Mike Bossy au cinéma

Tom Radford, Life after Hockey / la Vie après le hockey, 1989, cassette vidéo

En 1989, Tom Radford réalise pour la télévision le film Life after Hockey / la Vie après le hockey, sur un scénario de Michael Puttonen et Kenneth Brown d’après une pièce de théâtre de Kenneth Brown. D’une durée de 50 minutes, le film est produit par Andy Thomson pour Great North Productions Inc.

Sur la cassette vidéo, voici comment le film est présenté :

«Vivez toute la magie du hockey et des héros sur patins dans cette fantaisie unique ! Ken “Ring Rat” Brown rêve des idoles de son sport favori dans la Vie après le hockey. Obsédé du hockey, Ken voit son imagination se jouer de lui.

Le légendaire Maurice “Rocket” Richard, Kurt Browning, champion du monde de patinage artistique, et Glen Sather, l’entraîneur qui a mené l’Équipe Canada à une victoire dramatique en prolongation en 1984 contre les Soviétiques, viennent à tour de rôle rencontrer “Rat”. Mais est-ce bien un rêve ? Quand Glen Sather demande à Ken d’aider son pays, il ne peut le croire. Et finalement “Ring Rat” lui-même détient le record de tous les temps pour le plus grand nombre de buts comptés uniquement en rêve…»

Le Rat est donc un rêveur. Il prétend avoir marqué, en période supplémentaire, le but gagnant du Canada contre la République soviétique lors de la coupe Canada de 1984. Ce soir-là, il regardait le match des estrades de l’aréna de Calgary quand Michael Bossy a été blessé. Or Le Rat aurait ressemblé à Bossy (c’est Guy Lafleur qui le lui aurait dit). On lui fait enfiler son chandail et on l’assoit au banc de l’équipe canadienne, histoire de ne pas laisser les Soviétiques savoir que Bossy est blessé. Dans le feu de l’action, Glen Sather, l’entraîneur de l’équipe canadienne, est distrait et il envoie Bossy / Le Rat dans la mêlée, et c’est lui qui marque le but gagnant.

Mike Bossy a fait rêver beaucoup de monde. Il est mort aujourd’hui, à 65 ans.

P.-S.—Il est aussi question de Maurice Richard dans ce film. Cela est abordé dans le livre qu’a fait paraître l’Oreille tendue en 2006.

 

Référence

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.

Voltaire, gros naze animé

Voltaire dans la série animée Archer

Un ancien étudiant de l’Oreille tendue, désœuvré, se tourne vers Netflix, plus précisément vers la série d’animation Archer. Il y entend parler de Voltaire. Il prévient donc l’Oreille, qu’il sait friande de ce genre de manifestation du siècle des Lumières dans la culture populaire. (Merci.)

De quoi s’agit-il ? Au début du quatrième épisode de la douzième saison, «Photo Op» (en français «Coup de com’»), diffusé originellement sur FXX le 8 septembre 2021, on peut entendre l’échange suivant :

Archer : Who ever said acting was hard ?
— No one.
— Nobody ?
— Nobody.
Archer : Really ? I’m sure it was someone. Voltaire maybe ? That sounds right. Well, he was an idiot.

Traduction de l’audio :

Archer : Qui a dit que c’était dur d’être acteur ?
— Personne.
— Non, personne.
— Personne.
Archer : Sérieux ? J’suis pourtant sûr que quelqu’un l’a dit. Voltaire, peut-être ? Eh, j’crois qu’c’était Voltaire. Putain, quel gros naze.

Traduction en sous-titres :

Archer : Qui a dit que le ciné, c’était dur ?
— Personne.
— Personne.
— Personne.
Archer : Ah bon ? Ça m’étonne. Voltaire, peut-être ? Ça doit être ça. Il était trop con.

Voltaire a-t-il bel et bien dit que jouer était difficile ? La citation — si tant est que ce soit une citation — est bien imprécise.

Les concepteurs renvoient-ils à la préface des Scythes (1766) : «La pièce qu’on soumet ici aux lumières des connaisseurs est simple, mais très-difficile à bien jouer» ? Au Commentaire sur Corneille (1761) : «Cette scène est beaucoup plus difficile à jouer qu’aucune autre» ? (Merci à Tout Voltaire.) On ne le sait.

Une chose est sûre, cependant : Voltaire, lui qui aimait tant jouer au théâtre, que ce soit difficile ou pas, n’a pas que des amis, hier comme aujourd’hui.

 

Référence

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.

Du camp(e)

Joseph-Charles Taché, Forestiers et voyageurs, éd. de 2014, couverture

En 1863, Joseph-Charles Taché publie, dans les Soirées canadiennes, Forestiers et voyageurs. Études de mœurs. Le texte sera repris en livre en 1884.

Dans une note du premier chapitre, «La montée aux chantiers», il écrit ceci : «On appelle camp (le p se prononce ici), dans le langage des forestiers et des voyageurs canadiens, l’habitation, toujours plus ou moins temporaire, qu’on élève dans le bois. La signification s’étend aussi aux dépendances du logement, s’il en existe, et, par extension figurée, au personnel qui l’habite» (éd. de 2014, p. 26 n. 3). Le chapitre suivant, «Le camp d’un chantier», est consacré à la description d’un de ces camps.

Le dictionnaire numérique Usito donne une définition semblable : «Habitation rustique, traditionnellement en bois rond, construite en forêt et aménagée sommairement.» Cet aménagement sommaire rapproche le camp de la cabane et le distingue du chalet. Rien n’est dit de la prononciation du mot.

Ni Taché ni Usito n’indique que l’emploi de camp, prononcé campe, paraît plus fréquent dans les régions du Québec qu’à Montréal.

Exemple rimouskois : un poème de Marie-Hélène Voyer dans Expo habitat (2018) s’intitule «Le campe» (p. 19).

Exemples saguenéens :

«Le chalet est modeste. C’est un campe — le mot convient mieux — d’environ seize pieds par vingt, peut-être moins. Il y a une chambre à coucher et une pièce qui sert de cuisine, aménagée autour du poêle à bois, avec un coin salon. Pas d’électricité. Pas d’eau courante. Pas de toilettes non plus. Pour les besoins, c’est dehors. Pour l’eau, c’est dans la rivière en hiver ou la source en été. Pour l’éclairage, les chandelles. […] Bref, un chalet dont les murs ne sont pas isolés. Idéal sur trois saisons mais pas habitable en hiver» (Mon frère Paul, p. 128);

«La police voulait pas que les jeunes construisent des campes dans le bois, mais tout le monde s’en sacrait. Impossible de marcher plus qu’une heure dans le bois sans tomber sur un campe. Tous les flots de Chicoutimi pis de Chicoutimi-Nord s’en bâtissaient un pour passer leurs fins de semaine dedans. C’était comme les chalets de nos parents sur les monts Valin mais en plus le fun pis en moins beau. Les parents pis la police aimaient pas ça, ces histoires de campes là. Y avait rien de bon pour les jeunes dans ces places-là. C’était rien que de la boisson, de la drogue pis du sexe» (la Déesse des mouches à feu, p. 67).

À votre service.

P.-S.—Vous croyez reconnaître le Kramer de la série télévisée Seinfeld sur la couverture ci-dessus ? Le fils cadet de l’Oreille tendue est d’accord avec vous.

 

Références

Pettersen, Geneviève, la Déesse des mouches à feu. Roman, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 2014, 203 p.

Taché, Joseph-Charles, Forestiers et voyageurs. Mœurs et légendes canadiennes, texte conforme à l’édition de 1884, avec une postface, une chronologie et une bibliographie de Michel Biron, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact classique», 137, 2014, 267 p. Édition originale : 2002.

Villeneuve, Marité, Mon frère Paul. Roman, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 382 p.

Voyer, Marie-Hélène, Expo habitat, Chicoutimi, La Peuplade, 2018, 157 p.

Perplexité linguisticocommerciale du jour

Doordash, publicité, 7 avril 2022

Devant la publicité ci-dessus, l’Oreille tendue se demande s’il vaut vraiment la peine de faire une «première commande» auprès de ce service de livraison de nourriture. Quel serait l’intérêt, pour elle, d’«obtenir 0 $ de frais de livraison» ? Ne rien obtenir, cela peut-il être un but dans la vie ?

Tant de questions, si peu d’heures.

Swift à toutes les sauces

En 1726 paraît Gulliver’s Travels de Jonathan Swift. Ces voyages imaginaires ont connu une fortune considérable, notamment au cinéma et à la télévision.

C’est aussi vrai du dessin d’humour, dans lequel on aime bien rejouer la scène où Lemuel Gulliver, sur l’île de Lilliput, se réveille couché sur le dos, retenu par des câbles. Le 1er décembre 2018, André-Philippe Côté a ainsi mis en scène le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford. Le 9 novembre 2020, Michael de Adder appliquait le même traitement au 45e président des États-Unis.

Grâce au magnifique site Wikia La BD de journal au Québec, l’Oreille tendue découvre une publicité illustrée parue dans la Presse le 8 mai 1943, en pleine Deuxième Guerre mondiale. Il s’agit d’encourager les lecteurs du quotidien montréalais à participer à l’effort de guerre et à acheter des Obligations de la Victoire : tout effort individuel, même modeste, contribuera à financer «la machine de guerre la plus puissante de l’histoire du monde».

Publicité pour les Obligations de la Victoire, la Presse, 8 mai 1943

La littérature et le dessin, armes de guerre ?

P.-S.—Oui, vous avez bien lu, l’Oreille tendue évoquait la caricature de Côté dans son livre Nos Lumières (2020).

 

Référence

Melançon, Benoît, Nos Lumières. Les classiques au jour le jour, Montréal, Del Busso éditeur, 2020, 194 p.