D’hier à today

Ronald King, dans la Presse du 26 juin 2010 :

Dites Roger…

Vous avez peut-être remarqué, comme moi, que dans la publicité de Coca-Cola traduite dans une maison québécoise, on nous parle de Roger Milla, avec Roger prononcé à l’anglaise. Or, Milla est camerounais et francophone. À la télé française, on parle de Roger à la française.

Il s’agit d’un cas de paresse et d’ignorance crasses. On aurait pensé que quelqu’un dans la maison aurait fini par comprendre et fait la correction avant la Fête nationale du Québec. Mais non.

Colonisés…

André Belleau, dans la revue Liberté en mai-juin 1980 :

pourquoi Bernard Derome tient-il tant à montrer qu’il sait l’anglais ? Pour être plus précis, qu’est-ce qui le fait, au Téléjournal, prononcer infailliblement «Rââbeurte Enn’drusse» les mots «Robert Andras» écrits sur une dépêche ? Ou «Pi-ss-bi-dji-mm» pour P.S.B.G.M. ? Et «Aille-âre-ré» toutes les fois qu’il lit I.R.A. ? C’est à ce point que ma mère, qui ignore l’anglais, manque chaque soir la moitié du Téléjournal.

[…]

Peu importe comment on essaie d’élucider l’effet Derome, il demeure, vu son caractère général, constant, et la façon dont il modifie la relation transactionnelle émetteur-auditeur, une manifestation indubitable de colonisation culturelle (éd. de 1986, p. 109 et p. 114)

Plus ça change…

 

Références

Belleau, André, «L’effet Derome ou Comment Radio-Canada colonise et aliène son public», Liberté, 129 (22, 3), mai-juin 1980, p. 3-8; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Y a-t-il un intellectuel dans la salle ? Essais, Montréal, Primeur, coll. «L’échiquier», 1984, p. 82-85; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Papiers collés», 1986, p. 107-114; repris dans Laurent Mailhot (édit.), l’Essai québécois depuis 1845. Étude et anthologie, Montréal, Hurtubise HMH, coll. «Cahiers du Québec. Littérature», 2005, p. 187-193; repris, sous le titre «L’effet Derome», dans Surprendre les voix. Essais, Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact», 286, 2016, p. 105-112. https://id.erudit.org/iderudit/29869ac

King, Ronald, «En route vers les octavos de final…», la Presse, 26 juin 2010, cahier Sports, p. 5.

Progrès ?

«Menthez pas ça», conseillent les panneaux de McDonald à Montréal.

Un journaliste de la Presse n’en peut plus des publicités télévisées mettant en vedette Élyse Marquis (Swiffer) et François Massicotte (Sponge Towel). Dans quelle catégorie ranger icelles si on les trouve pénibles ? Le «malaisant» (22 mai 2010, cahier Arts et spectacles, p. 8).

Qu’une langue évolue, rien de plus naturel. On a cependant le droit de grincer des dents à l’occasion — d’autant que ça ne change rien à l’affaire : on n’arrête pas le progrès.

Mot-valise du jour

Pour des raisons inexplicables, Apple a des détracteurs, permanents ou temporaires. Ils viennent de trouver une nouvelle façon de s’en prendre à la Pomme, en rebaptisant la compagnie Appholes (Apple + assholes). Le mot viendrait de Jon Stewart dans son émission télévisée, The Daily Show, du 28 avril.

L’Oreille tendue admire la création, mais elle compatit (presque) avec la victime (un tout petit peu).

Patinoires intérieures

Le gardien de but des Canadiens de Montréal a fait preuve d’une belle alacrité dans la victoire des siens ce lundi. Il a en effet éclipsé les (redoutables) marqueurs des Capitals de Washington.

À un moment, Benoît Brunet, un des commentateurs du match au réseau de télévision RDS, a affirmé sans hésitation : «Jaroslav Halak est en train de jouer dans la tête des joueurs des Capitals.» Traduction libre : il les arrête, il les arrête, il les arrête — à force de les arrêter, il va les faire réfléchir, et trop réfléchir, ce qui va leur nuire dans la suite des séries éliminatoires.

L’image est forte : Halak, avec tout son équipement (patins, jambières, masque, gant, biscuit, etc.), dans la tête d’Ovechkin. On imagine sans mal que ça puisse ralentir Alexandre le Grand.

À suivre ce soir.

P.-S. — Sur le même sujet, le Journal de Montréal titrait, le 27 avril, «Halak majstrovský» («magistral en slovaque», expliquait-on entre parenthèses). À défaut de journalistes, ce quotidien utilise Google traduction.

 

[Complément du 22 janvier 2016]

Il n’y a pas que les opposants à pouvoir jouer dans votre tête : «On jouait très bien, je pense à la partie contre Los Angeles où Jonathan Quick a été extraordinaire, mais les défaites se sont mises à nous jouer dans la tête» (la Presse+, 22 janvier 2016).

Regret sportif

Victoire des Canadiens hier soir. En troisième période, sauf erreur de la part de l’Oreille tendue, l’entraîneur de l’équipe, Jacques Martin, n’a pas fait jouer du tout Marc-André Bergeron et Sergei Kostitsyn, et presque pas Benoît Pouliot et Glen Metropolit. En termes de hockey, cela s’appelle couper son banc (ne pas se servir de tous les joueurs qui se trouvent sur icelui). Or aucun commentateur, à la télévision, n’a employé l’expression.

Les traditions se perdent.

 

[Complément du 26 avril 2010]

Claude Quenneville, à la radio de Radio-Canada, racontait tout à l’heure que Scotty Bowman, l’ex-entraîneur des Canadiens de Montréal, avait un jour demandé à un employé du Forum, là où jouait l’équipe, de raccourcir (à la scie) le banc de l’équipe adverse, les Bruins de Boston, histoire de les embêter pendant un match. Couper son banc, mais au sens littéral.