Les zeugmes du dimanche matin, de Twitter et de la collègue

«Mine de rien, deux Siams sur mes genoux, ça fait beaucoup, et parfois des histoires. #zeugme #chats #chatsautravail» (23 septembre 2016).

«Mettre son manteau, descendre l’escalier, prendre son courage et sa pelle à deux mains. #Zeugme #Neige #MerveilleuxSamediSoir #Stie» (3 janvier 2015).

«Quand une “écriture” vous donne mal aux dents et des boutons. #pseudo-zeugme @benoitmelancon c’est un #zeugme ou pas ?» (11 juillet 2014)

«“À 40 ans, la jeune fille, bien en chair et parfois en béret” http://www.ledevoir.com/opinion/blogues/les-mutations-tranquilles/407592/monica-lewinsky-apres-16-ans-la-premiere-victime-d-humiliation-sur-le-web-parle… #zeugme #FDeglise #LeDevoir» (13 mai 2014).

«Lire des notes de bas de page en 7 ou 8 points et en allemand. #Pfffffffffff #zeugme» (9 octobre 2013).

«Unter den Linden, en travaux et à contre-jour. #zeugme #Baustelle #UnterDenLinden #Berlin #RareMomentDESoleil» (18 septembre 2013).

«“Vieille croûte réactionaire”, expression adoptée à l’instant et à l’unanimité par toute la maisonnée #zeugme pour désigner ce genre de…» (14 mars 2013)

«“Poulet à la diable, au citron et au poivre noir” (Un livre de recettes) Un #zeugme culinaire et appétissant» (31 décembre 2012).

«“En mai et en librairie les éditions P.O.L. publient : […]” #PapierDansUnLivre #ServicedePresse #LilianeGiraudon #LOmeletteRouge #Zeugme» (18 juillet 2012).

«#Gailly “Et pour monsieur, Brighton, un double café noir et les toilettes.” #zeugme #LesOubliés» (9 juillet 2012).

«“Le garçon revient avec le sucre et toutes ses excuses” #ChristianGailly #LesFleurs #zeugme» (4 juillet 2012).

«Pendant ce temps, Lucie sèche sur sa chaise et sa copie. #Panne #Lenteur #Grrrrrr #ChemisesDeLArchiDuchesseSontEllesSèches #Zeugme» (29 juin 2012).

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Adage du jour

«Méchante bibitte», publicité de Volkswagen, 2011

Le Petit Robert (édition numérique de 2014) lui connaît deux sens — «insecte», «petite bête» —, trois aires de reproduction — «Canada, Vanuatu, Seychelles» — et quatre graphies — «bébite», «bebite» «bibit(t)e».

Le dictionnaire en ligne Usito est plus riche sur le plan du sens : «insecte», «petite bête, souvent sauvage», «personne ou chose inconnue, étrange, étrangère», «problème». Ajoutons à cela un «adverbe complexe» : «en bibite».

En revanche, ni l’un ni l’autre ne relèvent un adage bien connu au Québec formé avec bibitte. Exemple tiré d’une revue artisanale québéco-belge : «Quelle ne fut pas ma stupeur de constater que mon aventurière s’émerveillait de voir les araignées prendre son corps pour une montagne, persuadée qu’elle était que les petites bibittes ne mangent pas les grosses.»

En effet, les petites bibittes ne mangeraient pas les grosses.

P.-S. — Oui, certes, les araignées ne sont pas des insectes.

 

Référence

Laroche, Yves, «De l’araignée, de l’amour et de la poésie», Gnou, deuxième ruade, août 1996, [s.p.].

Onze néologismes pour un jeudi matin

Alimentaires

Doculinaire : une émission de télévision sur la cuisine, dixit la Presse+ du 12 août 2016 — comme s’il n’y en avait pas déjà assez.

Gorestronomie : «les morts-vivants al dente», annonce France Culture sur Twitter.

Néorésistance : boire du vin à une terrasse parisienne, écrivent Francis Gingras et Claire Legendre en parlant d’amis à eux («Sacrer ou se taire», Spirale, 256, printemps 2016, p. 28).

Poutinier : cela est en demande depuis quelques années déjà. La preuve ? «Profession : recruteurs de poutiniers» (la Tribune, 21 août 2010).

Entrepreneuriaux

Édupreneur : le professeur ne saurait être seulement un professeur, note @DirectionInfo.

Holacratie : en entreprise, ce modèle distribuerait les responsabilités «de manière plus équitable» (la Presse, 20 juin 2015, cahier Affaires, p. 9).

Rabbipreneur : c’est Dan Cohen, sur Twitter, qui a repéré ce mot désignant un être doué pour les affaires de ce monde (entrepreneur) et de l’au-delà (rabbi).

Repreneuriat : «Mot-valise en circulation depuis presque 20 ans et formé des termes “reprendre” et “entrepreneuriat”, le repreneuriat est l’acte d’acheter et de faire durer dans le temps une entreprise existante», explique la Presse+ du 14 juin 2016.

Animaux

Catio : c’est dehors, c’est pour chat, c’est une cage et ce n’en est pas une, affirme le Washington Post.

Moutondeuses : animal régional, s’il faut en croire Radio-Canada.

Oculaires

La clinique des phrases (f)

La clinique des phrases, logo, 2020, Charles Malo Melançon

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit la phrase suivante :

Installée sous les poutres et les fenêtres, la salle à manger jouit de luminosité et de vastitude (la Presse+, 30 juillet 2016).

(Ah ! la jouissance de la vastitude ! Encore !)

Et si on essayait ceci ?

Installée sous les poutres et les fenêtres, la salle à manger est lumineuse et vaste.

À votre service.

Rire, puis plus

Samuel Cantin, Whitehorse, 2015, couverture

Henri Castagnette, le personnage principal de Whitehorse (2015), libraire à temps partiel, écrivain sans œuvre, velléitaire et fabulateur, vit avec une comédienne débutante, Laura. Quand elle obtient le premier rôle dans un film de Sylvain Pastrami, également intitulé Whitehorse, la jalousie d’Henri explose. Cela se terminera mal (pour l’instant : une deuxième partie est à paraître).

Avant cette fin violente, on aura eu l’occasion de rire dans une série de vignettes absurdes ou parodiques : métaphores routières (p. 30, p. 68), dialogue au Kafka (p. 34) ou au kale (p. 104), conversations embarrassées (p. 60-63), scène de couple avec poireau (p. 84-87), mondanités droguées (p. 133-134), propos sur l’art («Les biennales d’art, ça, c’est un bon concept ! Ça devrait s’appliquer à tout. Faites de l’art juste aux deux ans, gang […]», p. 170).

On aura aussi eu droit, en matière de sexualité et d’homosexualité, à nombre de représentations et de discours. Les mots ne sont pas moins crus que les images. Les langages du corps importent fort au narrateur.

La langue de ce roman graphique accueille généreusement la langue populaire, les mots en anglais et les jurons. En cette matière, il y en a pour tous les goûts, ce qui ne saurait déplaire à l’Oreille tendue : simonaque, fuck, crisse / crime, mon Dieu / My God, cheez whiz, câlisse / câline, maudine / maudit / mautadine, cibole, ostie / esti / sti, tabarnouche / tabarne / tabarnak (c’est le dernier mot du livre), etc.

Attendons la suite. On rira, ou pas ?

 

Référence

Cantin, Samuel, Whitehorse. Première partie, Montréal, Éditions Pow Pow, 2015, 211 p.