Langue de campagne (6)

En campagne électorale, le choix de son vocabulaire par un candidat est souvent révélateur de sa personnalité et de ses valeurs.

Prenons François Legault, le chef de la Coalition avenir Québec, qui n’hésite pas à dire qu’il a une formation de comptable.

Que proposait-il lors des débats télévisés d’août 2012 ? Que les médecins de famille devaient faire «plus de volume» ou «du volume additionnel». Que des «gains d’efficacité» étaient attendus des employés de l’État. Qu’il fallait «appliquer [tel revenu] contre la dette». Qu’il allait, lui, «charger 5 %» à telle catégorie de producteurs. Qu’en matière de création d’emplois il aurait un «compteur» sur son bureau de premier ministre.

Michel David du Devoir le faisait remarquer, s’agissant de ce «compteur» : «Même ses plus féroces détracteurs n’ont jamais illustré de façon aussi éclatante que François Legault lui-même la vision essentiellement comptable qui l’anime» (23 août 2012, p. A1).

Comptable un jour, comptable toujours.

Langue de campagne (5)

On le sait : l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir précédé d’un complément d’objet direct pose souvent problème, notamment à l’oral. On le sait moins : il est des gens qui proposent de remplacer la règle actuelle par l’invariabilité.

Jean Charest, le chef du Parti libéral du Québec, paraît faire partie de ces gens. Il pratique volontiers, et sans s’en excuser, la réforme que prônent ces progressistes : au moins huit fois dans les débats télévisés du 19, du 20 et du 21 août , il n’a pas accordé ses participes.

Une fois n’est pas coutume : Jean Charest est le plus progressiste des chefs politiques québécois.

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La 4e Journée québécoise des dictionnaires se tiendra le 4 octobre 2012, à Montréal, sur le thème «Du papier au numérique : la mutation des dictionnaires».

L’Oreille tendue fait partie du Comité scientifique et organisateur, et elle vous invite à participer à cette journée.

On apprend tout ici.

Langue de campagne (4)

L’Oreille tendue se sent parfois audacieuse. C’est le cas aujourd’hui. Elle souhaite proposer une réponse à une question multiséculaire : quel est le sens de la politique ?

Si l’on se fie à la présente campagne électorale québécoise, c’est simple : la politique va du haut vers le bas.

Que font les partis avec leurs candidats vedettes ? Ils les parachutent dans une circonscription réputée sûre, même s’ils n’ont pas d’attaches dans celle-ci.

Que dire de quelqu’un qui fait le choix, parfois inattendu, de la politique ? On dit qu’il plonge en politique. Dans le même ordre d’idées, on peut faire le saut en politique. (S’il est vrai que le saut est parfois possible du bas vers le haut, le voisinage plongeon / saut inverse ici le sens du mouvement.)

Comment fait-on de la politique à Québec solidaire ? «Debout», si l’on en croit le slogan du parti. On ne s’assoira qu’après les élections.

De haut en bas : voilà une affaire (philosophicopolitique) de résolue.

Langue de campagne (3)

L’Oreille tendue n’a pas peur de se répéter : pour elle, le grégarisme québécois tient en un verbe, s’asseoir. Ce verbe est largement préféré à discuter, débattre, s’affronter. (Voir les entrées du 6 octobre 2010, du 25 février 2011, du 16 mars 2011, du 26 avril 2012, du 24 mai 2012 et du 29 mai 2012.)

Le slogan de Québec solidaire durant l’actuelle campagne électorale québécoise — «Debout» — paraît rompre avec cette belle unanimité.

Questions. Puisqu’on s’est beaucoup assis, le temps est-il donc enfin venu de se lever ? Doit-on au contraire être «debout» avant de «s’asseoir» ? S’agit-il d’être «debout» plutôt que de «s’asseoir» ?

Que d’interrogations, si peu de jours.