Québécoise, encore un effort !

Lorem barnak, générateur de jurons québécois

LOREM BARNAK est «Le générateur de jurons Québécois» (remarque de pion : «québécois» ne devrait évidemment pas avoir de majuscule initiale, puisqu’il s’agit d’un adjectif). Explication :

Une combinaison du célèbre texte de remplissage «Lorem ipsum» et du juron emblématique «tabarnak», Lorembarnak rend hommage au riche paysage culturel des sacres Québécois [bis] en générant sur demande des chaînes d’obscénités aléatoires.

Vous vous-êtes cogné l’orteil si fort que vous en perdez vos mots ? On vous a chargé de composer quelques paragraphes pour un projet qui vous met en beau maudit ? Vous sentez monter la frustration en essayant d’assembler un nouveau meuble suédois ? Peu importe l’occasion, Lorembarnak sera là pour répondre à tous vos besoins à base de texte.

La chose est connue : l’Oreille tendue aime beaucoup sacrer, et sacrer beaucoup. Elle aime aussi beaucoup écrire sur les jurons du cru. A-t-elle couvert l’ensemble des propositions de LOREM BARNAK ?

Elle a baptême, enfant d’chienne, sacrament, maudite marde, cibole (mais pas cibolac), (saint-)simonaque, viande à chien, christie, gériboire, mosus, maudit, (saint-)ciboire, jésus de plâtre, bout d’viarge, bâtard, viarge, mautadit, câlisse, patente à gosse, torvisse, maudine, batince, sacristi, verrat, taboire, sapristi, câlique, câline (de bine), calvaire, crime, tabarnouche, tabarslaque, tabarouette — et bien sûr tabarnak.

Il lui manque cibouleau, estique / estic et ostifie (mais elle a ostie et astie), bout d’criss (mais elle a criss), sacréfice, boswell, esprit, torrieux (qu’elle utilise volontiers), jésus marie joseph, charrue, charogne.

Encore un effort !

Quand la réalité rejoint la fiction

En 2001, avec Pierre Popovic, l’Oreille tendue publiait le Village québécois d’aujourd’hui. Y apparaissait une bière fictive, La Môsus.

Trois ans plus tard sortait une «deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée» de l’ouvrage, sous le titre Dictionnaire québécois instantané. La Môsus était alors remplacée par La Torrieuse.

Que commercialise dorénavant la Brasserie Maltco ?

Bière La Torrieuse, Brasserie Maltco, 2020

Ça ne s’invente pas.

 

Références

Melançon, Benoît et Pierre Popovic, le Village québécois d’aujourd’hui. Glossaire, Montréal, Fides, 2001, 147 p.

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.

Benoît Melançon, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, éd. de 2019, couverture

Ceci n’est pas un beau bonjour

Ceci, dans la Presse+ du jour : «Ma mère a raison de se plaindre de la “petite bonjour” qui l’a frôlée la semaine dernière sur le trottoir, alors qu’elle marchait près du mont Royal.»

Ce «bonjour» n’a rien à voir avec la formule de salutation. Au Québec, il s’agit d’une personne, d’un sexe ou de l’autre. Le mot est souvent accompagné d’un déterminant qui en atténue la potentielle connotation négative : «le bonjour», «mon bonjour», cette «petite bonjour».

Citations à l’appui, la Base de données lexicographiques panfrancophone donne deux définitions de cet emploi : «Fam. Pour qualifier négativement qqn ou qqch. qui agace, énerve»; «Fam. (Exprimant tantôt un léger reproche, tantôt une certaine admiration, général. précédé de l’épithète petit). Enfant espiègle, turbulent, ou audacieux. […] Par ext., en parlant d’un adulte, ou même d’un animal.»

Avec cette imagination qui n’est heureusement qu’à lui, Léandre Bergeron, en 1980, considère ce bonjour comme un juron, mais «aimable» (!) : «Juron aimable qui s’emploie familièrement en parlant de personnes. Ex. : Ce bonjour-là, est-ce qu’i va pas arriver ? Ma petite bonjour, si tu me fais fâcher…» (p. 86)

Ah ! ce bonjour de Dictionnaire !

 

Référence

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise, Montréal, VLB éditeur, 1980, 574 p.

Soutien à l’insulte

L’Oreille tendue aime beaucoup sacrer, et sacrer beaucoup. Elle a toute une série de textes là-dessus.

Le Tampographe / The Stampographer vient de lui faciliter la tâche : au lieu de dire des jurons (et des insultes diverses), pourquoi ne pas les imprimer et les réimprimer à répétition ?

Cela donne un coffret de 24 «injures québécoises», pour 65 euros.

Le Tampograhe / The Stampographer , «Étampes vulgaires. French Canadian Vulgar Stamps»

Le Tampographe / The Stampographer propose des explications et des traductions anglaises de quelques-uns de ces termes choisis. L’Oreille peut aussi offrir ses services pour…

plotte,

graine,

crosser,

criss,

tarla,

marde,

innocent,

poche,

char,

colon,

tabarnac,

épais,

ostie,

câlisse

et

niaiseux.

À votre service.

Parlons cheval

Soit le tweet suivant, de Yan Saint-Onge :

Dans ce cas-ci, l’expression en joual vert signifie beaucouptrès. Voici un autre exemple, qui va dans le même sens, tiré du roman C’t’à ton tour, Laura Cadieux, de Michel Tremblay (1973) :

Ah, okay, ça nous fait rêver pis toute, pis j’ai rien contre le rêve de temps en temps, mais moé j’sais ben que si Pit se mettrait à me dire le quart d’la moitié de ce que les hommes disent aux femmes dans les vues, j’me tordrais de rire en joual vert ! (p. 106)

Par ailleurs, on peut être en joual vert, voire en beau joual vert : fâché, mécontent, courroucé. Ce serait plus présentable que de se dire en crisse, en tabarnak, en câlisse, en estie, en sacrament, en ciboire, etc.

Cela étant, des mélanges sont possibles, histoire de bien marquer le coup, comme chez le Maxime Raymond Bock des Noyades solitaires (2017) :

Il atteignait la fin de la quarantaine, pétri d’une toute-puissance professionnelle, intellectuelle et morale, mais il ne pouvait que constater, et ça le mettait en hostie de beau joual vert, que ses enfants étaient des mécréants (p. 21).

On aura reconnu ce joual; c’est un cheval. Mais pourquoi diantre est-il vert ?

P.-S.—Pierre Corbeil propose une graphie en un seul mot, joualvert (2011, p. 44). À première vue, cela étonne, mais est alors plus visible le lien possible entre joualvert et calvaire.

P.-P.-S.—Usito offre l’étymologie suivante : «Depuis 1930 […]; déformation de (parler) cheval “baragouiner, s’exprimer d’une manière inintelligible”; locution relevée dans la langue populaire en France au 19e s.»

 

Références

Corbeil, Pierre, Canadian French for Better Travel, Montréal, Ulysse, 2011 (troisième édition), 186 p. Ill.

Raymond Bock, Maxime, les Noyades secondaires. Histoires, Montréal, Le Cheval d’août, 2017, 369 p.

Tremblay, Michel, C’t’à ton tour, Laura Cadieux. Roman, Montréal, Éditions du jour, coll. «Romanciers du jour», R-94, 1973, 131 p.