L’oreille tendue de… Pierre Nepveu

Pierre Nepveu, Intérieurs du Nouveau Monde, 1998, couverture

«Les Amérindiens nourrissent de ce point de vue, même dans leur absence, le chant profond du continent : basse continue de l’anéantissement, présence fantomatique qui anime le moindre paysage et lui donne sa déchirante mélancolie. Parler des Amériques, c’est forcément, tôt ou tard, en venir à parler d’eux, mais aussi à eux, comme s’ils tendaient éternellement l’oreille à nos discours et nos chants, comme s’ils étaient le foyer auditif du Nouveau Monde.»

Pierre Nepveu, Intérieurs du Nouveau Monde. Essais sur les littératures du Québec et des Amériques, Montréal, Boréal, coll. «Papiers collés», 1998, 378 p., p. 210-211.

Anniversaire de l’Oreille tendue, sans célébrations excessives

Moteur de recherche de Google

L’Oreille tendue est née il y a pile-poil quinze ans. Avec ses bénéficiaires, elle célèbre donc aujourd’hui ses noces de cristal, non sans certaines préoccupations (voir à la fin du texte).

En chiffres, cela donne :

5 470 billets, dont 1044 contiennent au moins un «Complément» (certains en contiennent plusieurs, notamment celui sur la ruée vers les bars);

un peu plus de 3 300 000 vues;

5 704 commentaires;

3 563 photos;

169 vidéos;

17 391 URL uniques pour 32 576 liens (internes ou externes);

beaucoup de collaborateurs (merci à tous);

plus de 309 000 «tentatives de connexion malveillantes bloquées»;

100 237 «commentaires indésirables bloqués».

L’entrée la plus populaire ? Encore et toujours swag, avec 581 422 visionnements. «Depuis le 1er jour», dixit WordPress, sa meilleure journée est le 2 mars 2024 (explication ci-dessous). Auparavant, il s’agissait du 29 avril 2012, avec 6 094 vues, essentiellement pour ce texte.

Les quinze articles les plus populaires ?

Du postcool [swag]

Unicité vitale [yolo]

Sic

Histoires (d’abord) de chalet [sauf une fois]

Divergences transatlantiques 012 [thermos]

Au carré [malaisant]

Le dilemme de l’autobus

De la germaine

Divergences transatlantiques 015 [gosses]

Non, point du tout [pantoute]

Défense et illustration de la garnotte

Rime en -ag [vagg]

bs

Du mot(t)on

Crissement riche

Qu’est-ce que ce blogue ? L’Oreille tendue a donné un long entretien à ce sujet à Emmanuelle Lescouët en 2021; ça se trouve sur le Carnet de la Fabrique du numérique sous le titre «Penser publiquement la recherche». Elle a aussi publié un article sur le sujet dans les Cahiers internationaux de sociolinguistique en 2022. Il lui est aussi arrivé de répondre à ses propres questions, par exemple ici et .

L’Oreille tendue, c’est un blogue. C’est aussi des livres tirés, complètement ou partiellement, d’icelui.

Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 125 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue), Montréal, Del Busso éditeur, 2015, 118 p. Ill.

L’Oreille tendue, Montréal, Del Busso éditeur, 2016, 411 p.

Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

La vie et l’œuvre du professeur P. Sotie, Montréal, À l’enseigne de l’Oreille tendue, 2022, 56 p.

On continue ? On continue.

Non sans inquiétudes, cependant. Google a changé son mode de fonctionnement au cours des dernières années. La société a d’abord modifié son algorithme de classement des résultats de recherche, histoire de favoriser les grands groupes médiatiques. Par la suite, au lieu d’offrir des liens vers des sites (par exemple, ce blogue), elle a préféré offrir des réponses générées par l’intelligence artificielle. Or Google est en position de quasi-monopole au sein des moteurs de recherche. Conséquence ? Les blogues sont de moins en moins référencés dans les résultats de recherche — à moins de le demander explicitement (voir l’image en tête de ce billet) —, ce qui entraîne une baisse considérable de leur achalandage (explication ici, par exemple). C’est le cas ici. C’est regrettable, mais évidemment pas au point de fermer boutique.

Une dernière chose : l’utilisation des ressources d’Internet par l’intelligence artificielle n’est pas une vue de l’esprit. Le 2 mars 2024, un samedi, l’Oreille tendue a été visitée près de 10 000 fois. Il ne s’agissait pas d’humains venus la lire. Il s’agissait d’une machine qui, anonymement, en a pompé tout le contenu… pour le recracher sans citer ses sources, probablement contre rétribution. On est bien peu de chose.

Autopromotion 766

«Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, seconde planche XXI

La 612e livraison de XVIIIe siècle, la bibliographie de l’Oreille tendue, est servie.

La bibliographie existe depuis le 16 mai 1992. Elle compte 72 176 titres.

À partir de cette page, on peut interroger l’ensemble des livraisons grâce à un rudimentaire moteur de recherche et soumettre soi-même des titres pour qu’ils soient inclus dans la bibliographie.

Illustration : «Anatomie», deuxième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1762, seconde planche XXI

Pouces et mains

Jacques Brault et François Hébert, l’Élan de l’écrevisse, 2023, couverture

En 1990, François Hébert publie un livre de poésie intitulé Lac noir. Une édition revue et augmentée paraît en 2010 sous le titre l’Élan de l’écrevisse. L’année dernière, sous le même titre, les lecteurs ont eu droit à une «nouvelle réédition augmentée et définitive».

Dans son «hors-d’œuvre», en 2023, Jacques Brault réfléchit à sa pratique des arts visuels. Voici le premier paragraphe de son texte :

Quand on s’est fait dire et répéter tout au long de sa prime jeunesse : «Tu ne feras jamais rien de bon avec des mains pleines de pouces», on finit par se décourager ou se rebiffer, à moins de continuer son chemin à son allure propre — et sans marcher sur les mains. Donc, on ne s’est pas pris pour un peintre, pas même du dimanche, quand un jour d’automne doré, ayant trouvé dans l’herbe du jardin une plume de geai, on a éprouvé le désir fou de jouer à l’oiseau et de dessiner l’air dans l’air, l’eau sur l’eau, et ainsi de suite pour le reste du monde. C’est alors qu’on prend goût, sans y penser, à vivre en plus avec son flair tactile, avec plein les mains de perceptions de tout ordre. Et par s’exprimer en silence, en réseau de lignes et de taches, ombres et lumières non plus de langage, mais de matière (p. 65).

Avoir les mains pleines de pouces ? Au Québec, faire preuve de maladresse. Trop de pouces, comme pas assez, ce n’est pas idéal.

À votre service.

 

Références

Brault, Jacques et François Hébert, l’Élan de l’écrevisse, Laval-des-Rapides, Le temps volé, coll. «À l’escole de l’escriptoire», 30, 2010, 49 p. Ill. Réédition de Lac noir (1990), de François Hébert, revue et augmentée. Quarante-six poèmes de François Hébert. Neuf dessins & une réflexion hors-texte de Jacques Brault.

Brault, Jacques et François Hébert, l’Élan de l’écrevisse, Laval-des-Rapides, Le temps volé, coll. «À l’escole de l’escriptoire»,59, 2023, 71 p. Ill. Nouvelle réédition de Lac noir (1990), de François Hébert, augmentée et définitive. Quarante-six poèmes et une apostille de François Hébert. Neuf dessins et un hors-d’œuvre de Jacques Brault. Suivi de «de l’âme et de ses ombres» par Marc Desjardins.

Hébert, François, Lac noir, Québec, Éditions du Beffroi, 1990, s.p. Dessins de Jacques Brault.

Fil de presse 050

Charles Malo Melançon, logo, mars 2021

Collecte pré-estivale d’ouvrages et de numéros de revue sur la langue.

Bancel, Pierre, Pris aux mots. De l’origine du langage à l’origine des langues, Paris, Exils, coll. «Essai», 2024, 336 p.

Boudreau, Annette, Parler comme du monde, Sudbury, Éditions Prise de parole, coll. «Essai», 2024, 177 p.

Bouvet, Marlène, Florent Chossière, Marine Duc et Estelle Fisson (édit.), Catégoriser. Lexique de la construction sociale des différences, Lyon, ÉNS éditions, coll. «Sociétés, espaces, temps», 2024, 722 p. Préface de Nonna Mayer.

Bradette, Marie-Ève, Langue(s) en portage. Résurgence littéraire et langagière dans les écritures autochtones féminines, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Expressions autochtones», 2024, 192 p.

Calvez, Ronan et Jean Lecoulant, Ça se dit comme ça en Bretagne, Paris, Le Robert, coll. «Ça se dit comme ça», 2024, 144 p.

Cardini, Filippo-Enrico, Consciousness and the Cultural Invention of Language, Londres, Routledge, 2022, 186 p.

Curzan, Anne, Says Who ? A Kinder, Funner Usage Guide for Everyone Who Cares About Words, New York, Penguin Random House, 2024, 336 p.

Davies-Deacon, Merryn, Breton in Contemporary Media. Speakers, Language, Community, De Gruyter, coll. «Language and Social Life», 27, 2024.

Dawson, Alain et Liudmila Smirnova, Ça se dit comme ça dans le Nord et la Picardie, Paris, Le Robert, coll. «Ça se dit comme ça», 2024, 144 p.

Delorme, Philippe, Éthique et esthétique du paria, de l’origine du mot à son épiphanie romantique (1673-1873), Paris, Honoré Champion, coll. «Romantisme modernité», 211, 2024, 522 p

Duval, Jean-François, les 100 mots de la Beat Generation, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 2024, 128 p.

Études de lettres, 323, 2024. Dossier «FLE : français langue en expérience(s)», sous la direction de Stéphanie Pahud et Magali Cécile Bertrand.

Gasquet-Cyrus, Médéric, Ça se dit comme ça à Marseille, Paris, Le Robert, coll. «Ça se dit comme ça», 2024, 144 p.

Grajales Ramírez, Andrés, Jorge Molina Mejía et Pablo Valdivia Martin (édit.), Digital Humanities, Corpus and Language Technology / Humanidades Digitales, Corpus y Tecnología del Lenguaje : A Look from Diverse Case Studies / Una mirada desde diversos casos de estudio, Groningen, University of Groningen Press, 2023.

Hanus, Gilles, Une langue unique. Rousseau, Babel et la civilisation, Paris, Éliott, coll. «L’éclectique», 2024, 104 p.

Lidil, 69, 2024. Dossier «Formation en langues secondes face à l’urgence», sous la direction de Junkai Li et Aurora Fragonara.

Loïc, Jean-Louis et Anne Zribi-Hertz, Petit guide de créole martiniquais, Saint-Denis, Presses universitaires de Vincennes, coll. «Sciences du langage», 2024, 384 p.

Macchi, Yves, Études de chronosyntaxe, Paris, Honoré Champion, coll. «Bibliothèque de grammaire et de linguistique», 74, 2024, 432 p. Réunies par Marine Poirier.

Martin, Philippe, «Superstition», histoire d’un mot XVe-XXIe siècle, Paris, Fayard, 2024, 464 p.

Mbainaikou Mitta, Olivier, Didactique de francisation au Québec, Éditions universitaires européennes, 2024, 52 p.

Meney, Lionel, le Naufrage du français, le triomphe de l’anglais. Enquête, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «L’espace public», 2024, 280 p.

Rapport au Parlement sur la langue française 2024, Paris, ministère de la Culture, Délégation générale à la langue française et aux langues de France, 2024, 103 p.

Romanelli, Norma, les Grammaires de l’italien à l’usage des Français (1660-1900). «Pour entretenir noblesse», Paris, Honoré Champion, coll. «Linguistique historique», 17, 2024, 478 p.

Simon-Nahum, Perrine, Arthur Gautier, Isabelle Gougenheim, Laurence Lepetit, Paule-Henriette Lévy et Brigitte Rozen (édit.), Les mots qui disent la philanthropie, Paris, Odile Jacob, 2024, 272 p.