Belle, malgré

Tristan Saule, Et puis on aura vu la mer, 2024, couverture

«Olga est d’un blond surnaturel, presque blanc. Ses lèvres sont épaisses, gonflées par la chimie, peintes de vieux rose. Sa peau tirée et bronzée fait l’effet d’un cuir mal tendu, lâche par endroits. Malgré les agressions de la chirurgie, elle est belle, d’une beauté qu’on devine derrière les tentatives de la préserver.»

Tristan Saule [pseudonyme de Grégoire Courtois], Et puis on aura vu la mer. Roman. Chroniques de la place carrée. IV, Montréal, Le Quartanier, coll. «Parallèle», 05, 2024, 341 p., p. 10.

 

P.-S.—L’Oreille tendue apprécie fort le travail de cet auteur. Voir ceci, par exemple.

L’oreille tendue de… Tristan Saule

Tristan Saule, Et puis on aura vu la mer, 2024, couverture

«Aucun son. Depuis l’intérieur, on n’entend même plus le crépitement de l’incendie. Sabrina répète le prénom de Romane en traversant les pièces vides du rez-de-chaussée. Une cuisine vide. Un bureau vide. Une salle de bains vide. Elle s’interrompt par moment pour tendre l’oreille. Si Romane est bâillonnée, sa voix est peut-être étouffée. Dans le salon, où de l’air chaud s’engouffre par la porte-fenêtre brisée, Alexeï a le menton posé sur la poitrine, les mains et les pieds liés. “C’est juste un petit bobo”, pense Sabrina, avant de réaliser que cela n’a aucun sens. Aucun petit pansement ne sauvera plus le jeune homme.»

Tristan Saule [pseudonyme de Grégoire Courtois], Et puis on aura vu la mer. Roman. Chroniques de la place carrée. IV, Montréal, Le Quartanier, coll. «Parallèle», 05, 2024, 341 p., p. 321

P.-S.—L’Oreille tendue apprécie fort le travail de cet auteur. Voir ceci, par exemple.

C’était le bon vieux temps…

Tristan Saule, Et puis on aura vu la mer, 2024, couverture

«— Tu regardes l’annuaire ? demanda Sabrina.
— C’est quoi, ça, l’annuaire ?
Les pages jaunes, quoi.
— Je regarde Google. Elles sont pas jaunes, les pages» (p. 171).

«— On a l’air des Dalton, dit Sabrina.
— C’est quoi les Dalton ? demande Zineb.
— Laisse tomber» (p. 245).

«C’est un truc de vieux, les lettres, mais j’ai mes raisons» (p. 335).

Tristan Saule [pseudonyme de Grégoire Courtois], Et puis on aura vu la mer. Roman. Chroniques de la place carrée. IV, Montréal, Le Quartanier, coll. «Parallèle», 05, 2024, 341 p.

P.-S.—L’Oreille tendue apprécie fort le travail de cet auteur. Voir ceci, par exemple.

Accouplements 231

Couvertures de Denis Diderot et de David Turgeon, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Diderot, Denis, Jaques le fataliste et son maître, Paris et Genève, Droz, coll. «Textes littéraires français», 230, 1976, clxiii/501 p. Édition critique par Simone Lecointre et Jean Le Galliot.

«LE MAITRE. — Je rêve à une chose, c’est si ton bienfaiteur eût été cocu parcequ’il était écrit là-haut, ou si cela était écrit là-haut parceque tu ferais cocu ton bienfaiteur ?
JAQUES. — Tous les deux étaient écrits l’un à côté de l’autre. Tout a été écrit à la fois. C’est comme un grand rouleau qui se déploie petit à petit» (p. 10).

«LE MAITRE. — Et que fait notre consentement à une loi nécessaire ?
JAQUES. — Beaucoup. Croyez-vous qu’il soit inutile de savoir une bonne fois, nettement, clairement à quoi s’en tenir ? Toutes nos querelles ne sont venues jusqu’à présent que de ce que nous ne nous étions pas encore bien dit, vous, que vous vous appelleriez mon Maitre, et que c’est moi qui serais le vôtre. Mais voilà qui est entendu, et nous n’avons plus qu’à cheminer en conséquence.
LE MAITRE. — Mais où diable as-tu appris tout cela ?
JAQUES. — Dans le grand livre. Ah ! mon Maitre, on a beau réfléchir, méditer, étudier dans tous les livres du monde, on n’est jamais qu’un petit clerc quand on n’a pas lu dans le grand livre» (p. 230).

Turgeon, David, le Roman d’Isoline, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 186, 2024, 196 p.

«peut-être pense-t-on à ce grand livre métaphorique où, là-haut, apparemment, sont consignés les péchés et les fautes de chacun·e
peut-être trouve-t-on sa fierté à n’apparaître nulle part, ou alors si peu, dans ce grand livre» (p. 72)