Curiosités voltairiennes (et éveillées)

Georges Simenon, Maigret et l’inspecteur Malgracieux, 1947, couverture

«On vous a sans doute dit que les vieillards ont besoin de fort peu de sommeil… Il y a aussi des gens qui, pendant toute leur vie, dorment très peu… Cela a été le cas d’Érasme, par exemple, et aussi d’un monsieur connu sous le nom de Voltaire» (p. 47).

Simenon, qui écrit ce qui précède dans sa nouvelle «Le témoignage de l’enfant de chœur», n’est pas le seul à s’intéresser au sommeil des créateurs.

Tableau des heures de veille et de sommeil de plusieurs créateurs, dont Voltaire

Voltaire est toujours bien vivant.

 

Référence

Simenon, «Le témoignage de l’enfant de chœur», dans Maigret et l’inspecteur Malgracieux, dans Tout Simenon 2, Paris et Montréal, Presses de la Cité et Libre expression, coll. «Omnibus», 1988, p. 7-122, p. 37-64. Édition originale : 1947.

Curiosités voltairiennes (et tatouées)

Tatouage «écrasez l’infame» sur le bras d’un homme

Ce tatouage, repéré sur Bluesky, est une citation de Voltaire, dans sa propre calligraphie. En effet, celui-ci utilisait souvent, dans ses lettres, la formule «Écrasez l’Infâme» (à partir de 1760), parfois ramenée à «Écrlinf» (à partir de 1763). Cet «infâme» désigne notamment l’intolérance des dogmes religieux.

Voltaire est toujours bien vivant.

Curiosités voltairiennes (et trudeauesques)

Photo de Justin Trudeau, mars 2025

À la fin de son mandat comme premier ministre du pays, Justin Trudeau a prononcé un discours sur la guerre commerciale lancée par les États-Unis contre le Canada. Extrait :

C’est le moment de redoubler d’efforts, de se tenir debout pour notre pays, de faire tout ce qu’on peut pour choisir le Canada, pour défendre le Canada. On va passer ensemble à travers les moments difficiles. Mais après vous avoir vus aller dans les dernières semaines, j’ai jamais été aussi optimiste quant au futur de notre beau pays, malgré tous les défis qu’on va être en train de vivre ensemble. Le Canada reste le meilleur pays sur Terre. On a tellement de raisons d’être fiers de notre chez nous, de ces quelques arpents de neige. Mais, surtout, je suis fier de notre capacité de nous serrer les coudes quand vient le temps. Les Canadiens ont de différentes origines, de différentes langues, différentes croyances, mais quand vient le temps de défendre notre pays, on le fait d’une seule voix, main dans la main. — À travers vents et marées, les Canadiens peuvent toujours compter les uns sur les autres.

Voltaire est toujours bien vivant.

P.-S.—Au début du vingt-troisième chapitre de Candide (1759), le conte de Voltaire, «Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre; ce qu’ils y voient», Candide discute avec Martin sur le pont d’un navire hollandais : «Vous connaissez l’Angleterre; y est-on aussi fou qu’en France ? — C’est une autre espèce de folie, dit Martin. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut.»

Curiosités voltairiennes (et trumpiennes)

Catherine Mavrikakis, «Candide au pays des merveilles», la Presse+, 29 mars 2025, titre

(Pendant plusieurs années, l’Oreille tendue a alimenté des blogues sur Tumblr, dont un sur les traces de la présence de Voltaire dans la culture contemporaine. Pour des raisons qu’elle ignore, l’Oreille est désormais persona non grata sur cette plateforme : tous ses blogues ont disparu. À l’avenir, Curiosités voltairiennes, ce sera ici.)

Dans la Presse+ du 29 mars, trois écrivains se penchent sur la situation des États-Unis sous Trump bis. Parmi eux, Catherine Mavrikakis.

Son texte, «Candide au pays des merveilles», est le discours fictif, dans un avenir pas trop éloigné, d’une femme politique, Candide Barney. Ses derniers mots sont les suivants : «Comme le répétait un autre écrivain français d’il y a très longtemps, Voltaire : “Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.” Cela n’a jamais été aussi vrai…»

Voltaire est toujours bien vivant.

P.-S.—Au cinquième chapitre de Candide (1759), le conte de Voltaire, on lit : «Je demande très humblement pardon à Votre Excellence, répondit Pangloss encore plus poliment, car la chute de l’homme et la malédiction entraient nécessairement dans le meilleur des mondes possibles.»

Chantons la langue avec Ivy

Ivy, Hors des sentiers battus, 2012, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Ivy, «My name was», Hors des sentiers battus, 2012

 

J’ai des mots en bouche qui brûlent
D’enflammer les phonèmes
De cette langue que j’aime tant
Mais qui tangue aussi dangereusement
Que la tour de Pise
Quand elle épouse le mauvais angle
Elle préfère l’engrais
Qui l’infecte en la faisant enfler
Au lieu de cultiver ses minces mais profondes racines
Quand j’entends ma langue aujourd’hui
J’hallucine un max
La plante est rendue carnivore
Car elle dévore sa propre syntaxe
Chaque fois qu’a prend une marche
Qu’a marche sur la rue
Qu’elle se rue dans une autobus
Qu’est-ce qu’je pourrais dire de plus ?
Que c’pas correc’ ?
Eh tu m’prends pour qui ?
J’sais ben qu’c’est comme ça qu’on parle au Québec
(That’s how we talk in Québec
Yo Ivy)
Alors j’l’a laisse aller
J’l’écoute parler
J’la sens craquer
Et puis ch’peux pas m’empêcher d’paniquer
Ensuite j’m’irrite
Contre la pratique séculaire
Qui préfère
Coller à ses tiques
Plutôt qu’en son palais
Celle qui fut langue de roi
Est-elle encore celle des valets ?
(Le roé c’est moé)
Celle qui fut langue de roi
Est-elle encore celle des valets ?
C’est don d’valeur
Moi ça m’écœure
Quand a s’donne l’air
De faire des affaires
Alors qu’elle s’asservit
Au lieu d’lutter pour sa survie
(Yo money talks)
Si la langue était vraiment vivante
On la laisserait pas vivre dans cet état
Faque débranchons-la
Ou branchons-nous
Avant qu’le français disparaisse
Faudrait qu’on l’ait parlé entre nous
C’est c’que m’dit l’aïeul
Quand y se r’vire de bord
Dans son cercueil
(L’aïeul quand y s’fait aller la yeule
Quand y s’fait aller la yeule dans son cercueil)
Pis dans son cercueil
Y se r’vire de bord
Parce qu’il y a des tarlas qui posent du clabor
Su’a grammaire
Y a même des jeunes qui disent à leur père
«P’pa, le français, c’est comme l’égalité des sexes
Le combat a été faite, faique : next !»
(Le roé c’est moé)
Faudrait qu’la génératrice reprenne
Qu’la jeune génération comprenne
Qu’y a pas de courant sans l’gars d’Hydro
Pas de lumières sans Volt…aire
Pas d’esprit sans vocabulaire
La langue faut pas juste que ça serve
Faut qu’ça jaillisse en gerbes de verve
Comme autant d’étincelles
À propager
À grandeur du pays
Comme un incendie
Comme quand j’étais p’tit
Et que j’aimais ça
Mettre le foutre le crisser le feu
J’trouvais ça hot hot
J’me serais même fait patriote
Faiseur de marde
Et si j’m’attarde
À t’expliquer
C’est qu’j’ai la langue trop… «sticky»
Dans sa gangue enfirouapée
(Wrapped in fur
And all that crap)
Que j’lâche aux bécosses
(Out house)
Dans un vent de panique
Ô Français
Pendant combien d’temps
Me parleras-tu de l’Amérique ?
(C’est normal qu’y ait de l’anglais dans notre langue
C’est normal
Y en a partout autour
Well we do it too
We say open the lights
Ouvre la lumière
Going to the dep
On s’en va au dépanneur
Nine on ten
Neuf sur dix
C’est ta note
Ivy the Terrible
Ivan le Terrible
J’ai des mots en bouche
So Ivy your name it’s English
It’s kind of weird
Ouais mais c’t’un Anglais qui me l’a donné
Depuis je l’ai adopté
J’trouve ça mieux que French Frog
Pea Soup
Ou Pepsi
So you think you’re gonna cross over into the English market ?
I hope so I hope so can I call you a log [?]
What the fuck does that mean ?
Paul sois poli
T’es sur mon disque
Excuse me
Pardon my French)