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«(Re)lire les correspondances. Hommages à Geneviève Haroche-Bouzinac, 2025, couverture

Depuis la nuit des temps, l’Oreille tendue collabore à Épistolaire, la revue de l’Association interdisciplinaire de recherches sur l’épistolaire. Elle y tient une chronique, «Le cabinet des curiosités épistolaires», dont elle a tiré un recueil en 2011, Écrire au pape et au Père Noël. Depuis le début, la première lectrice de cette chronique est sa collègue et néanmoins amie Geneviève Haroche-Bouzinac. Il était donc normal que l’Oreille s’associe au volume collectif qui vient de paraître en son honneur :

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso (édit.), «(Re)lire les correspondances. Hommages à Geneviève Haroche-Bouzinac, Paris, Classiques Garnier, coll. «Rencontres», 669, 2025, 287 p.

Table des matières

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso, «(Re)lire les correspondances», p. 7-13.

Menant, Sylvain, «Lettre familière sur ses ouvrages à Madame Geneviève Haroche-Bouzinac», p. 17-23.

Cabane, Franck, «Lire entre les lignes. Le plaisir discret de l’épistolaire», p. 25-31.

Richard, Odile, «La lettre dans le roman. Signe ou signet», p. 33-43.

Melançon, Benoît, «Deux curiosités épistolaires», p. 45-51.

Rideau, Gaël, «Lire pour écrire. Images et usages de la lettre dans deux écrits du for privé», p. 55-71.

Obitz-Lumbroso, Bénédicte, «La sœur, lectrice des lettres, lectrice des œuvres», p. 73-87.

Diaz, Brigitte, «“Il n’est point de pays plus magnifique que le cerveau d’un grand écrivain.” Lire les correspondances d’écrivain au XIXe siècle», p. 89-102.

Dufief, Jean-Pierre, «Les Goncourt et les épistolières du XVIIIe siècle», p. 103-113.

Natta, Marie-Christine, «Eugène Sue et les lecteurs des Mystères de Paris», p. 115-127.

Schwerdtner, Karin, «Geneviève Brisac à Virginia Woolf. Lettres de lectrice dans À l’amie des sombres temps», p. 129-144.

Leclerc, Yvan, «Flaubert et ses 273 correspondants », p. 147-170.

De Moraes, Marcos Antonio, «La Correspondance générale de Mário de Andrade. Work in progress», p. 171-186.

Esmein-Sarrazin, Camille, «“Ne mesurez donc point notre amitié sur l’écriture.” Les lettres de Mme de Lafayette à Mme de Sévigné, recueil d’anecdotes et réflexion sur la pratique épistolaire», p. 189-206.

Seth, Catriona, «D’Antoine à Marie-Antoinette. (Re)lire les lettres de l’archiduchesse», p. 207-223.

Allorant, Pierre, «Jean Moulin épistolier. La correspondance du préfet de la Résistance», p. 225-239.

Simonet-Tenant, Françoise, «Lettres et journal personnel. Ressemblances et dissemblances», p. 241-253.

De Vita, Philippe, «Comme un roman ? Une lecture de la correspondance de jeunesse entre François Truffaut et Robert Lachenay», p. 255-264.

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso, «De relire à dé-lire les correspondances», p. 265-268.

Méfiez-vous de vos propres stratagèmes

Carlo Fruttero, Des femmes bien informées, 2007, couverture

«Turin n’est pas précisément le Paris
de Diderot et de Mme du Deffand.»
Carlo Fruttero
Des femmes bien informées

Une amoureuse déçue décide de se venger d’un amant qui s’est détournée d’elle en lui faisant épouser, sans qu’il le sache, une ex-prostituée. Cela donne l’épisode de Mme de la Pommeraye dans Jacques le fataliste, de Diderot, le roman Des femmes bien informées, de Carlo Fruttero, et le film Mademoiselle de Jonquières, d’Emmanuel Mouret.

À chacun sa conclusion et sa morale.

 

Référence

Fruttero, Carlo, Des femmes bien informées. Roman, Paris, Robert Laffont, 2007, 231 p. Édition originale : 2006. Traduction de François Rosso.

Accouplements 252

Alfred Hitchcock, North by Northwest, 1959, affiche

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Depuis le 1er septembre 2024, l’excellent Patrick Boucheron est à la barre de l’émission Allons-y voir, «Un rendez-vous pour analyser les images qui nous entourent et nourrir nos imaginaires», sur France Culture. L’épisode du 24 novembre, «Au théâtre des valeurs de l’art», portait sur le marché de l’art. La commissaire-priseuse Chloé Collin y réfléchissait à son métier. On y entendait, sur les ventes aux enchères, un extrait du film le Tableau volé (2024) de Pascal Bonitzer et la chanson Drouot (1970) de Barbara.

C’est à cette émission que l’Oreille tendue a repensé en revoyant North by Northwest / la Mort aux trousses (1959) d’Alfred Hitchcock. Cary Grant y est particulièrement habile à bousiller le déroulement d’une vente aux enchères, en misant soit trop bas, soit trop haut. La scène est particulièrement drôle.

Allez-y voir.

 

[Complément du 18 décembre 2024]

Lisons Charles Dickens : «Si l’on considère, suivant l’opinion généralement répandue, l’âne comme le type même de la stupidité contente de soi-même, ce qui est peut-être beaucoup plus conventionnel que juste, alors le plus grand âne de Cloisterham est Mr. Thomas Sapsea, le commissaire-priseur» (éd. de 1991, p. 70). Suit un portrait bien peu flatteur (p. 70-80, p. 233, p. 253, p. 273-274, p. 321-326, p. 412).

 

[Complément du 16 février 2025]

La chose est connue : depuis sa jeunesse, l’Oreille tendue collectionne les scènes de fornication dans les moyens de transport.

Elle en découvre une nouvelle dans le plus récent roman de Jean Echenoz, Bristol (2025), mettant en scène un commissaire-priseur :

Le dernier [amant] en date exerce la fonction de commissaire-priseur. Geneviève assurait d’abord ses déplacements professionnels, maintenant elle assouvit également ses pulsions. Il l’appelle, elle arrive, il monte à la place du mort qui est plus pratique pour un rapide rapport au fond d’un parking en sous-sol, il continue de payer ses courses au tarif du compteur (p. 175).

Comme c’est souvent le cas dans ces scènes, la locomotion est brièvement, et heureusement, interrompue.

 

Références

Dickens, Charles, le Mystère d’Edwin Drood (1870, inachevé), dans Dickens, Fruttero & Lucentini, l’Affaire D. ou le crime du faux vagabond, Paris, Seuil, 1991, 473 p. Édition originale : 1989. Traduction de Simone Darses. La traduction du texte de Dickens est de Charles-Bernard Derosne (1874), revue et corrigée par Gérard Hug.

Echenoz, Jean, Bristol. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 2025, 205 p.

Accouplements 46

Marquis de Bièvre, Calembours et autres jeux sur les mots d’esprit, éd. 2000, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Le marquis de Bièvre connut brièvement la gloire au XVIIIe siècle pour son art du calembour. Exemple, tiré des Bièvriana éditées par Antoine de Baecque en 2000 :

Il avait fait planter six ifs dans un bosquet de son jardin, pour y faire prendre le café aux dames qui dînaient chez lui. Là, il leur disait : Mesdames, entendez-le comme vous voudrez, mais voici l’endroit décisif (des six ifs) (p. 127).

Dans la livraison du 13 mars 2016 de l’émission Des Papous dans la tête de France Culture («Les Papous fêtent la francophonie»), un roman interactif a été présenté. Extrait du chapitre rédigé par Lucas Fournier :

— Capitaine, capitaine, nous voici à l’endroit décisif.
— Décisif ? Mais qu’est-ce que vous me chantez là, Marius ? Je vois qu’un If, le nôtre, le château d’If.
— Décisif, parce que nous somme en panne d’essence, insiste Marius.

P.-S.—C’est notamment du marquis de Bièvre que s’est inspiré Patrice Leconte dans le film Ridicule (1996).

P.-P.-S.—Dominique Muller, dans le chapitre qui suit celui de Lucas Fournier, évoque Julie de Lespinasse. C’est une autre histoire.

 

Référence

Bièvre, François-Georges Maréchal, marquis de, Calembours et autres jeux sur les mots d’esprit, Paris, Payot & Rivages, 2000, 155 p. Édition établie et présentée par Antoine de Baecque.

Accouplements 45

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Dans la livraison du 6 mars 2016 de l’émission Des Papous dans la tête de France Culture («Tous papoupoétiques»), on a pu entendre Patrice Delbourg déclarer ceci : «La poésie, on ne sait pas toujours ce que c’est, mais on la reconnaît tout de suite quand on la rencontre, disait Jean L’Anselme […].»

En 1964, la Cour suprême des États-Unis devait statuer sur le caractère obscène, ou pas, du film les Amants de Louis Malle. Un des juges, Potter Stewart, affirma alors ceci : «I shall not today attempt further to define the kinds of material I understand to be embraced within that shorthand description [hard-core pornography]; and perhaps I could never succeed in intelligibly doing so. But I know it when I see it […].» Autrement dit, la pornographie, on ne sait pas toujours ce que c’est, mais on la reconnaît tout de suite quand on la rencontre.

Tout est affaire d’œil / d’oreille.

 

[Complément du 4 octobre 2016]

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