Les zeugmes du dimanche matin et de Balzac

Balzac, Une fille d’Ève, éd. de 1965, couverture

«Les deux amis montèrent dans un cabriolet pour aller racoler les convives, les plumes, les idées et les intérêts» (p. 102).

«Le journal fut baptisé chez elle dans des flots de vin et de plaisanteries, de serments de fidélité, de bon compagnonnage et de camaraderie sérieuse» (p. 103).

«Ce trait fit porter l’actrice en triomphe et en déshabillé dans la salle à manger par les quelques amis qui restaient» (p. 104).

«Quant à la comtesse de Granville, elle vivait retirée en Normandie dans une de ses terres, économisant et priant, achevant ses jours entre des prêtres et des sacs d’écus, froide jusqu’au dernier moment» (p. 154).

Honoré de Balzac, Une fille d’Ève, Paris, Garnier-Flammarion, coll. «GF», 48, 1965, 189 p. Édition originale : 1839. Chronologie et préface par Pierre Citron.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Autopromotion 842

«(Re)lire les correspondances. Hommages à Geneviève Haroche-Bouzinac, 2025, couverture

Depuis la nuit des temps, l’Oreille tendue collabore à Épistolaire, la revue de l’Association interdisciplinaire de recherches sur l’épistolaire. Elle y tient une chronique, «Le cabinet des curiosités épistolaires», dont elle a tiré un recueil en 2011, Écrire au pape et au Père Noël. Depuis le début, la première lectrice de cette chronique est sa collègue et néanmoins amie Geneviève Haroche-Bouzinac. Il était donc normal que l’Oreille s’associe au volume collectif qui vient de paraître en son honneur :

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso (édit.), «(Re)lire les correspondances. Hommages à Geneviève Haroche-Bouzinac, Paris, Classiques Garnier, coll. «Rencontres», 669, 2025, 287 p.

Table des matières

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso, «(Re)lire les correspondances», p. 7-13.

Menant, Sylvain, «Lettre familière sur ses ouvrages à Madame Geneviève Haroche-Bouzinac», p. 17-23.

Cabane, Franck, «Lire entre les lignes. Le plaisir discret de l’épistolaire», p. 25-31.

Richard, Odile, «La lettre dans le roman. Signe ou signet», p. 33-43.

Melançon, Benoît, «Deux curiosités épistolaires», p. 45-51.

Rideau, Gaël, «Lire pour écrire. Images et usages de la lettre dans deux écrits du for privé», p. 55-71.

Obitz-Lumbroso, Bénédicte, «La sœur, lectrice des lettres, lectrice des œuvres», p. 73-87.

Diaz, Brigitte, «“Il n’est point de pays plus magnifique que le cerveau d’un grand écrivain.” Lire les correspondances d’écrivain au XIXe siècle», p. 89-102.

Dufief, Jean-Pierre, «Les Goncourt et les épistolières du XVIIIe siècle», p. 103-113.

Natta, Marie-Christine, «Eugène Sue et les lecteurs des Mystères de Paris», p. 115-127.

Schwerdtner, Karin, «Geneviève Brisac à Virginia Woolf. Lettres de lectrice dans À l’amie des sombres temps», p. 129-144.

Leclerc, Yvan, «Flaubert et ses 273 correspondants », p. 147-170.

De Moraes, Marcos Antonio, «La Correspondance générale de Mário de Andrade. Work in progress», p. 171-186.

Esmein-Sarrazin, Camille, «“Ne mesurez donc point notre amitié sur l’écriture.” Les lettres de Mme de Lafayette à Mme de Sévigné, recueil d’anecdotes et réflexion sur la pratique épistolaire», p. 189-206.

Seth, Catriona, «D’Antoine à Marie-Antoinette. (Re)lire les lettres de l’archiduchesse», p. 207-223.

Allorant, Pierre, «Jean Moulin épistolier. La correspondance du préfet de la Résistance», p. 225-239.

Simonet-Tenant, Françoise, «Lettres et journal personnel. Ressemblances et dissemblances», p. 241-253.

De Vita, Philippe, «Comme un roman ? Une lecture de la correspondance de jeunesse entre François Truffaut et Robert Lachenay», p. 255-264.

De Vita, Philippe et Bénédicte Obitz-Lumbroso, «De relire à dé-lire les correspondances», p. 265-268.

Accouplements 220

Bondrée et Tangente vers l’est, couvertures, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Michaud, Andrée A., Bondrée, Montréal, Québec Amérique, coll. «qa», 2020. Édition numérique. Édition originale : 2014.

«Certains croyaient que Larue avait nommé sa fille Emma à cause de l’admiration qu’il portait à Flaubert et à Emma Bovary, mais ce n’était pas le cas. S’il appréciait Flaubert, il fuyait les Bovary comme la peste. C’était sa femme qui avait choisi ce prénom, y voyant une parenté avec le verbe “aimer”. Larue était trop stupide, à cette époque, trop amoureux pour la contredire et lui indiquer qu’Emma mettait le verbe au passé, j’aimai, tu aimas, il aima. Il le regrettait aujourd’hui, quand il songeait que sa fille portait le nom d’une héroïne dont l’amour dérivait dans le souvenir.»

Kerangal, Maylis de, Tangente vers l’est, Paris, Verticales, coll. «Minimales / Verticales», 2012, 136 p. Édition numérique.

«Ils se sont donné leurs prénoms, se sont donné du feu, se sont donné des clopes. Elle lui a précisé qu’elle était française, frantsouzkaïa et toujours ce geste de poser la paume sur le sternum en appuyant la seconde syllabe, frantsouzkaïa, et en face d’elle, Aliocha a hoché la tête. Une Française, il est déçu — ne sait pourtant rien des femmes françaises, rien, ne connaît d’elles que des Fantine, des Eugénie ou des Emma, femmes obligatoires dont il avait entrevu des fragments de psyché dans des manuels scolaires et reléguées loin de celles qui l’éblouissent, Lady Gaga en tête.»

 

P.-S.—En effet : ce n’est pas la première Emma que nous croisons chez Maylis de Kerangal (voir ici).

Accouplements 219

Naissance d'un pont et Madame Bovary, couvertures, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Flaubert, Gustave, Madame Bovary, Paris, Garnier-Flammarion, coll. «GF», 86, 1966, 441 p. Chronologie et préface par Jacques Suffel. Édition originale : 1857.

«Une fois, au milieu du jour, en pleine campagne, au moment où le soleil dardait le plus fort contre les vieilles lanternes argentées, une main nue passa sous les petits rideaux de toile jaune et jeta des déchirures de papier, qui se dispersèrent au vent et s’abattirent plus loin, comme des papillons blancs, sur un champ de trèfles rouges tout en fleur» (p. 270).

Kerangal, Mailys de, Naissance d’un pont, Paris, Gallimard, coll. «Folio», 5339, 2020, 336 p. Édition numérique. Édition originale : 2010.

«Avant de redémarrer la voiture, Shakira avait pris soin d’essuyer le sable collé sur ses pieds à l’aide de mouchoirs en papier glissés entre ses doigts de pied, puis froissés d’une pression sèche et jetés par la vitre, un par un, la boîte entière bientôt dilapidée. Sanche avait suivi du regard les kleenex blancs qui flottaient en l’air, voletaient doucement, déformés au moindre souffle, se redéposaient enfin au sol, maculant peu à peu tout le paysage.»

 

P.-S.—Toujours dans Naissance d’un pont : «un mouflon blanc aux grosses cornes ambrées recourbées en arceaux comme la coiffure à rouleaux de Mme Bovary».

P.-P.-S.—En sa jeunesse, l’Oreille tendue a consacré quelques lignes à la scène flaubertienne dite «du fiacre» : Melançon, Benoît, «Faire catleya au XVIIIe siècle», Études françaises, 32, 2, automne 1996, p. 65-81. https://doi.org/1866/28660

Accouplements 207

Patrice Desbiens, Fa que, 2023, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Patrice Desbiens, «Canicule», dans Fa que, Montréal, Mains libres, 2023, 69 p., p. 25.

les longs reculons
des camions de livraison
résonnent et tonnent
dans la chaleur cruelle
de la ruelle

Paul Verlaine, «Chanson d’automne», dans Poèmes saturniens, 1866.

Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone

 

P.-S.—Le recueil de Desbiens contient un poème intitulé «Verlaine» (p. 49).