Dictionnaire des séries 53

Dans le hockey moderne, qui veut marquer des buts envoie des masses de joueurs devant la cage du cerbère. Plus il y a de circulation, voire de circulation lourde, devant le filet, mieux ce serait. Il y aurait donc des avantages à obstruer la vue du gardien et à occuper l’enclave.

Un gardien qui a une faiblesse entre les jambes se retrouverait alors fort dépourvu. Il risquerait de mal paraître ou, pire, de se transformer en passoire.

En revanche, cette manœuvre ne vous rapporterait rien si le gardien est dans sa bulle, dans sa zone de confort ou en état de grâce. Il vous frustrerait.

Cela est particulièrement vrai quand le gardien joue gros, c’est-à-dire quand il s’applique à boucher la superficie de ses nets, qu’il coupe ses angles et qu’il évite le style papillon.

Autant, alors, fermer les livres.

 

[Complément du 20 mars 2023]

Hockey féminin oblige, on peut aussi «goaler plus grosse, aller en papillon moins vite», dixit Ève Gascon dans la Presse+ du jour.

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

Dictionnaire des séries 52

Le but du jeu est simple : compter plus de buts que l’adversaire.

On peut dire scorer, comme le Maurice Richard du dramaturge Jean-Claude Germain :

Moué, quand chsautte sus a patinoire, chpense pas à jouer ! Chpense à scorrer ! Chpense rien qu’à ça tout ltemps ! Scorrer ! N’importe où, n’importe comment… scorrer ! À gnoux, dboutte, dla ligne bleue, dla ligne rouge… scorrer, scorrer ! Avec les gants ! Avec la tête ! À plat ventte sus à glasse, avec mes patins, avec le boutte du hockey, scorrer ! scorrer ! Même s’y fallait que chtraîne toutte l’autre équippe accrochée après mon chandail, après mes culottes, après mes paddes… scorrer… scorrer… scorrer ! scorrer tout ltemps ! (Un pays dont la devise est je m’oublie, p. 132)

On n’oubliera cependant pas que le mot scorer peut aussi avoir une connotation sexuelle. On entend les deux sens dans une réplique du sketch «Le Bal des Facteurs» écrit par Gratien Gélinas pour Fridolinons 45.

Allô !… Elle-même… Tiens ! comment ça va, Tit-Georges ? Pas mal… Pis toi ?… Dépêche-toi, je suis pressée… Ah ! non, c’est ben de valeur puis t’es ben aimable, mais pas de hockey au Forum pour moi à soir ! Maurice Richard, my eye !… C’est moi qui «score» tantôt : je vas au Bal des Facteurs, si tu veux le savoir. Pis, aie ! je me suis mis sur mon trente-six : tu devrais me voir à soir, je te dis que tu m’aimerais !… Ça serait pas difficile ?… Farceur, va ! En tout cas, sans rancune, Tit-Georges… (p. 82)

Marc Denis, le joueurnaliste de RDS, ex-cerbère de son état, aime bien noircir la feuille de pointage.

Dans le poème «Pour le vrai» de Bernard Pozier, trois expressions désignent la réussite :

un autre petit enfant
libéré dans l’enclave
attend une passe imaginaire
pour secouer les cordages
marquer le but le plus important du monde
dans sa fiction prémonitoire
il pousse la rondelle dans le filet (p. 74)

Les comptables préfèrent capitaliser ou marquer au volume (ne pas être avare de ses tirs). Les couturiers, enfiler l’aiguille.

Vous tirez de l’arrière ? Il faut tout faire pour niveler le pointage ou la marque. Autrement dit : combler un déficit.

Les deux équipes sont à égalité ? Il faut dénouer l’impasse.

Dans un cas comme dans l’autre, vous aurez changé l’allure du match.

Entre amis, soyez simple. Dites potter.

P.-S. — Il n’est jamais recommandé de compter dans son propre but. En revanche, dans un filet désert ou dans un filet ouvert, c’est bon. (Le filet désert est nécessairement ouvert, mais la réciproque n’est pas toujours vraie.)

P.-P.-S. — L’orthographe de potter n’est pas fixée. Dans Motel Galactic. 3, Francis Desharnais et Pierre Bouchard appellent le clone de Michel Goulet «Le “putter” de Péribonka» (p. 12). Il est vrai que c’est un substantif, et non un verbe.

 

[Complément du 21 décembre 2016]

Vous êtes le premier à réussir à percer la muraille du gardien adverse ? Vous ouvrez la marque, vous brisez la glace ou vous lancez votre équipe en avant. Merci d’avoir trouvé le fond du filet.

Le dernier ? Vous fermez les livres.

Un parmi d’autres ? Vous serez crédité d’un but. Espérez qu’il soit sans riposte.

Celui qui égalise ? Vous remettez les compteurs à zéro et vous renvoyez les deux équipes à la case départ.

Celui qui s’illustre après que l’autre équipe a égalisé ? Vous redonnez une priorité à votre équipe et vous dénouez l’impasse. Les vôtres prennent les devants en vertu de votre but.

Celui qui ajoute à l’avance de votre équipe ? Vous l’aider à creuser l’écart, notamment si l’on vous doit le but d’assurance. Cela pourrait sceller l’issue du match. Dans tous les cas, cela vous permet de jouer avec un coussin. (L’avance, par ailleurs, peut se forger.)

Celui qui s’inscrit au tableau ou au pointage pendant que votre équipe tire de l’arrière ? Vous réduisez l’écart.

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

 

Références

Desharnais, Francis et Pierre Bouchard, Motel Galactic. 3. Comme dans le temps, Montréal, Éditions Pow Pow, 2013, 107 p. Bande dessinée.

Gélinas, Gratien, les Fridolinades 1945 et 1946, Montréal, Quinze, 1980, 265 p. Ill. Présentation par Laurent Mailhot.

Germain, Jean-Claude, Un pays dont la devise est je m’oublie. Théâtre, Montréal, VLB éditeur, 1976, 138 p.

Pozier, Bernard, Les poètes chanteront ce but, Trois-Rivières, Écrits des Forges, coll. «Radar», 60, 1991, 84 p. Ill. Réédition : Trois-Rivières, Écrits des Forges, 2004, 102 p.

Dictionnaire des séries 51

Dans le monde du sport, il y a des choses avérées et des choses douteuses.

Un joueur peut avoir «une réputation douteuse» (la Presse, 21 décembre 2011, cahier Sports, p. 2).

Il peut mal se comporter dans ses contacts avec les autres : «Le défenseur des Oilers d’Edmonton Andy Sutton a été suspendu pour huit matchs par la LNH pour sa mise en échec douteuse à l’endroit de l’attaquant des Hurricanes de la Caroline Alexei Ponikarovsky» (la Presse, 9 décembre 2011, cahier Sports, p. 6).

Il arrive parfois à un gardien de donner un but douteux, voire plusieurs : «Sauf que le Canadien perdait 3 à 1, et que sur les trois buts accordés par Théodore, deux étaient douteux» (la Presse, 20 février 2001).

La nature de ce qui est douteux n’est pas très claire, mais il est certain, semble-t-il, que ça existe(rait), peut-être.

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

Dictionnaire des séries 50

Bill Stern, «The Man They Call the Rocket… Maurice Richard», World’s Greatest True Sports Stories. Bill Stern’s Sports Book, 1952, case

«Elle adore tous ses champions
D’la rondelle et du bâton
Pour le hockey, elle peut rester trois jours sans manger»
(Léo LeSieur, «Ah ! le hockey», chanson, 1930)

 

Le bâton est un outil essentiel à tous les joueurs pour tirer, passer ou arrêter la rondelle, voire pour frapper les joueurs adverses.

Vous auriez dû voir les fameux coups d’bâton
(Oscar Thiffault, «Le Rocket Richard», chanson, 1955)

Parmi les fabricants de bâtons, Sherwood a longtemps tenu le haut du pavé, du moins dans la langue du hockey.

Love & Bennett Limited ! Tu parles d’un nom pour un bâton de hockey ! Maurice Richard jouait avec un Love & Bennett, pas un Easton ni un Sherwood. Je n’arrive pas à le croire. Et t’as vu ? Droit comme un «i». Comment pouvait-on lancer avec ça ? (le Vol de la coupe Stanley, p. 63).

On entend donc dire, par exemple, jouer du Sherwood. Autre occurrence, avec allusion culturelle à la clé :

La rondelle réussit à se frayer un chemin à travers une forêt de Sherwood (Sainte Flanelle, gagnez pour nous !, p. 78).

Plus généralement, le mot hockey désigne à la fois le sport et le bâton.

Ces merveilleux joueurs
Glissant sur leurs patins
Le hockey à la main
(Les jeunes du Mont Saint-Antoine, «Nos Canadiens», chanson, années 1960)

En France, on dit crosse. (Pas au Québec.) En Suisse, canne.

N.B. : ne jamais dire gouret, sauf si on cherche une rime avec goret, comme Jocelyn Bérubé en 2003 («Rocket», p. 34).

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

 

Références

Bérubé, Jocelyn, «Rocket», dans Portraits en blues de travail, préface de Jean-Marc Massie, Montréal, Planète rebelle, coll. «Paroles», 2003, p. 25-36.

Dionne, Claude, Sainte Flanelle, gagnez pour nous ! Roman, Montréal, VLB éditeur, 2012, 271 p.

MacGregor, Roy, le Vol de la coupe Stanley, Montréal, Boréal, coll. «Carcajous», 2, 2005, 140 p. Traduction de Jean-Pierre Davidts. Édition originale : 1995.

Personne dehors

L’inclusion, c’est bien.

Au sujet d’une équipe de foot : «Une formation compétitive prônant le nous inclusif […]» (la Presse, 4 juin 2013, cahier Sports, p. 6).

«Pour une stratégie énergétique forte et inclusive» (le Devoir, 1er février 2013, p. A9).

«Louise Harel veut un parti plus “inclusif”» (le Devoir, 29 juin 2009, p. A3).

«L’inclusion des personnes handicapées au Québec est menacée» (le Devoir, 11 décembre 2003, p. A7).

«[Une] métropole qui se veut démocratique et inclusive» (Gérald Tremblay, 9 septembre 2002).

L’exclusion, c’est mal.

«Citoyenneté québécoise. Un projet rassembleur ou porteur d’exclusion ?» (la Presse, 25 août 2001).