(Accouplements : une rubrique où l’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux textes d’horizons éloignés.)
L’Oreille tendue aime les curiosités épistolaires, ces présences de la lettre là où on ne l’attendrait pas. Elle a même publié un recueil de textes sur le sujet.
Pensez aux chapitres 95 et 96 de Tarmac (2009) de Nicolas Dickner. Dans une enveloppe, le narrateur reçoit un emballage vide. Après la réception de cette lettre d’amour, il part au Japon retrouver celle qu’il aime, Hope Randall.
Puis imaginez un ballon de foot, celui que décrit Jean-Marc Huitorel dans la Beauté du geste (2005) :
On signalera encore le travail de Priscilla Monge, dont certains des objets ont à voir avec l’univers du sport. Elle a ainsi fait réaliser un ballon de football aux pentagones noirs découpés dans des cuirs très élégants, ceux utilisés pour les vêtements et les chaussures de luxe, et dont les pentagones blancs sont constitués de serviettes hygiéniques. Dans cette intrusion du féminin, y compris dans ce qu’il a de plus intime, dans un univers largement dominé par les hommes, et en particulier dans cette symbolique implicite du sang, on peut lire une volonté d’opposer le sang des menstrues au sang des guerriers. On peut aussi y voir une dénonciation de l’usage sanguinaire que les dictatures d’Amérique du Sud (l’artiste est née au Costa Rica), au Chili ou en Argentine, ont pu faire des stades (p. 173).
Le Michel «Mickey» Bauermann de Nicolas Dickner ne reçoit pas un morceau de cuir.
Références
Huitorel, Jean-Marc, la Beauté du geste. L’art contemporain et le sport, Paris, Éditions du regard, 2005, 214 p. Ill.
Dickner, Nicolas, Tarmac, Québec, Alto, 2009, 271 p. Ill.
Melançon, Benoît, Écrire au pape et au Père Noël. Cabinet de curiosités épistolaires, Montréal, Del Busso éditeur, 2011, 165 p.