Norbert Elias (1897-1990)

Norbert Elias est mort il y a vingt-cinq ans aujourd’hui. Le psychologue Steven Pinker a signalé la chose par un tweet insistant à la fois sur l’importance de la pensée d’Elias et sur le fait qu’il est peu connu :

Ce tweet renvoie au blogue de l’historien John Carter Wood, Obscene Desserts, qui explique comment Elias a nourri son travail de recherche sur le crime et la violence. Il regrette de ne l’avoir jamais rencontré : «On the long list of deceased intellectuals from the past with whom I’d like to have had the chance to have dinner, Norbert Elias is at the top

En français, la sociologue Nathalie Heinich a publié une introduction à son œuvre en 1997. Dans des travaux de jeunesse, l’Oreille tendue a emprunté à Elias le concept de configuration afin d’étudier des correspondances de femmes du XVIIIe siècle.

L’œuvre de Norbert Elias est peut-être injustement méconnue, mais elle réunit des psychologues, des historiens, des sociologues, des littéraires. Ce n’est pas rien.

 

Références

Heinich, Nathalie, la Sociologie de Norbert Elias, Paris, La Découverte, coll. «Repères», 1997, 121 p.

Melançon, Benoît, «La configuration épistolaire : lecture sociale de la correspondance d’Élisabeth Bégon», Lumen. Travaux choisis de la Société canadienne d’étude du dix-huitième siècle. Selected Proceedings from the Canadian Society for Eighteenth-Century Studies, XVI, 1997, p. 71-82. https://doi.org/1866/31893

Melançon, Benoît, «La lettre contre : Mme du Deffand et Belle de Zuylen», dans Benoît Melançon (édit.), Penser par lettre. Actes du colloque d’Azay-le-Ferron (mai 1997), Montréal, Fides, 1998, p. 39-62. https://doi.org/1866/14089

Langue grand-maternelle

Jean-Claude Corbeil, l’Embarras des langues, 2007, couverture

L’Oreille tendue travaille à un nouveau livre. Ça s’appellera Le niveau baisse ! (et autres idées reçues sur la langue) et ça devrait paraître en octobre chez son éditeur habituel, Del Busso éditeur.

Dans le premier texte, déjà partiellement paru ici, il y aura cette phrase :

On entend parfois telle chroniqueuse vanter la langue impeccable de sa mère ou de sa grand-mère, elle qui n’avait qu’une «cinquième année». Cela est peut-être vrai, mais, à l’oral, sauf pour des périodes récentes, c’est invérifiable et, dès lors, inutilisable dans une démonstration raisonnée.

L’Oreille n’est pas la seule à se méfier des grands-mères.

C’est aussi le cas de Jean-Marie Klinkenberg :

Il n’est pas jusqu’à la hideuse faute d’orthographe — celle que tout le monde fait, mais dont tout le monde se défend, par exemple en l’attribuant à ces brebis émissaires que sont les dactylos, ou en entretenant la croyance aux mythiques grands-mères à l’orthographe pure — qui n’y jaillisse sous le doigt et l’œil de Mireille, telle une sanie qui le promet à la mort la plus sale (p. 190-191)

et de Jean-Claude Corbeil :

Chacun répond à la question en se reportant à ses souvenirs, à la grand-mère qui écrivait sans faute bien qu’elle ait peu fréquenté l’école, ou au souvenir que l’on garde de la manière dont on nous enseignait l’orthographe et la grammaire à l’école (p. 344).

L’Oreille est en agréable compagnie.

P.-S. — Elle a déjà parlé de sa grand-mère, . Cela n’avait strictement rien à voir avec ce qui vient d’être dit.

 

[Complément du 29 juillet 2015]

Nouvel exemple, dans le plus récent livre de Jean-Marie Klinkenberg, la Langue dans la Cité (2015) : «nous en connaissons tous, de ces héroïques grands-mères qui, sans jamais avoir fait d’études poussées, avaient une orthographe irréprochable, alors qu’aujourd’hui…» (p. 158)

 

Références

Corbeil, Jean-Claude, l’Embarras des langues. Origine, conception et évolution de la politique linguistique québécoise, Montréal, Québec Amérique, coll. «Dossiers et documents», 2007, 548 p. Préface de Louise Beaudoin.

Klinkenberg, Jean-Marie, «Lecture», dans Jacques Godbout, D’amour, P.Q. suivi d’un dossier par Jean-Marie Klinkenberg, Paris, Seuil, coll. «Points», 1991, p. 159-195.

Klinkenberg, Jean-Marie, la Langue dans la Cité. Vivre et penser l’équité culturelle, Bruxelles, Les Impressions nouvelles, 2015, 313 p. Préface de Bernard Cerquiglini.