Curiosités voltairiennes (et hockeyistiques)

Publicité de la bière Molson représentant Voltaire, 1954

Ceci, dans le quotidien montréalais le Devoir :

En l’espace d’une semaine, la Victoire de Montréal, après avoir dominé la saison régulière de la LPHF, se faisait de nouveau sortir en demi-finale de la coupe Walter — à ne pas confondre avec la coupe Longueuil — tandis que la troupe composite qui représentait les arpents de neige de Charles III au Mondial de hockey masculin se faisait montrer la porte en quart de finale par le minuscule Danemark.

Au début du vingt-troisième chapitre de Candide, «Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre; ce qu’ils y voient», Candide discute avec Martin sur le pont d’un navire hollandais : «Vous connaissez l’Angleterre; y est-on aussi fou qu’en France ? — C’est une autre espèce de folie, dit Martin. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut.»

Voltaire est toujours bien vivant.

Sagesse de puck

Jack Falla, Saved, 2007, couverture

Lire Saved (2007), de Jack Falla, pour ses qualités romanesques serait une erreur : c’est surcousu de fil blanc.

En revanche, il y a nombre de phrases parfaitement justes sur le monde du hockey, dans la bouche d’un narrateur gardien de but. Ci-dessous, un florilège (incomplet).

«Every shot is a snowflake. No two are alike» (p. 62).

«The first rule of life, love, and hockey is the same rule — you’ve got to play hurt» (p. 27).

«Goalies don’t see goals. We hear them» (p. 75).

«We’re [les gardiens] united in a brotherhood of apartness and fear» (p. 86).

«The family metaphor in pro sports is ridiculous. Family members don’t get cut, traded, waived, benched, or sent to the minors» (p. 93).

«The shelf life on loyalty to a goaltender is about twenty minutes or three goals, whichever comes first» (p. 129).

«In most businesses people get better as they age. But not in pro sports» (p. 171).

«In this game friendship lasts, allegiance doesn’t» (p. 206).

«A goalie coach is a head coach» (p. 243).

 

Référence

Falla, Jack, Saved. A Novel, New York, Thomas Dunne Books, St. Martin’s Press, 2007, ix/276 p.

Chantons le hockey avec Loco Locass

Loco Locass, «Le but», 2009, pochette

(Le hockey est partout dans la culture québécoise et canadienne. Les chansons sur ce sport ne manquent pas, plusieurs faisant usage de la langue de puck. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Loco Locass, «Le but», 2009

 

[Bruits de patin, de rondelle et de bâton sur la glace et sur la bande. Musique d’orgue]

Icitte au Québec y fait pas froid y fait frette
C’est d’même parce que c’est d’même
Pis c’est ben correct on d’la place en masse
Pis nos face-à-face on les fait sur la glace
Alors on lace nos patins pis nos casques
C’est comme Maurice on glisse
Dans l’arène avec la haine
De la défaite et le feu dans les yeux
En fait quand on veut on peut
Gagner
Gagner
Gagner
Gagner
En des temps si lointains qu’les francos s’app’laient Canadiens
À une époque où les pucks étaient faites de crottin
On a réuni des hommes dont le destin commun
Est comme un film sans fin
En technicolor et tricolore
Bleu comme le Saint-Laurent
Blanc comme l’hiver
Rouge comme le sang qui nous coule à travers
Le corps de l’équipe c’est le cœur de la nation
À chaque année faut clore avec une célébration
Y l’diront jamais tel quel aux nouvelles
Mais le tissu social de Montréal
C’est de la sainte flanelle
Quand y est question de hockey
Nous on fait pas dans la dentelle
Ok c’est plus qu’un sport
C’t’une métaphore de not’sort
C’est ça qui nous ressemble
C’est ça qui nous rassemble
Anglo franco peu importe ta couleur de peau
Si tu détestes Toronto le sang qui bouge dans tes artères
Est aussi rouge mon frère que les chandails de nos vingt cœurs
De vainqueurs qui luttent avec honneur
Les Canadiens pour une fois rallient tous les Québécois
Vingt cœurs de vainqueurs pour le pire et le meilleur
Les Canadiens d’Montréal
Notre équipe nationale

Un plan de match qu’on respecte à la lettre
Un gardien alerte
Des bonnes mises en échec
Des passes drette sur la palette
Pis des lancers précis et secs
C’est comme ça
Qu’on va gagner nos épaulettes
Mais quand ça va mal
Quand on cale ou on dévire
Qu’j’voye pas un sale quitter le pont du navire
C’pas à matin non qu’on accroche nos patins
Un Flying Frenchman
Franchement ça franchit sans flancher
Allez-y les Habitants quand vous la mettez d’dans
Y a un p’tit peu de nous autres là-d’dans
On est debout avec vous on ira jusqu’au bout
Durant la saison c’est toute la nation
Qui vibre au même diapason
Comme quand les gens criaient «Guy Guy Guy»
C’tait en dépit du combat constant de la vie
Ça leur donnait des forces
Y pouvaient bomber l’torse
Voilà l’amorce d’un ralliement réussi
On peut gagner
On veut plus que participer nous on veut gagner
À soir on fonce sur la patinoire pour gagner
Si on s’défonce pour la victoire on va gagner
On va gagner

[Bruits de foule]

Enfin on fait les séries
Finies les folies
Là c’est baston et rififi
Boston Philadelphie
Avec les fantômes du Forum
On n’a pas peur de personne
Chaque homme donne le maximum
Pour que cette année soit la bonne
Au printemps la fièvre est universelle
Pis y a juste une place où la glace y faut pas qu’à dégèle
Ici le sang c’est de la sève qui monte jusqu’à nos lèvres
Le cri se change en un chant de ralliement qui s’élève
Nos chevaliers sont en cavale pour ramener le Graal
À Montréal le tournoi est un chemin de croix
Parsemé d’émois mais la coupe on y croit
Comme autrefois on a la foi
Pis si c’est pas c’t’année
Ben comme dirait René «À la prochaine fois»
Québécois
On va gagner on veut plus que participer
Nous on veut gagner
À soir on fonce sur la patinoire
Pour gagner
Si on s’défonce pour la victoire on va gagner
On va gagner
Allez allez allez allez Montréal
Allez allez Montréal
Du sang neuf depuis 1909
Avec Jack Laviolette
Lach, Pitre et Pit Lépine
En passant par Newsy Lalonde et Joe Malone
Aurèle et Morenz, Hainsworth, Plante, Gump et le Concombre
Pocket Boum Rocket Boum, Cournoyer, Coco, Carbo, Casseau, Naslund
Oublie pas les anglos yo
Toe, Dickie, Doug et Scotty
Shutt, Larry, Ken et Bobby
L’arrêt de Roy, rebond
Butch Bouchard à Savard vers Béliveau
Qui esquive un joueur
Passe à Lafleur, Lafleur accélère, remet au Rocket Richard
Deux hommes sur le dos rien de trop gros

[Commentateur]
C’est le but !

On a gagné
On a gagné
Allez Montréal
On veut gagner
On peut gagner
On va gagner
Ho Habs go
Allez allez allez allez Montréal
Allez allez allez allez Montréal
Allez allez allez allez Montréal
On veut gagner
On peut gagner
On va gagner
Allez allez allez allez Montréal
Allez allez allez allez Montréal
Allez allez allez allez Montréal
Gagner
Gagner
Gagner

 

P.-S.—Pour Brendan Kelly, cette chanson est «un merveilleux hymne engagé» (p. 65). Il lui consacre un chapitre de son livre Le CH et son peuple, «Le CH et Le but» (2024, p. 149-155).

 

 

Références

Kelly, Brendan, le CH et son peuple. Une province, une équipe, une histoire commune, Montréal, Éditions de l’Homme, 2024, 211 p. Ill. Préface de Claude Legault.

Melançon, Benoît, «Chanter les Canadiens de Montréal», dans Jean-François Diana (édit.), Spectacles sportifs, dispositifs d’écriture, Nancy, Questions de communication, série «Actes», 19, 2013, p. 81-92. https://doi.org/1866/28751

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey. Édition revue et augmentée, Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 159 p. Préface d’Olivier Niquet. Illustrations de Julien Del Busso. ISBN : 978-2-925079-71-2.

Melançon, Benoît, Langue de puck, édition revue et augmentée de 2024, couverture

Accouplements 265

Tweet de France Culture, 17 juillet 2019

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

D’un département d’histoire, de Montréal, sur Bluesky :

«Oui le sexe c’est bien. Mais es-tu déjà tombé-e sur une source soutenant très précisément ta démonstration ?»

D’un historien, de Toronto, sur Mastodon :

«Sure, sex is great, but have you ever tried editing a really great piece of someone else’s writing ?»

Dites, les historiens, tout va bien ?

Chantons le hockey avec Marc Déry

Marc Déry, Numéro 4, album, 2011, pochette

(Le hockey est partout dans la culture québécoise et canadienne. Les chansons sur ce sport ne manquent pas, plusieurs faisant usage de la langue de puck. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Marc Déry, «Numéro 4», album Numéro 4, 2011

 

On n’était peut-être pas les meilleurs
On n’était peut-être pas les plus gros
Mais dans la chambre y avait du cœur
Comme dans un repaire de superhéros
On n’avait pas de grande vedette
On n’était pas des surdoués
Mais une affaire est claire et nette
Avec toé la coupe on l’a gagnée
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie d’jouer au hockey avec toé
Ho ho ho ho ho ho
Papapa papapa
Ho ho hockey

C’est assez clair dans ma mémoire
Ton vieux hockey Victoriaville
Juste moé pis toé su’a patinoire
J’essayais d’imiter ton style
Et puis les soirs après l’souper
Quand on descendait dans l’sous-sol
Tu m’enseignais tous les secrets
Du slap shot de Bobby Hull
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie d’jouer au hockey avec toé
Ho ho ho ho ho ho
Papapa papapa
Ho ho hockey

Tu portais le numéro 4
En l’honneur de Jean Béliveau
Comme sur la photo sur la carte
Avec la coupe soul’vée bien haut
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie de jouer au hockey avec toé
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie de jouer au hockey avec toé
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie de jouer au hockey avec toé
Ton chandail numéro 4
Celui qu’tu portais quand j’étais p’tit
C’est moé qui l’a su’l dos à soir
Pis j’m’ennuie de jouer au hockey
Ho ho hockey

 

 

Références

Melançon, Benoît, «Chanter les Canadiens de Montréal», dans Jean-François Diana (édit.), Spectacles sportifs, dispositifs d’écriture, Nancy, Questions de communication, série «Actes», 19, 2013, p. 81-92. https://doi.org/1866/28751

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey. Édition revue et augmentée, Montréal, Del Busso éditeur, 2024, 159 p. Préface d’Olivier Niquet. Illustrations de Julien Del Busso. ISBN : 978-2-925079-71-2.

Melançon, Benoît, Langue de puck, édition revue et augmentée de 2024, couverture