De l’intellectuel et de l’expert

La semaine dernière, les médias québécois — les traditionnels comme les sociaux — ont été secoués par une brève polémique, bien peu estivale, sur un sujet délicat : le Québec est-il anti-intellectuel ou pas ?

Patrick Lagacé a ouvert les hostilités dans la Presse du 5 juillet en s’indignant des propos tenus par Wajdi Mouawad sur les ondes de France Culture en juillet 2009 : «généralisations», «énormités», «caricatures» (trois fois). Le dramaturge aurait été, ce jour-là, un «mange-Québécois». Pour Lagacé, la chose est entendue : contrairement à ce qu’affirmerait Mouawad, il est faux de dire que, dans leur ensemble, les Québécois sont anti-intellectuels.

Réponse de Marc Cassivi deux jours plus tard, qui partage globalement le point de vue de Mouawad : «Le Québec n’est pas seulement une société anti-intellectuelle. C’est une société profondément anti-intellectuelle.» Voilà qui a le mérite de la clarté.

Réponse à la réponse, de Patrick Lagacé, sur son blogue, le même jour. Il persiste et signe. Il en a, entre autres choses, contre le titre de l’article de son collègue, «Le Québec anti-intellectuel» : «C’est gros. C’est énorme. C’est trop gros, même. Le Québec est aussi anti-intellectuel. Il n’est pas qu’anti-intellectuel. Le rejet des idées, le mépris de l’intellectuel n’est pas une spécialité québécoise»; «le Québec n’est pas “profondément anti-intellectuel”. Un peu ? Peut-être. Aussi ? Profondément ? Jamais.» Ses arguments ne changent pas : «caricature» (deux fois), «généralisation outrancière».

Jean-François Lisée, lui, dans son blogue, penche nettement du côté de Lagacé contre Cassivi. Chiffres à l’appui, il entend démontrer que les intellectuels ont une forte présence dans la société québécoise : ils seraient souvent invités dans les médias.

De plus modestes canons — sur le plan du public touché — ont participé au débat. Catherine Voyer-Léger et Judith Lussier ont publié des textes sur leur blogue. L’Oreille tendue a mis en ligne un texte qu’elle avait donné à un collectif belge en 1998. Twitter a bruit de cette question pendant quelques heures.

Une chose devrait étonner : aucune de ces interventions n’a proposé de définition de ce qu’est un intellectuel, alors que ce devrait être précisément, aux yeux de l’Oreille, le fond du débat. En voici quelques-unes, tirées du Dictionnaire des intellectuels français de Jacques Julliard et Michel Winock (1997) :

«un homme d’esprit engagé d’une manière ou d’une autre, qu’elle soit directe ou indirecte, dans le débat civique»;

«Un homme ou une femme qui applique à l’ordre politique une notoriété acquise ailleurs»;

«La notion d’engagement a fini par être le critère permettant d’attribuer au savant, à l’écrivain, à l’artiste la qualification d’intellectuel.»

À partir de définitions comme celles-là, dans lesquelles la spécialisation, ou l’hyperspécialistion, est complètement secondaire, voire dangereuse, on peut reprendre le débat sur de nouvelles bases.

Pour Cassivi, Lagacé et Lisée, il y a une équivalence, au moins implicite, entre intellectuel et universitaire. Pour le premier, on ne les entend pas assez dans les médias; pour les autres, ce n’est pas vrai. Or cette équivalence ne va pas de soi.

D’une part, il y a des intellectuels hors de l’Université : au collège, dans la blogosphère, parmi les artistes.

D’autre part, tous les universitaires ne se définissent pas comme des intellectuels, au sens donné à ce mot par Julliard et Winock. Leur travail de spécialiste leur convient parfaitement et ils ne sentent pas le besoin de prendre position publiquement sur des questions qui ne relèvent pas de leur champ d’expertise ni de s’engager politiquement.

Ainsi, si Jean-François Lisée a raison de dire que des universitaires sont sollicités par les médias québécois, il se trompe quand il affirme que ces universitaires sont sollicités à titre d’intellectuels. Ce sont des experts que les médias invitent, et ils les invitent à condition qu’ils se plient à des règles implicites mais claires : l’expert médiatique est un spécialiste; il doit être concis et il doit avoir le sens de la formule; il est là pour donner son opinion de façon schématique. S’il a fait cela, il a rempli son contrat. (L’Oreille tendue ne crache pas dans la soupe : il lui arrive volontiers de se livrer à ce genre d’exercice.)

Un exemple ? La radio d’État invite un professeur d’université à expliquer la crise budgétaire grecque et l’impact de l’arrivée de Christine Lagarde à la direction du Fonds monétaire international. Il est interrogé par cinq personnes. Son intervention dure une petite dizaine de minutes et elle se termine, comme toujours, par «C’est tout le temps dont nous disposons». Un intellectuel ne peut pas travailler dans ces conditions. Un expert médiatique, presque.

Si l’intellectuel et l’expert médiatique ont des traits en commun — notamment le caractère public de leur réflexion —, deux choses les distinguent radicalement. L’expert médiatique travaille dans la courte durée, alors que l’intellectuel s’inscrit dans la longue durée : il a besoin de temps pour livrer le fruit de son travail. Il peut également avoir recours, dans certains cas, à un vocabulaire technique : tout ne s’explique pas avec les mots de la conversation quotidienne.

C’est à ce genre de rapport au savoir et à son expression que pensent manifestement Wajdi Mouawad et Marc Cassivi. Ils ont raison sur le fond : la société québécoise fait parfois place aux experts médiatiques, mais pas aux intellectuels, dont elle se méfie, et cela depuis fort longtemps.

En effet, l’intellectuel n’a pas bonne presse au Québec. Les médias, à l’exception du Devoir, ne lui offrent aucune tribune régulière où il lui serait possible de consacrer le temps nécessaire à une vraie réflexion. Tout n’est pas rose, en France, sur le plan de la vie intellectuelle, mais il y reste, par exemple à la radio d’État, des possibilités d’expression dans la durée (Du jour au lendemain, les Lundis de l’histoire, Place de la toile, etc.). Ces lieux-là n’existent plus au Québec. La démission de la radio et de la télévision d’État en cette matière aura eu des conséquences catastrophiques.

C’est pourquoi l’intellectuel québécois est de plus en plus forcé d’investir, voire d’inventer de nouveaux lieux de réflexion et d’expression. Sa survie est à ce prix.

P.-S. — Parler de la situation de l’intellectuel oblige toujours à revenir au rapport du Québec à la France et au statut de la langue parlée ici. L’Oreille tendue en disait un mot en 1998.

 

[Complément du 11 avril 2014]

Sur les rapports de l’intellectuel et de l’expert / du spécialiste / de l’universitaire, lus à la lumière de Michel Foucault, voir un excellent texte d’Alex Gagnon, «La disparition des “intellectuels”».

 

Références

Cassivi, Marc, «Le Québec anti-intellectuel», la Presse, 7 juillet 2011.

Julliard, Jacques et Michel Winock (édit.), Dictionnaire des intellectuels français. Les personnes. Les lieux. Les moments, Paris, Seuil, 1996, 1258 p.

Lagacé, Patrick, «Le Québec selon Wajdi Mouawad», la Presse, 5 juillet 2011.

Lagacé, Patrick, «Wajdi Mouawad, l’entrevue (et ma réponse à Marc)», blogue, Cyberpresse.ca, 7 juillet 2011.

Lisée, Jean-François, «Le Québec, anti-intello ? Wô Menute !», blogue, l’Actualité.com, 7 juillet 2011.

Lussier, Judith, «Parce que les intellos sont aussi des anti-populaires», blogue, les Persécutés, 8 juillet 2011.

Melançon, Benoît, «Un intellectuel heureux ?», dans Pour Jacques. Du beau, du bon, Dubois [Mélanges en l’honneur du professeur Jacques Dubois], Bruxelles, Éditions Labor, coll. «Espace Nord», 1998, p. 169-174. https://doi.org/1866/32050

Voyer-Léger, Catherine, «Pourquoi je ne suis pas Denise Bombardier» blogue, Détails et dédales, 8 juillet 2011.

Autopromotion 007

Ce matin, le 29 juin, entre 10 h et 11 h, on pourra tendre l’oreille à l’Oreille. Elle causera épistolarité au micro de Franco Nuovo à l’émission Sans préliminaires de la radio de Radio-Canada. Rediffusion le même jour entre 21 h et 22 h.

[Complément du 31 août 2011]

On peut (ré)entendre l’entretien ici (durant la deuxième heure).

Expérience notulienne

Le Notulographe, Philippe Didion, écrivait ceci le 29 mai : «il y a toujours à retirer d’une lecture a priori inutile». L’Oreille tendue, spontanément, partage ce point de vue. Elle se propose toutefois aujourd’hui de le tester sur le roman la Dague de Cartier de John Farrow (2009).

Peut-on retirer quelque chose de l’intrigue ? Ce n’est pas sûr. Avec l’aide du cardinal de Médicis de Monreale, Jacques Cartier, le «découvreur» du Canada, histoire de convaincre François Ier d’investir dans l’aventure coloniale nord-américaine, traficote un poignard amérindien, dès lors appelé «la dague de Cartier», qui passera de main en main dans des circonstances de plus en plus rocambolesques — c’est un euphémisme —, du XVIe au XXe siècle, son pouvoir magique aidant ou pas — c’est un brin confus — ses propriétaires successifs, au rang desquels il faut compter, outre François Ier, Samuel de Champlain, Étienne Brûlé, les frères Kirke, le roi d’Angleterre, le cardinal de Richelieu, Paul de Maisonneuve, Dollard des Ormeaux, l’explorateur Radisson — ce «voyou» (p. 183) —, une jeune États-Unienne kidnappée par des Amérindiens, la compagnie d’assurances Sun Life, un président de la Ligue nationale de hockey et ex-procureur au tribunal de Nuremberg, Clarence Campbell, un criminel de guerre français réfugié au Canada, Jacques de Bernonville, et Pierre Elliott Trudeau, le premier ministre du Canada, qui le donnera à une jeune femme en échange de renseignements permettant de retrouver les membres du Front de libération du Québec qui ont enlevé James Cross en octobre 1970, laquelle jeune fille, par une nuit noire, dans un cimetière au sommet de Montréal, finira par enterrer cet objet devenu maléfique dans la tombe de son propre père, assassiné avec ce poignard, le soir du 17 mars 1955, durant l’émeute entourant la suspension du joueur de hockey Maurice Richard — il se peut que l’Émeute ait eu lieu précisément à cause de la dague (p. 79 et 90) —, sous les yeux de Camillien Houde, l’ex-maire de Montréal, de Jacques de Bernonville et de Camille Laurin, futur ministre d’un des gouvernements de René Lévesque, lui-même personnage de l’intrigue, mais plus tard — ouf ! —, les uns et les autres ayant été acoquinés avec Maurice Duplessis, alors premier ministre de la Belle Province, personnage antisémite, licencieux et ivrogne, dont il n’est pas impossible qu’il ait collaboré dans cette complexe et néanmoins sordide affaire avec un groupe fasciste secret, l’Ordre de Jacques Cartier — suivez mon regard —, que traquent de rares policiers non corrompus, ceux dont se sont entourés, à la mairie de Montréal, Pacifique Plante et Jean Drapeau. Pour le dire d’une formule : Dan Brown ou Jack Bauer («plusieurs complots coexistaient au sein d’une conspiration plus vaste», p. 532) rencontre un manuel d’histoire du Canada. (On pardonnera à l’Oreille tendue d’avoir essayé, assez prosaïquement, de remettre un peu d’ordre chronologique dans ce roman qui s’y refuse.)

À défaut de retirer quelque chose de l’intrigue, peut-on tirer profit de la traduction de Jean Rosenthal ? (Sauf erreur, ce roman de John Farrow, contrairement à City of Ice [1999] et à Ice Lake [2001], d’abord parus dans leur langue originale puis traduits en français, n’a jamais paru en anglais.) Ce n’est pas plus facile. Le traducteur ayant remplacé au petit bonheur «dague» par «poignard», ou l’inverse, il est assez fréquent que l’accord en genre soit fautif (p. 572, 604 et 618). Les noms de lieu sont écorchés : la Gaspésie devenant «le Gaspé», comme dans «the Gaspé» (p. 321 et 369), le Parc Belmont est amputé de son article (p. 324), alors qu’on en ajoute un à Blue Bonnets (p. 368) et à Rivière-du-Loup (p. 369). On affuble le nom de Dollard des Ormeaux de deux traits d’union, comme s’il s’agissait de la ville de même nom, et Lambert Closse, qui a sa rue à Montréal, hérite d’un accent aigu final qui n’est pas à lui (p. 144). Au lieu de «CDC», il faudrait lire «CBC» (p. 550). Un «In your dreams» devient, littéralement, «Dans tes rêves» (p. 383). On découvre, non sans étonnement, l’existence d’«ordinateurs» dans un immeuble montréalais en 1955 (p. 422). Il n’y a pas de «tournoi final» au hockey, mais des éliminatoires (p. 28). Le réalisme linguistique, malgré un juron du cru, n’est pas une priorité du traducteur : «Si ces fils de putes s’imaginent qu’ils peuvent… Nom de Dieu ! ils feraient mieux de chier dans leur potage ! Maudit calice ! On va leur vomir dans la gueule, leur clouer le bec et les faire dégueuler par les trous de nez, ces enculés !» (p. 252) (Pour rappel : on est à Montréal, dans un poste de police, en 1955.) De même, «zapper» ne se pratiquait guère… en 1970 (p. 548). Certaines phrases ne manquent pas de cocasserie (involontaire) : «L’endroit devait donc être défendu, car les Iroquois devaient eux aussi le courtiser comme idéal… pour attaquer» (p. 141). Devant un problème particulier, Jean Rosenthal a une solution radicale mais simple : il ne traduit pas (p. 534).

Ni l’intrigue ni la traduction ne conviennent. La description de l’émeute de 1955, alors ? Non, toujours pas. L’auteur décrit une «guerre totale» (p. 43), voire une «révolution» (p. 54 et 57), qui ne concerne guère que les francophones de Montréal (p. 46 et 79), ce qui correspond à la vulgate richardienne depuis une trentaine d’années. Ce soir-là, c’est «l’histoire» qui s’écrit (p. 48), c’est «l’avenir politique d’un pays» qui est modifié (p. 15) : «à travers le hockey, c’était toute l’histoire culturelle de la société canadienne qui se jouait» (p. 16). On se situe bien au-delà du seul «Richard le Rocket» (p. 77 et 84). Le problème vient du fait que ce roman, si souvent lourdement réaliste, se trompe souvent sur les faits. Une bombe lacrymogène a explosé dans l’enceinte du Forum de Montréal, là où avait lieu le match du 17 mars; Farrow parle, lui, de «l’explosion sur la glace de boules puantes» (p. 39; voir aussi p. 58 et 526). Les canettes de bière existaient au Canada au milieu des années 1950, mais il est peu plausible, du fait de leur rareté, qu’elles aient servi de projectiles aux émeutiers (p. 40, 47 et 541). Personne n’a jamais avancé que ceux-ci avaient pu être 64 000 (p. 83); le nombre le plus souvent avancé est 10 000. Le 18 mars, quand il appelle ses partisans au calme, Maurice Richard le fait à la télévision et à la radio, pas seulement à la radio (p. 154-156). Peut-on sérieusement avancer que la Sun Life avait «parfois été aussi influente que l’Église» au Québec (p. 75) ? Bref, il y aurait eu des vérifications à faire; elles ne l’ont pas été.

Mais enfin, que reste-t-il à «retirer» de cette «lecture a priori inutile» ? Une seule chose, peut-être : écrire.

 

Référence

Farrow, John, la Dague de Cartier, Paris, Grasset, coll. «Grand format», 2009, 619 p. Pseudonyme de Trevor Ferguson. Traduction de Jean Rosenthal.

 

[Complément du 5 avril 2012]

L’original anglais a finalement paru deux ans après sa traduction : River City. A Novel, Toronto, HarperCollins, 2011, 845 p.

 

[Complément du 2 août 2013]

«S’il est nécessaire de consulter les bons ouvrages, il n’est pas inutile de parcourir les mauvais. Un bon livre fournit un ou plusieurs articles excellents; un mauvais livre aide à faire mieux» (Diderot, article «Encyclopédie», Encyclopédie, cité dans Laurent Loty et Éric Vanzieleghem, Esprit de Diderot. Choix de citations, Paris, Hermann, 2013, 157 p., p. 91).

 

[Complément du 2 décembre 2016]

Pour son personnage d’Émile Cinq-Mars, le romancier s’était inspiré du policier Jacques Cinq-Mars. Celui-ci vient de mourir à 96 ans.

 

[Complément du 24 avril 2020]

Dans ses entretiens radiophoniques avec Robert Mallet, Jean Paulhan avait quelque chose à dire là-dessus : «Les mauvais livres aussi sont nécessaires. Ce sont les plus excitants : ils donnent envie de les recommencer. Ils vous invitent à intervenir. Ils vous jettent en pleine littérature» (p. 73).

 

Référence

Paulhan, Jean, les Incertitudes du langage. Entretiens à la radio avec Robert Mallet, Paris, Gallimard, coll. «Idées», 226, 1970, 187 p. Suivi d’une note de Jean-Claude Zylberstein.

 

John Farrow, River City, 2011, couverture

Du jeu comme mode de vie

Quiconque suit l’excellente émission Place de la toile de France Culture a déjà entendu le mot gamification dans la bouche de son animateur, Xavier de la Porte (@xporte).

Gamification ?

Fabien Deglise (@fabiendeglise), dans le Devoir, parle de ludification (la traduction est bienvenue). Il s’agit de «l’art de transformer tout et rien en jeu», de l’assassinat d’Oussama ben Laden au viol dont est accusé Dominique Strauss-Kahn, cela afin «d’appréhender le complexe d’une époque en mutation». Ce phénomène répondrait «à la dictature de la mise à jour» et au «présentisme» — «l’incapacité à appréhender autre chose que l’instant présent, sans vision du futur ni perspective historique» — des réseaux sociaux (21-22 mai 2011, p. D4). À lire.

Proposition de moratoire 001

L’Oreille tendue peut-elle, avec tout le respect qui s’impose quand on s’adresse à une société d’État, suggérer à Radio-Canada d’interdire, avec la plus grande fermeté, l’utilisation, au début de n’importe quelle réponse à n’importe quelle question, de l’expression «Écoutez», parfaitement vide de sens à la radio (on n’y fait que ça, écouter) ? Pareille interdiction limiterait dramatiquement — il est vrai — le vocabulaire de la chroniqueuse économique de certaine émission (montréalaise) du matin.

P.-S. — On évitera bien évidemment de remplacer écoutez par ’garde.