Non, point du tout

Pantoute est un adverbe de négation prisé au Québec.

Il peut servir à répondre à une question.

«Le volleyball, un sport de camping ? Pantoute ! Regardez la finale masculine opposant les Russes aux Brésiliens. Quel beau spectacle ! #jo2012» (@JeanSylvainDube).

Il est aussi employé pour caractériser un sentiment, une idée, une opinion, etc.

«J’y ai été avec ma mère, à matin, j’ai pas envie pantoute d’y retourner !» (Un ange cornu avec des ailes de tôle, p. 81).

«J’apporte rien pantoute. Juste ma peau» (Martine à la plage, p. 76).

«En descendant d’l’avion
Plus aucun doute
Même si vos mots
J’les pigeais pas pantoute
Gens du pays
J’ai su qu’on s’aimerait» («L’accent d’icitte»).

Remarque orthographique. On voit, mais exceptionnellement, pentoute.

«Parler à un jeune employé qui comprend pas le sens du mot “sous-vêtements” euh “culottes?!” #PasGenantPentoute» (@PimpetteDunoyer).

 

[Complément du 29 décembre 2012]

Aussi exceptionnellement, on voit «pan toute», en deux mots, par exemple dans la bande dessinée Onésime d’Albert Chartier (p. 13, p. 14, p. 85, p. 148, p. 202). Il est vrai que le même Chartier écrit aussi «pantoute» (p. 183, p. 191, p. 205, p. 212, p. 230, p. 239, p. 240, p. 262).

 

[Complément du 22 avril 2017]

Martin Winckler vit à Montréal depuis quelques années. Cela a-t-il des effets sur son vocabulaire ? Sans aucun doute, comme l’atteste le tweet ci-dessous. (Et il y a aussi ceci.)

 

[Complément du 26 mars 2019]

En 1937, la brochure le Bon Parler français considérait «Pantoute», mis pour «Pas du tout», comme une «locution vicieuse» (p. 13).

 

[Complément du 30 novembre 2021]

Cela n’a pas empêché l’auteur de Meurtre au Forum de l’utiliser deux fois en 1953 :

— Vous avez pensé qu’il était malade ? dit Alain.
— J’ai rien pensé pantoute, dit l’homme (p. 6).

— C’est deux gamblers. Ça joue aux courses et c’est toujours prêts à gager sur n’importe quoi ?
— Ben ça, c’est intéressant, dit Saturnin. Car moi itou, j’suis assez gambler. [Je] déteste pas ça pantoute» (p. 27).

 

Références

Le Bon Parler français, La Mennais (Laprairie), Procure des Frères de l’Instruction chrétienne, 1937, 24 p.

Boulerice, Simon, Martine à la plage. Roman, Montréal, La mèche, coll. «Les doigts ont soif», 2012, 82 p. Avec des dessins de Luc Paradis.

Chartier, Albert, Onésime. Les meilleures pages, Montréal, Les 400 coups, 2011, 262 p. Publié sous la direction de Michel Viau. Préface de Rosaire Fontaine.

Gaël, «L’accent d’icitte», Diamant de papier, Productions de l’onde, 2010.

Tremblay, Michel, Un ange cornu avec des ailes de tôle. Récits, Montréal et Arles, Leméac et Actes Sud, 1994, 245 p.

Verchères, Paul [pseudonyme d’Alexandre Huot ?], Meurtre au hockey, Montréal, Éditions Police journal, coll. «Les exploits policiers du Domino Noir», 300, [1953], 32 p.

À tu et à vous et à toi et à vous et à tu, bis

La chanson est interprétée par le duo Brigitte sur son album Et vous, tu m’aimes (2012) et s’appelle «Monsieur je t’aime».

Monsieur je t’aime
Monsieur je t’aime
Rendez-vous au cinéma
Impatiente, infidèle
Je ne vous résiste pas

C’est moins radical que «Rendez-vous courtois» de Jérémie Kisling, sur le Ours (2006), mais ça permet de rappeler que les pronoms personnels de la deuxième personne en français offrent de jolies occasions de jeux linguistico-amoureux.

Précisions démolinguistiques

Selon des sources filiales proches de l’Oreille tendue, on pourrait vedger dans la solitude, mais il faudrait être au moins deux pour chiller. (Attention : il serait aussi possible de vedger à plusieurs.)

Dans un cas comme dans l’autre, on glandouille — on fait le légume (vegetable, dans la langue de Julia Child), on relaxe (to chill) —, mais l’un se pratique seul, alors que l’autre, jamais.

Exercice

Quand Grand Corps Malade chante «j’ai chillé sur Sainte-Catherine» («À Montréal», 3ème temps, 2010), veut-il dire qu’il n’était pas seul ou commet-il une faute d’usage (il était seul, donc il ne pouvait pas chiller) ?

N.B. Chiller est un verbe, mais l’adjectif chill est attesté : «“Full Chill”…» (la Presse, 17 avril 2004, p. S5); «full pas chill» (le Devoir, 13 janvier 2004, p. B6). Son sens ? Bien, cool, gentil, planant : «Papa, ça dépend du contexte…» Ah ! le fossé des générations !