Autopromotion 865

«Machines de théâtre», dixième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1772, première section, planche V

La 677e livraison de XVIIIe siècle, la bibliographie de l’Oreille tendue, est servie.

La bibliographie existe depuis le 16 mai 1992. Elle compte 78 800 titres.

À partir de cette page, on peut interroger l’ensemble des livraisons grâce à un rudimentaire moteur de recherche et soumettre soi-même des titres pour qu’ils soient inclus dans la bibliographie.

Illustration : «Machines de théâtre», dixième volume des planches de l’Encyclopédie, Paris, 1772, première section, planche V

Ken Dryden avait raison (pas Gary Bettman)

Ken Dryden, Game Change, 2017, couverture

«A hit to the head is a bad thing

Ken Dryden (1947-2025) a eu une vie professionnelle bien remplie. Il a été gardien de but pour les Canadiens de Montréal — c’est du hockey —, président des Maple Leafs de Toronto — bis —, député au parlement fédéral, et bien d’autres choses encore. Et il a écrit des livres.

The Game. A Thoughtful and Provocative Look at a Life in Hockey a paru en 1983. Il a été plusieurs fois réédité, notamment pour des «éditions anniversaire». Il a été traduit en français, d’abord sous le titre l’Enjeu (1983), puis sous celui de le Match (2008). C’est son ouvrage le plus célèbre.

Dryden a en pourtant publié d’autres, parmi lesquels : Home Game. Hockey and Life in Canada (1989, avec Roy MacGregor), Scotty. A Hockey Life Like no Other (2019, voir ici), The Series. What I Remember, What it Felt Like, What it Feels Like Now (2022, voir ), The Class. A Memoir of a Place, a Time, and Us (2023, voir de ce côté).

Son meilleur est probablement Game Change. The Life and Death of Steve Montador and the Future of Hockey (2017). Dryden s’y attaque à un problème auquel il a consacré beaucoup de textes dans les dernières années de sa vie : les effets à long terme des coups à la tête sur les joueurs de hockey. Il l’aborde de plusieurs façons.

Son point de départ est la carrière d’un défenseur de la Ligue nationale de hockey, Steve Montador, mort à 35 ans (1979-2015). Victime de nombreuses commotions cérébrales, il souffrait d’encéphalopathie traumatique chronique (CTE, chronic traumatic encephalopathy) au moment de sa mort. Dryden ne l’a jamais rencontré, mais le portrait qu’il en dresse, après avoir interrogé des membres de sa famille, des amis et des coéquipiers, est captivant.

Montador n’était pas une vedette, loin de là : jamais repêché, il faisait généralement partie de la troisième paire de défenseurs pour les nombreuses équipes avec lesquelles il a joué, celle qui joue le moins de minutes par match. C’était un joueur d’équipe toujours prêt à défendre ses coéquipiers, un maniaque de l’entraînement, un fonceur. Hors de la glace, il était curieux, enjoué, bavard, énergique, drôle — avant de sombrer dans la dépression durant les dernières années de sa vie, celles où il a ressenti de plus en plus violemment les effets de nombreuses commotions cérébales. Les circonstances de sa mort sont peu claires, mais il consommait nombre de drogues et de médicaments à ce moment-là.

Son parcours est comparé à celui de joueurs qui ont aussi été victimes de coups à la tête, au point de mettre un terme à leur carrière — Keith Primeau, Marc Savard, Clarke MacArthur — ou de devoir l’interrompre pendant de longues périodes — Sidney Crosby. Montador n’est pas du tout un cas isolé. Dryden ne se sert jamais de son propre passé d’athlète; ce sont les autres qu’il veut mettre en lumière.

Dryden aimait les larges panoramas. Dans Game Change, il consacre plusieurs pages passionnantes à l’histoire du hockey et à l’évolution de ses règlements, ainsi qu’à la recherche scientifique sur l’encéphalopathie traumatique chronique et d’autres maladies nées de coups à la tête chez les sportifs de haut niveau.

L’enchevêtrement de ces points de vue — le personnel, le sportif, le médical — est parfaitement maîtrisé. Dryden, qui pouvait parfois être assez pataud sur le plan du style, ne l’est guère ici. Il se permet même une comparaison particulièrement enlevée entre les discussions de commentateurs sportifs et un sketch des Monthy Python (p. 323-326).

L’auteur dépasse le seul constat pour proposer deux pistes de solution à ce qu’il considère une menace profonde quant à l’avenir du hockey. Tout contact avec un joueur qui n’a pas la rondelle devrait entraîner une punition automatique (fini le temps où un joueur devait «compléter sa mise en échec» coûte que coûte). Tout coup à la tête, accidentel ou pas, devrait aussi entraîner une punition automatique; cela inclut les coups de poings donnés durant une bagarre. Ces deux changements à l’interprétation des règlements n’auraient pas constitué une révolution hockeyistique mais une réforme nécessaire. Ils auraient dû être appliqués pour protéger les joueurs d’eux-mêmes.

La démonstration de Ken Dryden dans Game Change et ses solutions sont convaincantes. Malheureusement, Dryden, en indécrottable optimiste, croyait que le président de la Ligue nationale de hockey depuis 1993, Gary Bettman, allait agir en ce sens. Il se trompait complètement : depuis la parution du livre en 2017, la Ligue n’a rien fait de significatif pour mettre fin au fléau des coups à la tête.

On risque d’attendre encore longtemps. Pourquoi ? «Change is a nuisance. It takes time, costs money, and create uncertainty» (p. 272; «Le changement embête. Il demande du temps, il coûte de l’argent et il crée de l’incertitude»). Pour l’imposer, il faut du courage.

 

Référence

Dryden, Ken, Game Change. The Life and Death of Steve Montador and the Future of Hockey, Toronto, Signal, McClelland & Stewart, 2017, 357 p.

Une roue peut en cacher une autre

Laurence La Palme, Jour de clarté, 2025, couverture

Soit cette phrase, tirée d’un roman d’espionnage de Laurence La Palme — c’est un pseudonyme —, Jour de clarté (2025) : «Puis il donna un coup de roue et nous nous retrouvâmes sur un chemin forestier» (p. 127).

L’homme qui conduit la voiture dont il est question n’a frappé personne avec une de ses quatre roues. Ce «coup de roue», venu de l’anglais, est plutôt un «coup de volant» («wheel»).

À votre service.

 

Référence

La Palme, Laurence, Jour de clarté. Roman. Tome 1, Montréal, Le Cheval d’août, 2025, 140 p.

Curiosité voltairienne (et autoroutière)

Sébastien Bailly, Autoroute, 2025, couverture

«Tu te souviens que ce dont chacun préfère parler, quand il n’y a rien à dire, c’est du temps qu’il fait. Cela n’engage à rien, tout le monde est d’accord sur le temps qu’il fait, un peu moins sur celui qu’il fera. Cela permet de sonder chez un inconnu sa sensibilité aux affaires courantes de ce monde : le réchauffement climatique, l’extinction des espèces, la fin de l’humanité. Si chacun restait chez soi et cultivait son jardin, on n’en serait pas là. Mais il a fallu se lancer sur les pistes à faire décoller les avions, et partir à la conquête de l’amour sur les autoroutes. Voilà ce qui provoque l’effondrement du monde, et les dinosaures riront bien de notre niaiserie lorsqu’ils apprendront comment nous avons disparu. Parce que tel que c’est parti, ils réapparaîtront un jour ou l’autre : la vie est un cycle infini.»

Sébastien Bailly, Autoroute, Paris, Le Tripode, 2025, 175 p., p. 59-60.

 

Les derniers mots de Candide (1759), le conte de Voltaire, sont : «Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin.»

 

Voltaire est toujours bien vivant.

Autopromotion 864

Épistolaire, 51, 2025, couverture

Depuis la nuit des temps, l’Oreille tendue collabore à Épistolaire, la revue de l’Association interdisciplinaire de recherches sur l’épistolaire. De sa chronique, «Le cabinet des curiosités épistolaires», elle a tiré un recueil en 2011, Écrire au pape et au Père Noël.

La 51e livraison d’Épistolaire vient de paraître (2025, ISSN : 2109-1358). L’Oreille y parle de quelques destinataires inattendus.

 

Table des matières

Haroche-Bouzinac, Genevière, «Avant-propos», p. 7.

 

«Dossier. George Sand, une vie en correspondance»

Diaz, Brigitte, «Introduction. Tout un monde dans une correspondance», p. 11-22.

 

«George Sand à la lettre»

Bodin, Thierry, «George Sand en correspondance», p. 25-42.

Diaz, José-Luis, «L’intime par correspondance», p. 43-59.

 

«Être écrivain à distance»

Mollier, Jean-Yves, «George Sand et Michel Lévy, ou comment naît une collaboration littéraire entre auteur et éditeur», p. 63-72.

Diaz, Brigitte, «Quand Nohant parle à Guernesey… La correspondance Sand-Hugo», p. 73-87.

Didier, Béatrice, «Réseaux épistolaires et création. Autour des Maîtres sonneurs», p. 89-96.

Ponzetto, Valentina, «George Sand dramaturge à la lumière de sa correspondance», p. 97-107.

 

«L’amitié par correspondance»

Dussault, Annick, «Une amitié filiale. La correspondance entre George Sand et Eugène Lambert», p. 111-119.

Bui, Véronique, «“Quelque chose de providentiel entre Dieu, vous et moi.” La correspondance entre George Sand et Edmond Plauchut», p. 121-132.

Genevray, Françoise, «George Sand  et ses corresponds suisses», p. 133-144.

 

«Une voix dans son siècle»

Fayolle, Azélie et Clémence Hovelaque, «Du féminisme à la lettre ? Les saint-simoniennes dans la correspondance de George Sand», p. 147-158.

Rivière, Carole, «La correspondance politique de George Sand : réseaux, lettres inédites et humanités numériques», p. 159-168.

 

«Perspectives»

Draux, Laura, «Les correspondances franco-italiennes de la poétesse Paolina Secco-Suardo Grismondi. L’Auctoritas oubliée des femmes de lettres et la réhabilitation par l’épistolaire», p. 173-183.

Dziub, Nikol, «L’art de se distinguer : Marie Bashkirtseff telle qu’en ses lettres de lectrice», p. 185-195.

Hendrycks, Éric, «L’usage de l’espagnol dans la correspondance de Barbey d’Aurevilly avec Trebutien», p. 197-203.

Guiot, Vincent, «Renée Irana Frachon (1881-1983). Un portrait en correspondances», p. 205-217.

Pesenti Rossi, Érik, «La correspondance Mario La Cava-Fortunato Seminara. Entre amitié et ambiguïtés», p. 219-232.

Noël Lemaître, Christine, «La correspondance comme moyen de débat philosophique. L’exemple du couple Arendt-Blücher», p. 233-242.

Begliuomini, Miriam, «“L’infini du bleu de midi.” Cinq lettres inédites de Walter Benjamin à Gabriel Audisio», p. 243-255.

 

«Chroniques»

Diaz, Brigitte, «État de la question de la correspondance de George Sand», p. 259-273.

Lubin, Georges, «Pourquoi et comment publie-t-on une Correspondance ?», p. 275-279. Texte paru dans Présences de George Sand, no 4, novembre 1978.

Melançon, Benoît, «Le cabinet des curiosités épistolaires», p. 281-283.

 

«Recherche»

«Comptes rendus», p. 287-319.

Benoît Melançon, Écrire au pape et au Père Noël, 2011, couverture