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En 2017, sur Twitter, @rafov74 et @JulienLefortF s’inquiétaient.

Deux tweets sur «être sur son x»

Être sur son x ? L’expression existe depuis quelques années et elle est appréciée des chroniqueurs culturels et autres omnicommentateurs aussi bien que des gestionnaires et des artistes.

Son sens ? «Être exactement à l’endroit où l’on veut être dans sa vie, autant personnellement que professionnellement, c’est ça, être sur son X» (les Inspirés, 5 octobre 2015).

Un synonyme (surtout sportif) ? Être dans la bonne chaise.

Un danger ? Perdre son x. Heureusement, le chanteur Louis-Jean Cormier vient de retrouver le sien.

 

[Complément du 27 mars 2021]

Le x, pour certains, est une destination : «C’est un cliché, certes, mais Solange Drouin décide de l’assumer : en se joignant à l’ADISQ, en 1992, elle est arrivée sur son X» (la Presse+, 27 mars 2021).

 

[Complément du 17 août 2025]

Un antonyme ? Être hors de son X. Exemple : «Latifah Abdu et Tanya Boychuk ont semblé particulièrement hors de leur X, samedi» (la Presse+, 17 août 2025).

L’oreille tendue de… Plume Latraverse

Plume Latraverse, Métamorphoses. Tome 1, 1982, pochette

«Écoutez tous avec élan
Ce que j’vous raconte à l’instant
J’crierai pas fort, j’vas mordre personne
J’essaye quèqu’ chose jus’ pour le fun
J’vous arrach’rai pas les tympas
Tendez vot’ oreille en avant
J’vas dire quèqu’ chose de pas mal laid
Faudrait pas qu’ma mère m’entendrait…»

Plume Latraverse, «Les humains» (1982), dans Tout Plume (…ou presque), Montréal, Typo, 2014, 448 p. Édition numérique.

Mise en délibéré

Dans le Devoir des 8-9 février 2020 :

«D’ailleurs, au risque de dire quelque chose qui semblera peut-être incongru, ce film, c’est aussi une lettre d’amour à Montréal» (le D magazine, p. 5).

«Cette série est une lettre d’amour au pouvoir de la télévision» (le D magazine, p. 37).

Déjà en 2015 :

«une vibrante lettre d’amour au cinéma» (24 décembre 2015, p. E4).

Dans la Presse+ :

«Leur auteur les décrit comme une “lettre d’amour à Montréal”, mais c’est surtout l’œuvre d’un érudit qui nous livre une très belle réflexion philosophique» (6 novembre 2019).

«Cet album est une lettre d’amour à l’amour, dans tout ce qu’il a de plus irritant, passionné, excitant, ravissant, horrible, tragique, magnifique, glorieux» (26 août 2019).

«Lettre d’amour à» : moratoire ou pas ? L’Oreille tendue se tâte.

 

[Complément du 13 décembre 2021]

Brassée du jour. Ça ne va pas mieux.

«Une lettre d’amour à Naples» (la Presse+, 3 décembre 2021).

«Une lettre d’amour à l’Eurovision» (la Presse+, 27 juin 2020).

«À travers ses réflexions tissées de métaphores, elle offre aussi, et surtout, une magnifique lettre d’amour aux langues, le français en particulier, et à leur pouvoir transformateur» (la Presse+, 1er mars 2020).

«C’est dommage, parce qu’au fond, mon film est une lettre d’amour à Niagara Falls» (le Devoir, le D Magazine, 22-23 février 2020, p. 15).

«Lettre d’amour à l’Amérique noire» (la Presse+, 17 février 2021).

«Le roman peint aussi un tableau vivant de la Côte-Nord et est une lettre d’amour sentie aux produits de la mer, qui y occupent une place centrale» (la Presse+, 25 avril 2021).

 

[Complément du 3 novembre 2023]

Ça n’arrête pas de continuer.

«Lettre d’amour à une France récalcitrante» (la Presse+, 3 novembre 2023).

«Petite lettre d’amour à Montréal» (la Presse+, 19 août 2023).

Lettre d’amour à la ville (Télé-Québec, mars 2023).

«Une lettre d’amour à la France» (la Presse+, 26 mai 2023).

«Une lettre d’amour à la diversité culturelle» (la Presse+, 20 septembre 2022).

«Lettre d’amour à Montréal» (le Devoir, 2 septembre 2022, p. B3).

«La lettre d’amour de Michel Tremblay aux acteurs» (la Presse+, 10 mai 2022).

«Lettre d’amour à ceux qui n’ont plus de voix» (le Devoir, le D magazine, 19-20 février 2022, p. 32).

 

[Complément du 1er février 2025]

Hop ! Une autre brassée !

«Lettre d’amour à la cuisine haïtienne» (la Presse+, 1er février 2025).

«Lettre d’amour à notre neige» (la Presse+, 24 décembre 2024).

«Lettre d’amour à ceux qui restent» (le Devoir, le D magazine, 5-6 octobre 2024, p. 2).

«“Une lettre d’amour à [insérez le sujet]” revient souvent dans les critiques qu’on voit sur les affiches de film ou dans les bandes-annonces. La formule s’applique réellement à The Fall Guy, une véritable lettre d’amour au cinéma d’action» (la Presse+, 3 mai 2024).

«Les femmes de ma vie. La création S’enjailler est une lettre d’amour à l’amitié et à la sororité» (le Devoir, le D magazine, 20-21 avril 2024, p. 6).

«Nanni Moretti se fait son cinéma. Le réalisateur de Journal intime et de La chambre du fils s’offre avec Vers un avenir radieux son propre 8 1/2, une lettre d’amour au cinéma» (le Devoir, 13 octobre 2023, p. B2).

L’imbibition, encore

Ellie Martineau-Lavoie, les Bikinis couleur peau, 2018, couverture

Hasard ou nécessité, il est souvent question en ces lieux d’imbibition alcoolisée (voir ici ou ).

Parlons donc robine.

Définition du dictionnaire numérique Usito : «Alcool de mauvaise qualité; liquide alcoolisé qu’on ne peut consommer.» Étymologie : «1935. […] de l’anglais rubbing (alcohol)

Exemple romanesque : «Les yeux cernés, l’air désabusé, il dégageait une puissante odeur de robine» (Cercles de feu, p. 178).

Exemple poétique : «il y a un incendie dans les nuages / des collines en coton / les moineaux sur les balcons / sentent la robine» (les Bikinis couleur peau, p. 51).

Exemple chanté : «Tant qu’il y aura des femmes pis tant qu’il y aura d’la robine» («À chaque jour le même soleil»).

Exemple nouvellistique : «Il sentait ses dents huileuses sous la langue et les goûts mélangés du saucisson à l’ail et de la robine» («Effacer le tableau», p. 167).

Il paraît donc que, malgré ce qu’avance Usito, la robine se consomme.

P.-S.—Oui, la robine est proche de la tonne.

P.-P.-S.—Le consommateur de robine peut devenir un robineux.

 

Références

Bock, Raymond, «Effacer le tableau», dans Atavismes. Histoires, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 03, 2011, 230 p., p. 149-175.

CQFD, «À chaque jour le même soleil», chanson, 2002.

Dimanche, Thierry, Cercles de feu. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 138, 2019, 438 p.

Martineau-Lavoie, Ellie, les Bikinis couleur peau. Poésie, Montréal, Del Busso éditeur, 2018, 86 p.

Parlons cochon

Soit le tweet suivant, de Les Perreaux :

 

Les deux derniers mots de la dernière phrase paraîtront sibyllins à certains : qu’est-ce que ce «gros jambon» ?

Dans le domaine sportif, le jambon alimente souvent la discussion.

Le mot désigne le boxeur strictement appelé à faire de la figuration devant un adversaire bien plus fort : il arrive donc que des boxeurs aient «une belle fiche contre des jambons» (la Presse, 7 août 2012, cahier Sports, p. 7). Ce n’est pas parce qu’ils ont essayé de les manger.

Au hockey, ce n’est guère plus glorieux. Dans Panache. 1. Léthargie (2009), de Sylvain Hotte, le héros se réjouit à l’idée d’affronter une équipe du Saguenay composée de «quelques jambons à la défensive» (p. 99 et p. 105). On ne confondra pas le jigon et le jambon.

Dans son tweet, Perreaux critique la décision de l’entraîneur Gerard Gallant, des Golden Knights de Las Vegas, d’avoir envoyé un de ses joueurs se battre contre un adversaire des Jets de Winnipeg. C’est, en effet, digne d’un jambon, voire d’un gros jambon.

Le mot n’est pas utilisé que dans le domaine sportif.

Selon Pierre DesRuisseaux, on peut être assis sur son jambon : «Ne rien faire, ne pas réagir» (2015, p. 182). Ce jambon-là est, donc, un steak.

Léandre Bergeron reste dans le registre anatomique : les jambons pourraient être les «Grosses cuisses (d’une femme)» (1980, p. 280) — pourquoi seulement d’une femme ?

Bref, le jambon, dans le français populaire du Québec n’a pas bonne presse. Il vaut mieux ne pas être un gros jambon. Que Gerard Gallant se le tienne pour dit.

P.-S.—Exception qui confirme la règle : les plus vieux se souviendront que «Gros jambon» est une chanson interprétée par Réal Giguère dans laquelle le terme n’est pas connoté négativement.

 

Références

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise, Montréal, VLB éditeur, 1980, 574 p.

DesRuisseaux, Pierre, Trésor des expressions populaires. Petit dictionnaire de la langue imagée dans la littérature et les écrits québécois, Montréal, Fides, coll. «Biblio • Fides», 2015, 380 p. Nouvelle édition revue et augmentée.

Hotte, Sylvain, Panache. 1. Léthargie, Montréal, Les Intouchables, coll. «Aréna», 1, 2009, 230 p.