Prière de ne pas déranger

La descendance de l’Oreille tendue est encore, et pour longtemps, sur les bancs d’école. Ladite Oreille ne risque pas manquer de grain à moudre.

Exemple récent.

Le mot «dérangeur»

Le «dérangeur» menacerait donc le «vivre ensemble». La «dérangeure» aussi. Ça ne s’invente pas, et pourtant quelqu’un l’a inventé.

L’école n’est pas finie

Le fils cadet de l’Oreille tendue est encore tout au début de son parcours scolaire. Il aspire pourtant à mieux que ce qu’on lui enseigne. L’autre jour, il s’est mis, tout seul, en plein été, à faire des additions, et complexes. Autodéfinition de cette activité ? Des «mathématiques extrêmes».

Si petit, et déjà touché par ce grand mal.

De l’éditorial

Il y a toutes sortes de raisons pour lire les pages éditoriales des quotidiens.

On peut y consacrer du temps pour se conforter dans son opinion : notre journal pense comme nous. Les indépendantistes ont plus de chances de trouver chaussure à leur pied au Devoir que dans The Gazette.

On peut y passer périodiquement pour se souvenir de détester ceux qui ne sont pas de notre camp. Beaucoup des mêmes indépendantistes aiment ainsi se faire du mal et lire les textes d’André Pratte dans la Presse.

Quoi qu’il en soit des motivations des uns et des autres, ils s’attendent généralement à trouver une position par éditorial. N’est-ce pas le but de l’exercice ?

Mario Roy, de la Presse, ne semble pas entendre tout à fait les choses ainsi. Réagissant à la récente proposition du premier ministre québécois Jean Charest de réintroduire le vouvoiement dans les écoles de la province, il commence par se moquer de la proposition : «Le vouvoiement à l’école ? Et pourquoi pas le retour de la strappe, du petit catéchisme et du char à bœufs ? On se trompe vraiment d’époque» (5 mars 2011, p. A32). Suit un développement (vasouillard) sur le système scolaire québécois, les concours d’insultes dans la communauté hip-hop, l’absence de politesse sur le Web et dans «la vraie vie». Cela se termine… par un éloge du vouvoiement ! «À sa modeste mesure, le vouvoiement a souvent le mérite de mettre une goutte d’huile dans la mécanique sociale.»

Faudrait se décider, non ?

Les paris sont ouverts

Le premier ministre Jean Charest présentait hier, à l’Assemblée nationale, le discours inaugural de la 2e session de la 39e législature du Québec. On peut en retenir au moins deux choses.

Le gouvernement a un ambitieux «Plan nord» : «Ce Plan, qui sera réalisé en partenariat avec les Premières Nations et les Inuits, entraînera des investissements de milliards de dollars et la création de dizaines de milliers d’emplois.»

Le même gouvernement souhaite par ailleurs réintroduire le vouvoiement dans les écoles.

Si elle avait à parier, l’Oreille tendue, à regret et malgré son cynisme envers les annonces gouvernementales en matière d’économie, miserait tout sur le «Plan nord».

P.-S. — Merci à @Ant_Robitaille pour son compte rendu, sur Twitter et en temps réel, du discours du premier ministre.

De l’abus du possessif

Louis Cornellier écrit des livres, tient chronique (sur l’essai) dans les pages du Devoir et milite en faveur de l’enseignement de la littérature nationale d’ici.

Il le faisait dès 2002 :

Pour enrayer le déficit de sens ressenti par les étudiants devant le contenu de leurs deux premiers cours de littérature au collégial, il faudrait donc réformer en profondeur la séquence actuelle et consacrer ces deux cours à la littérature québécoise et à son contexte historique. Ensuite, et ensuite seulement, un troisième cours consacré aux littératures francophones, qu’il ne s’agit surtout pas de discréditer, dans une perspective comparatiste, trouverait tout son sens et sa pertinence. Quant au quatrième cours, qui porte sur la communication efficace (une sorte de rhétorique moderne), laissons-le tranquille : son approche très concrète (lire des journaux, ça s’apprend et ça déniaise) est parfois la seule qui parvienne à stimuler les plus rétifs (le Devoir, 11 février 2002, p. A7).

Rebelote ce samedi, au sujet d’un livre récent sur l’Épreuve uniforme de français du ministère de l’Éducation du Québec à la fin du cégep : «Un tel examen national ne devrait-il pas porter […] exclusivement sur notre littérature nationale ?» (le Devoir, 20-21 février 2010, p. F6)

Le «notre» n’était pas indispensable. On avait compris.