Langue de puck — Deuxièmes compléments

Durant les séries éliminatoires de 2013 de la Ligue nationale de hockey, l’Oreille tendue a proposé à ses bénéficiaires un «Dictionnaire des séries». L’année suivante, elle en a tiré un petit livre, Langue de puck. Elle savait déjà qu’elle n’avait pas tout couvert, d’où une première salve de compléments. Ci-dessous, une deuxième salve, pas une seconde.

La campagne régulière est terminée; le tournoi printanier commence. Les équipes qui restent se sont taillé une place en séries, mais ce n’est pas assez, car, dans le détail, il faut toujours faire un vainqueur : il n’y aura pas de verdict nul. Il faut une équipe gagnante et personne ne souhaite s’incliner, voire se faire déculotter. Voilà pourquoi une défense hermétique est recommandée. Le tenant du titre n’a qu’à bien se tenir.

Il faudra jouer avec intensité, couper les lignes / couloirs de passe et les lignes/ couloirs de tir, se soucier de son positionnement, servir des passes correctes, appuyer l’attaque quand c’est nécessaire, histoire d’alimenter ses coéquipiers, ne pas jouer mollement. Ouvrir la marque simplifie toujours la vie d’une équipe. Par la suite, dans la mesure du possible, il faut creuser l’écart. Quoi qu’il en soit, il faut dicter l’allure du match. C’est ainsi qu’on se place sur le chemin / le sentier de la victoire.

Chaque formation devra compter sur des porteurs du disque qui soient mobiles (immobiles, on ne voit pas bien à quoi ils serviraient). Les unités spéciales auront un rôle crucial à jouer : une équipe qui ne survit pas au jeu de puissance de ses adversaires a peu de chance de l’emporter. Il faudra savoir quand se porter à l’attaque et, inversement, quand rentrer au banc, qu’on y soit rappelé ou pas (les présences qui s’étirent, ce n’est jamais bon).

On n’oubliera pas qu’il y a plusieurs sauts au hockey. Sauter sur un retour de lancer, c’est bien. Faire sauter les patins, non. Sauter des présences : voilà qui est ennuyeux.

Pour terminer, une vérité restera incontournable : un défenseur peut-être le quatrième attaquant; un joueur d’avant ou le gardien peut être un troisième défenseur; il n’est de deuxième gardien qu’en cas d’extrême urgence. Vaut mieux pas.

 

Référence

Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014), couverture

Accouplements 87

«Love», Thomas Rowlandson, 12 août 1785

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Les lecteurs aime(rai)nt l’amour. C’est du moins ce que pensent les narrateurs d’Anatole France et de Diderot.

France, Anatole, la Révolte des anges, dans Œuvres, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 406, 1994, tome IV, p. 643-838. Édition établie, présentée et annotée par Marie-Claire Bancquart. Édition originale : 1914.

Où il est parlé d’amour; ce qui plaira, car un conte sans amour est comme un boudin sans moutarde; c’est chose insipide (p. 675).

Diderot, Denis, Jaques le fataliste et son maître, Paris et Genève, Droz, coll. «Textes littéraires français», 230, 1976, clxiii/501 p. Édition critique par Simone Lecointre et Jean Le Galliot.

Et puis, Lecteur, toujours des contes d’amour; un, deux, trois, quatre contes d’amour que je vous ai faits, trois ou quatre autres contes d’amour qui vous reviennent encore, ce sont beaucoup de contes d’amour. Il est vrai d’un autre côté que puisqu’on écrit pour vous il faut ou se passer de votre applaudissement, ou vous servir à votre goût, et que vous l’avez bien décidé pour les contes d’amour. Toutes vos nouvelles en vers ou en prose sont des contes d’amour; presque tous vos poëmes, élégies, églogues, idylles, chansons, épitres, comédies, tragédies, opéra, sont des contes d’amour; presque toutes vos peintures et sculptures ne sont que des contes d’amour. Vous êtes aux contes d’amour pour toute nourriture depuis que vous existez, et vous ne vous en lassez point. L’on vous tient à ce régime et l’on vous y tiendra longtemps encore, hommes et femmes, grands et petits enfans, sans que vous vous en lassiez. En vérité, cela est merveilleux (p. 238).

On ne sait si, dans le «régime» de Diderot, le boudin et la moutarde sont admis.

 

Illustration : «Love», Thomas Rowlandson, 12 août 1785, New York, Metropolitan Museum

Les zeugmes du dimanche matin et d’Anatole France

Saint Georges terrassant le dragon, Martin Schongauer

«Un tel fait n’est pas unique et l’on trouve dans les livres plusieurs histoires de dragons très féroces. Ces monstres se rencontrent principalement dans les cavernes, aux bords des eaux et de préférence chez les peuples païens» (p. 57).

«Ceinte de remparts, pleine de casernes et d’arsenaux, elle avait l’air martial et désolé» (p. 108).

«Très haut de taille et de pensée, il avait un respect de lui-même et d’autrui qui se manifestait par une froide politesse ainsi que par une redingote noire très mince et un chapeau de haute forme, dont sa personne se montrait émaciée et sublimée» (p. 168).

Anatole France, l’Île des Pingouins, dans Œuvres, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque de la Pléiade», 406, 1994, tome IV, p. 1-248. Édition établie, présentée et annotée par Marie-Claire Bancquart. Édition originale : 1908.

 

Illustration : Saint Georges terrassant le dragon, Martin Schongauer, 1470-1490, Rijksmuseum, Amsterdam

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autopromotion 291

Mediapart, 8 avril 2017, manchetteMediapart a récemment envoyé à Montréal le journaliste Antoine Perraud pour essayer de comprendre l’«ontologie du “justintrudeauïsme”». Son article vient de paraître. On peut y lire quelques propos de l’Oreille tendue sur la langue du premier ministre du Canada. (Ce n’est pas la première fois qu’elle se livre à l’exercice.)

Pas de «gentleman trappeur» ici, ni de confusions comme celles de la journaliste française (fictive) Sandrine Rambalde-Cochet de l’émission À la semaine prochaine : Antoine Perraud a bien fait ses devoirs.

P.-S. — On a longtemps pu entendre Antoine Perraud à France Culture. L’Oreille pleure encore la disparition de son émission Tire ta langue.