«De l’extérieur, on n’y voyait que du feu, et du carton bien découpé.»
Belle virgule, qui fait le zeugme moins zeugme.
Stéphanie Kaufmann, Ici et là. Récits, Québec, L’instant même, 2009, 110 p., p. 56.
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
«De l’extérieur, on n’y voyait que du feu, et du carton bien découpé.»
Belle virgule, qui fait le zeugme moins zeugme.
Stéphanie Kaufmann, Ici et là. Récits, Québec, L’instant même, 2009, 110 p., p. 56.
«Elle avait la superbe des filles qui font de la gymnastique à Lévis.»
Sophie Létourneau, Polaroïds. Récits, Montréal, Québec Amérique, coll. «Littérature d’Amérique», 2006, 166 p., p. 31.
D’une part, ses études. Ses cours de philosophie au cégep n’ont pas laissé à l’Oreille tendue les souvenirs attendus. Elle en retient cependant un mot, weltanschauung, la vision du monde. (À dix-huit ans, ça sonne fort.)
De l’autre, sa bible, le Dictionnaire Bordas. Pièges et difficultés de la langue française de Jean Girodet, plusieurs fois réédité depuis 1981. Elle y trouve ceci à l’entrée deuxième : «En principe, second doit s’employer quand il y a seulement deux éléments, deuxième quand il y en a plus de deux» (éd. de 1988, p. 237).
Seconde Guerre mondiale ou Deuxième Guerre mondiale ? L’Oreille choisit la seconde expression. C’est dire si elle est optimiste.
[Complément du 29 juillet 2014]
Tous les grammairiens ne s’entendent pas là-dessus, il est vrai : «L’usage a toujours ignoré ces raffinements (que Littré contestait déjà)» (le Bon Usage, douzième édition, § 581 b).
En revanche, écrit @fbon sur Twitter, «ts correcteurs édition respectent».
Le débat reste ouvert.
[Complément du 6 novembre 2015]
«Radio-Canada présente la seconde et dernière saison de Série noire», écrit en titre le quotidien le Devoir du 5 novembre 2015 (p. B9). Un puriste pourrait lui reprocher de faire dans le pléonasme.
[Complément du 6 novembre 2015]
Réponse du quotidien :
[Complément du 17 février 2019]
Pareille distinction existerait-elle en norvégien ? On peut se poser la question en lisant Police, de Jo Nesbø, traduit par Alain Gnaedig :
«Ah merde !» Arnold s’était penché en avant. «Et en troisième lieu ?»
Harry fit signe à Nina qu’il voulait l’addition.
«Est-ce que j’ai parlé d’un troisième lieu ?
— Tu as dit “deuxième”, et pas “second”, comme si tu n’avais pas terminé ton énumération.
— Il va falloir que je fasse plus attention au choix de mes mots» (p. 336).
[Complément du 9 mars 2024]
La narratrice du Roman d’Isoline (2024), de David Turgeon, se tâte :
je ne sais pas encore, Rebecca, si j’écrirai seconde au lieu de deuxième, je connais la règle (enfin je sais que ce n’est pas une règle à proprement parler) mais je ne sais pas
[…]
ce n’était pas une troisième réplique, c’était l’écho de la deuxième
la seconde, en l’occurrence (p. 80-81)
[Complément du 15 novembre 2024]
Joli exemple dans la Presse du 14 novembre 2024 : «Le premier ministre, âgé de 67 ans, a franchi le seuil de la seconde moitié de son deuxième mandat.»
Références
Girodet, Jean, Dictionnaire Bordas. Pièges et difficultés de la langue française, Paris, Bordas, coll. «Les référents», 1988, 896 p. Troisième édition.
Grevisse, Maurice, le Bon Usage. Grammaire française, Paris-Gembloux, Duculot, 1986, xxxvi/1768 p. Douzième édition refondue par André Goose.
Nesbø, Jo, Police. Une enquête de l’inspecteur Harry Hole, Paris, Gallimard, coll. «Folio policier», 762, 2014, 670 p. Traduction d’Alain Gnaedig. Édition originale : 2013.
Turgeon, David, le Roman d’Isoline, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 186, 2024, 196 p.
Vous roulez trop vite ? Divers types de ralentisseurs sont là pour vous en empêcher.
Dans l’Hexagone, cette entrave est dite gendarme couché. Exemple : «Gendarmes couchés et ralentisseurs s’efforcent de lui compliquer la tâche» (Oreille rouge, éd. de 2005, p. 38).
Dans la Belle Province, on voit parfois policier dormant. Exemple : «Malgré la présence de policiers dormants, les bandits manchots continuent à sévir» (source inconnue).
Couchées ou endormies, les forces de l’ordre veillent. Qu’on se le dise.
[Complément du 23 octobre 2018]
À ralentisseur, gendarme couché et policier dormant, on peut préférer, plus simplement, dos d’âne : «Gonflement transversal de la chaussée» (Multidictionnaire de la langue française, cinquième édition, 2009). À Montréal, présence de l’anglais oblige, le dos d’âne devient parfois un doe down. (Merci à Les Perreaux pour la photo.)
How language evolves. #speedbump pic.twitter.com/1iKlPoCO6Q
— Les Perreaux (@perreaux) October 23, 2018
Référence
Chevillard, Éric, Oreille rouge, Paris, Éditions de Minuit, coll. «Double», 2007, 158 p. Édition originale : 2005.
«Un Français l’avait larguée pour des raisons grammaticales. Scandalisé par sa parlure, il lui reprochait, ainsi qu’à l’ensemble des Québécois, son inaptitude à accorder les compléments d’objet direct avec l’auxiliaire avoir. Désaccordée, la Folle avait rompu les relations franco-québécoises en quittant brusquement la couche de l’académicien.»
Danielle Phaneuf, la Folle de Warshaw. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2004, 193 p., p. 78.