Puisque vous le dites

Samuel Cantin, Phobies des moments seuls, 2011, p. 147

Soit les deux échanges suivants, sur Twitter.

1.

@oniquet : «Fred n’est plus très jeune, mais il est une force de la nature.»

@kick1972 : «Fred a à peu près mon âge donc IL EST TRÈS JEUNE TU SAURAS.»

2.

@TigrouMalin : «S’asseoir sur la banquette du passager un pied sur le gaz en plus.»

@kick1972 : «J’étais passager vous saurez !».

Donc : l’expression tu sauras / vous saurez.

Écartons d’abord une chose : ce n’est pas un lagacisme, même si elle est utilisée dans les deux exemples ci-dessus par la même personne, Patrick Lagacé (@kick1972).

Il s’agit d’une expression commune. Elle marque la contradiction, et une contradiction forte. Traduction libre : Vous croyez cela ? Eh bien, vous vous trompez pas à peu près.

C’est toujours bon à savoir.

 

[Complément du 16 juillet 2013]

Existe aussi sous la forme si tu veux savoir. Exemple, tiré d’Alexis, plonge et compte ! d’Yvon Brochu (1989) : «…je suis plus fort que tu penses, si tu veux savoir !» (p. 26).

 

[Complément du 17 juillet 2023]

Exemple romanesque, dans Kukum (2019), de Michel Jean : «Tu crois qu’on se tourne les pouces au campement ? On travaille autant que vous autres, tu sauras» (p. 65).

 

Illustration : Samuel Cantin, Phobies des moments seuls. Les carnets du docteur Marcus Pigeon, Montréal, Éditions Pow Pow, 2011, 157 p., p. 147.

 

Références

Brochu, Yvon, Alexis, plonge et compte !, Saint-Laurent, Pierre Tisseyre, 1989, 145 p. Illustrations de Daniel Sylvestre.

Jean, Michel, Kukum, Montréal, Libre expression 2019, 222 p.

Dictionnaire des séries 45

À l’origine, le hockey se pratiquait en extérieur, parfois sur le rond. Le sport en a gardé un lien intime avec la faune et la flore.

Un gardien qui tombe à genoux en écartant les jambes de chaque côté de lui au ras de la glace pratique le style papillon. Une petite équipe aurait avantage à se grossir, si possible avec du bœuf de l’Ouest.

Que fait le même gardien quand, devant sa cage, il essaie de subtiliser la rondelle à un adversaire ? Tel un pêcheur, il veut la harponner.

Le geste pourra être utile devant un compteur naturel. S’il s’agit d’un pied de céleri (la Presse, 14 mai 2011, cahier Sports, p. 2), ça ne devrait pas être nécessaire.

 

[Complément du 7 décembre 2020]

Patrick Roy a beaucoup fait pour la propagation du style papillon. En 1995, l’échange qui l’a fait passer des Canadiens de Montréal à l’Avalanche du Colorado a eu des effets prolongés et inattendus. D’où ce joli titre de la Presse+ de samedi dernier. Bravo.

«L’effet papillon», la Presse+, 5 décembre 2020

 

[Complément du 18 juin 2025]

En 2009, voulant contribuer à une «phénoménologie de l’angoisse» (p. 234), Charles Le Blanc publie «Kierkegaard et l’art de garder les buts au hockey». Il consacre quelques passages de cet article au style papillon. Citons celui-ci : «Cette façon de tomber, les jambes filant vers les angles et les bras se déployant pour couvrir le haut du filet est, en soi, un style angoissé. Le gardien n’affronte pas l’objet de sa peur (le disque), mais attend passivement qu’il le frappe dans ce mouvement caractéristique d’affaissement de l’individu sur lui-même qui est un trait de l’angoisse» (p. 234). Vous y penserez en regardant le prochain match.

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

 

Référence

Le Blanc, Charles, «Kierkegaard et l’art de garder les buts au hockey», Normand Baillargeon et Christian Boissinot (édit.), la Vraie Dureté du mental. Hockey et philosophie, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. «Quand la philosophie fait pop !», 2009, p. 231-242.

Néologie littéraire du mercredi matin

On connaissait la chick lit. Selon The Atlantic, cette forme littéraire gyno-urbaine serait désormais remplacée par la farm lit : les jeunes héroïnes quitteraient la ville pour la campagne. En Australie, on serait plutôt passé de la chick lit à la chook lit (chook y signifiant chicken [poulet]).

Le mot twittérature (la littérature par / sur Twitter) est devenu suffisamment commun pour que puisse exister un Institut de twittérature comparée.

Il n’est pas sûr qu’il en aille de même pour narcolittérature. La 52e livraison de la revue l’Inconvénient contient un article de Jorge Volpi sur ce «nouveau stéréotype» pour désigner un genre pratiqué en Colombie et au Mexique.

On n’arrête pas le progrès.

Dictionnaire des séries 44

Forum de Montréal (1924)

À l’aréna, tout le monde n’est pas égal.

Dès son ouverture, le Forum de Montréal, là où jouaient les Canadiens, a eu une section où les billets étaient peu chers. Par antiphrase, on l’appelait la loge des millionnaires.

Dans la loge des millionnaires
Vous pourrez la voir
(Léo LeSieur, «Ah ! le hockey», chanson, 1930)

Parmi les sièges plus coûteux, il y a eu les blancs.

Pour tous ceux dans les blancs qui ont fois deux payé
Les billets travaillant deux jours pour les acheter
(Vilain Pingouin, «Les Habitants (GO Habs GO !)», chanson, 2009)

On a réglé ce problème de discrimination potentielle en passant du Forum au Centre Molson, devenu le Centre Bell : tous les sièges sont chers.

 

[Complément du 5 février 2014]

Les 57 textes du «Dictionnaire des séries» — repris et réorganisés —, auxquels s’ajoutent des inédits et quelques autres textes tirés de l’Oreille tendue, ont été rassemblés dans le livre Langue de puck. Abécédaire du hockey (Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p., illustrations de Julien Del Busso, préface de Jean Dion, 978-2-923792-42-2, 16,95 $).

En librairie le 5 mars 2014.

Langue de puck. Abécédaire du hockey (Del Busso éditeur, 2014)

Illustration : Forum de Montréal, 1924, collection du Musée McCord, photo déposée sur Wikimedia Commons

Extension du domaine du soutif

Pétales de poitrine

Ce n’est pas parce qu’elle n’en porte pas que l’Oreille tendue ne s’intéresse pas, linguistiquement, au soutien-gorge.

Elle a eu l’occasion de signaler que «Le balconnet broderie ethnique» était en vente chez Simons.

Un de ses journaux du week-end lui permet, dans le même ordre d’idées, de découvrir à la fois les «Pétales de poitrine» (en anglais : «Gel Petals») et le «Soutien-gorge dos-nu sans bretelles», modèle «Va découver augmenter» (en anglais : «Go Bare Push Up Backless Strapless Bra»).

Soutien-gorge dos-nu sans bretelles

À défaut de leur compétence, l’imagination des traducteurs de Fashion Forms doit être soulignée.