jean-Claude, Un pays dont la devise est je m’oublie. Théâtre, Montréal, VLB éditeur, 1976, 138 p.

Girard, Matthieu, les Beignes, pièce inédite, 2014.

Highway, Tomson, Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing, Saskatoon, Fifth House, 1989, 134 p. Traduction française : Dry Lips devrait déménager à Kapuskasing, Sudbury, Prise de parole, 2009, 197 p. Traduction de Jean-Marc Dalpé.

Kemeid, Olivier, Moi, dans les ruines rouges du siècle. Théâtre, Montréal, Leméac, coll. «Théâtre», 2013, 109 p. Idée originale : Sasha Samar et Olivier Kemeid.

Legault, Jean-Guy, Hockeytown, pièce inédite, 2011.

Léger, Catherine, Filles en liberté. Théâtre, Montréal, Leméac, coll. «Théâtre», 2017, 108 p.

Lepage, Robert, Courville, pièce inédite, 2021.

Loranger, Françoise et Claude Levac, le Chemin du roy. Comédie patriotique, Montréal, Leméac, coll. «Théâtre canadien», 13, 1969, 135 p. Ill.

MacLean, Mary Ellen, Frankie, pièce inédite, 2013.

McLellan Day, Kirstie, Playing with Fire. The Theo Fleury Story, pièce inédite, 2012. Compte rendu ici.

Melski, Michael, Hockey Mom, Hockey Dad : A Play in Two Acts, Wreck Cove, Cape Breton, Breton Books, 2001, 85 p.

Nilan, Chris, Knuckles — The Chris Nilan Story, spectacle inédit, 2025.

Olivier, Anne-Marie, Annette. Une fin du monde en une nanoseconde, Montréal, Dramaturges éditeurs, 2012, 53 p.

Salutin, Rick, avec la collaboration de Ken Dryden, les Canadiens, Vancouver, Talonbooks, 1977, 186 p. Ill. «Preface» de Ken Dryden. L’introduction de Rick Salutin a été reprise dans David Gowdey (édit.), Riding on the Roar of the Crowd. A Hockey Anthology, Toronto, Macmillan, 1989, p. 292-302.

Simard, André, la Soirée du fockey, dans la Soirée du fockey. Le temps d’une pêche. Le vieil homme et la mort, Montréal, Leméac, coll. «Répertoire québécois», 40, 1974, p. 9-60. Préface de Normand Chouinard.

Snow Angel, pièce inédite 2014.

Szilagyi, George, Hockey Stories for Boys, pièce inédite, 2005

Textes critiques

Andrews, Frazer, «Two Hundred Years for Fighting : “A History of Resistance” in Two Bilingual Hockey Plays», dans Jason Blake et Andrew C. Holman (édit.), The Same but Different. Hockey in Quebec, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2017, p. 169-184. (Sur Rick Salutin, et Françoise Loranger et Claude Levac)

Billingham, Susan, «The Configurations of Gender in Tomson Highway’s Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing», Modern Drama, 46, 3, automne 2003, p. 358-380. https://doi.org/10.1353/mdr.2003.0031

Bodek, Cheryl, «The Dual Identity of Maurice Richard : The Creation of a Myth in Prose, Theater and Television», Bowling Green, Bowling Green State University, mémoire de maîtrise, 2000, v/83 p. (Sur Jean-Claude Germain)

Cadieux, Alexandre, «Théâtre. Citoyen en patins», le Devoir, 28 octobre 2014, p. B7.

Côté, Daniel, «Une pièce de théâtre devenue livre», le Quotidien, 24 octobre 2014. (Sur Hervé Bouchard)

Fitzsimmons Frey, Heather, «Deking Out Reality : The Challenges of Staging Hockey», Canadian Theatre Review, 169, hiver 2017, p. 52-58. https://doi.org/10.3138/ctr.169.010

Godin, Jean Cléo, «La ligue nationale d’improvisation : du “bon sport” au théâtre», Possibles, 5, 3-4, 1981, p. 235-245.

Godin, Jean Cléo, «Les enjeux du théâtre, du hockey, de la politique», Quaderni di Francofonia, 1, 1982, p. 37-47.

Godin, Jean Cléo et Laurent Mailhot, «De l’actualité de l’histoire (ou l’inverse)», dans Théâtre québécois II. Nouveaux auteurs, autres spectacles, Montréal, Hurtubise HMH, 1980, p. 31-43. (Sur Jean-Claude Germain)

Godin, Jean Cléo et Laurent Mailhot, «Sur le Chemin du Roy avec Hamlet, prince du Québec», dans Théâtre québécois II. Nouveaux auteurs, autres spectacles, Montréal, Hurtubise HMH, 1980, p. 57-75. (Sur Françoise Loranger et Claude Levac)

Herlan, James J., «The Montréal Canadiens : A Hockey Metaphor», Québec Studies, 1, 1, printemps 1983, p. 96-108. (Sur Rick Salutin) https://doi.org/10.3828/qs.1.1.96

Langston, Jessica, avec Mike Chaulk, «Revolution Night in Canada : Hockey and Theatre in Tomson Highway’s Dry Lips Oughta Move to Kapuskasing», TRIC / RTAC, 35, 2, 2014, p. 169-184. https://journals.lib.unb.ca/index.php/tric/article/view/21957/25458

Laroche, Maximilien, «Sport-spectacle», l’Action nationale, 60, 3, novembre 1970, p. 257-261.

Lavoie, Carlo, «Maurice Richard : du joueur à la figure», Recherches sémiotiques / Semiotic Inquiry, 22, 1-2-3, 2002, p. 211-227. (Sur Jean-Claude Germain)

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard. (Sur Jean-Claude Germain et Rick Salutin)

Miller, Mary Jane, «Two Versions of Rick Salutin’s Les Canadiens», Theatre History in Canada / Histoire du théâtre au Canada, 1, 1, printemps 1980, p. 57-69. http://journals.hil.unb.ca/index.php/TRIC/article/view/7542/8601

Rompré, Paul, Gaétan Saint-Pierre, collaboration de Marcel Chouinard, «Essai de sémiologie du hockey. À propos de l’idéologie sportive», Stratégie, 2, printemps-été 1972, p. 19-54.

Weiss, Jonathan M., «Toward a New Mythology», dans French-Canadian Theater, Boston, Twayne Publishers, coll. «Twayne’s World Author Series», 774, 1986, p. 94-128. (Sur Jean-Claude Germain)

Les Yeux de Maurice Richard, édition de 2012, couverture

Le kliss de morceau de bravoure du jour

Jean-François Chassay, les Taches solaires, 2006, couverture

Quiconque, comme l’Oreille tendue, aime sacrer ne pourra qu’apprécier ce passage du roman les Taches solaires (2006) de Jean-François Chassay :

Mon canal ! Mon canal ! Mon c-a-n-a-l, à créyé de kessé que j’avâs toutte prévu, kliss de porkioupïne, orignal de mon caleçon de bâsteurde ! Les écluses entre Saint-Louis pis Saint-François, 30 mètres sur 6, caltâsse de simonac ! Eul’ corridor dans sa largeur, pis eul’ canal dans toutte sa sôdite longueur de vinyenne ! Les sas pis les biefs, pis yousse qu’on met la porte en amont, pis touttes les sôdits calculs hydrauliques de base, géribouaîre ! Les débits, les pentes, la vélocité, asprit, j’ai même pensé au saint-libouére de bassin Wellington de mon darrière, pis y aura même pâs de bateaux là avant 60 clisses d’années, verrat de chien puant ‘à marde ! Touttes les shôgun de bassins, han ?! Han ?! Ben sontaient toutes là dans ma tête pis drette là su’ mes métempsychoses de plan ! J’ai même vu les bâsteurdes de ponts ferroviaires de kessé que j’sais pas de kessé que ça veut dire que j’lé cré même pas quand y’s ploguent dans ma tête, non mais ça tzu d’la maudite allure, ça là, non mais ça prend-tzu des crétaques d’hostos de tabaslak de voleurs d’enfants de nananes pourris ! Aye, Marie, t’aimes ça les orignals, han, t’aimes ça les orignals, géribouaîre ? Ben m’a t’en trouver un caltâsse, m’a l’amener en plein cœur de Montréal, pis les bâsteurdes de sépulcres blanchis d’enfant d’chienne, m’a les enculer avec ‘eul panache ! (p. 243-244)

À lire à haute voix.

 

[Complément du 3 janvier 2022]

En matière de chapelets de sacres, quelques accessits, en ordre chronologique.

«par ces maudits tabarnaques
de cinciboires de cincrèmes
de jériboires d’hosties toastées
de sacraments d’étoles
de crucifix de calvaires
de trous-de-cul
j’ai mal à mon pays
jusqu’à la fin des temps» (Gérald Godin, Libertés surveillées).

On peut entendre Gérald Godin lire une version légèrement différente de ce texte ici.

«Mastaï hurlait des “tabarnane de cibolaque de câline de binne d’hoston de calvinusse de chrysantème”, qui faisaient pâlir les sœurs et rougir les religieux» (Michel Tremblay, La grosse femme d’à côté est enceinte, p. 162).

«Criss de tabarnak d’hostie de calice de ciboire d’étole de viarge, oussé kié le sacramant de calice de morceau de casse-tête du tabarnak !» (François Blais, Vie d’Anne-Sophie Bonenfant, p. 124)

«Y aiment crissement ça, tabarnak. Si j’fais pas ça, stie d’tabarnak, quessé m’as faire, crisse ? C’est mon ostie d’job d’être la tabarnaque de chef-cook, câlisse. On sert à d’quoi, icitte, crisse de tabarnak. On pourrait pas m’laisser tranquille une crisse de fois d’estie d’tabarnak ? Ça s’pourrait tu ça, câlisse de crisse ?» (Simon Boudreault, Sauce brune, p. 81)

«Et et et si on s’éteignait demain. Je veux dire, en tant que que que race humaine. Ou ou ou ou je veux dire, en tant que généalogie pensante. Ou je veux dire, faux prophètes, ou je veux dire menteurs de tabarnak du crisse d’estie de viarge de crisse de fuck qu’on est menteurs, ou je veux dire, plantes basiques dont l’oxygène est l’hypocrisie calme et généreuse. Je je je me regarde et je je je comprends ce que tu veux dire» (Emmanuel Schwartz, p. 36).

«Ben voyons donc… mais ça a pas d’ostie d’câlice de trou d’cul d’marde de saint-ciboire de tabarnac de bon sens ! (Chienne(s), p. 110)

 

Références

Blais, François, Vie d’Anne-Sophie Bonenfant. Roman, Québec, L’instant même, 2009, 241 p.

Boudreault, Simon, Sauce brune, Montréal, Dramaturges éditeurs, 2010, 137 p.

Chassay, Jean-François, les Taches solaires. Roman, Montréal, Boréal, 2006, 366 p. Ill.

Godin, Gérald, Libertés surveillées, Montréal, Éditions Parti pris, coll. «Paroles», 38, 1975, 50 p.

Milot, Marie-Ève et Marie-Claude St-Laurent, Chienne(s), Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 25, 2020, 155 p. Ill. Suivi de «Contrepoint. Cachez ce cerveau que je ne saurais voir» par Catherine Lord.

Schwartz, Emmanuel, dans Et si on s’éteignait demain ? Collectif dirigé par Marie-Élaine Guay, Montréal, Del Busso éditeur, 2019, p. 32-41.

Tremblay, Michel, La grosse femme d’à côté est enceinte, Montréal, Leméac, 1978, 329 p.