Le zeugme du dimanche matin et d’Olympe de Gouges

Olympe de Gouges, «Femme, réveille-toi !», 2014, couverture

«On a vu tomber en France, depuis quelques mois, le voile de l’erreur, de l’imposture, de l’injustice, et enfin les murs de la Bastille; mais on n’a pas vu encore tomber le despotisme que j’attaque. Je me vois donc réduite à essayer de l’abattre.»

Olympe de Gouges, «Réponse au champion américain ou colon très avisé à connaître» (18 janvier 1790), dans «Femme, réveille-toi !» Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne et autres écrits, édition présentée par Martine Reid, Paris, Gallimard, coll. «Folio 2 €», 5721, 2014, 99 p., p. 63-70, p. 65.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Portrait criminocapillaire du jour

Olympe de Gouges, «Femme, réveille-toi !», 2014, couverture

«Tu te dis l’unique auteur de la Révolution, tu n’en fus, tu n’en es, tu n’en seras éternellement que l’opprobre et l’exécration. Je ne m’épuiserai pas en efforts pour te détailler; en peu de mots, je vais te caractériser. Ton souffle méphétise l’air pur que nous respirons actuellement, ta paupière vacillante exprime malgré toi toute la turpitude de ton âme, et chacun de tes cheveux porte un crime.»

Olympe de Gouges, «Pronostic sur Maximilien de Robespierre par un animal amphibie» (5 novembre 1792), dans «Femme, réveille-toi !» Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne et autres écrits, édition présentée par Martine Reid, Paris, Gallimard, coll. «Folio 2 €», 5721, 2014, 99 p., p. 73-78, p. 73-74.

Interrogation argumentative

Christiane Bailey et Jean-François Labonté, la Philosophie à l’abattoir, 2018, couverture

L’Oreille tendue, certains le savent, est lectrice des collections «Documents» et «Pièces» de la maison Atelier 10. Ceux-là ne s’étonneront pas qu’elle vienne de lire la Philosophie à l’abattoir. Réflexions sur le bacon, l’empathie et l’éthique animale, de Christiane Bailey et Jean-François Labonté.

Les sujets abordés sont d’actualité : le rapport aux animaux (d’élevage, de compagnie, sauvages), l’alimentation, les questions environnementales. L’information est à jour — plusieurs titres cités sont très récents —, même si des auteurs classiques sont convoqués, d’Aristote à Voltaire et Jean-Jacques Rousseau. Le rythme est rapide. Certaines formules sont inattendues : «animaux non humains» (p. 48), «citoyenneté animale» (p. 52), «droit à l’autodétermination» des animaux (p. 57), «justice interespèce» (p. 93). Le ton est engagé.

Cela étant, voilà encore un ouvrage qui n’est pas fait pour l’Oreille. D’une part, elle est omnivore; or cela paraît inconcevable pour les auteurs, qui fustigent l’«omnivorisme», fût-il «consciencieux» (p. 71). D’autre part, et surtout, elle n’aime pas se faire donner des leçons.

Prenons deux phrases de la page 26 : «Nous pouvons résoudre ce “paradoxe de la viande” en modifiant nos comportements, comme le font les véganes qui cessent d’en manger. Si cela semble l’option la plus juste envers les animaux, la plus rationnelle et la plus saine d’un point de vue psychologique, c’est aussi la moins couramment choisie» (p. 26). Le verbe «sembler» n’est là que pour faire croire que la position avancée serait nuancée; oublions-le. Vous mangez de la viande ? Votre choix, affirment les auteurs, est injuste envers les animaux, irrationnel et malsain du «point de vue psychologique».

Sur le plan de l’argumentation, c’est une façon de procéder dont on peut imaginer qu’elle ne portera guère de fruits. Tout le monde n’aime pas se faire dire qu’il est injuste, irrationnel et malsain — mais peut-être les auteurs veulent-ils prendre position plus que convaincre ceux qui ne partagent pas leurs croyances.

P.-S.—Sur cette question, on lira les publications de Renan Larue, par exemple celles-ci.

 

Référence

Bailey, Christiane et Jean-François Labonté, la Philosophie à l’abattoir. Réflexions sur le bacon, l’empathie et l’éthique animale, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 14, 2018, 96 p. Ill.

HC en CH

Quatre personnalités politiques avec le chandail des Canadiens

L’Oreille tendue a déjà eu l’occasion de montrer quelques pièces de sa collection (inutile) de chanteurs / musiciens portant le chandail des Canadiens de Montréal — c’est du hockey. Ils ne sont bien sûr pas les seuls.

C’est aussi le cas de l’ancienne mairesse de Lac-Mégantic, Colette Roy-Laroche, d’un premier ministre de Chine, Li Keqiang, et, cette semaine à Montréal, des Clinton, Bill et Hillary.

Les politiques aussi voient les avantages de revêtir la sainte flanelle.

 

[Complément du 25 août 2021]

Pythagore aussi, Pythagore déjà (en 1972).

Jacques Languirand, De Mc Luhan à Pythagore, 1972, couverture

Humeur du moment ?

Philippe Girard, la Grande Noirceur, 2014, p. 61

Le Petit Robert (édition numérique de 2014) connaît le sens «régional (Canada)» de marabout : «De mauvaise humeur, désagréable. => boudeur, bougon, irritable.»

Les exemples ne manquent pas, qui confirment la définition du Robert.

Chez Bernard Arcand : «Les faits donnent incontestablement raison aux marabouts et à tous ceux qui se lamentent» (p. 21).

Chez Éric Dupont : «Ce dernier, un homme autrement assez doux, ne frappait pas par conviction, mais parce que sa femme l’avait, par ses hurlements, tiré d’un sommeil profond dont il était sorti marabout, impatient et irrité» (p. 151-152).

Chez David Goudreault : «Reynald était marabout. La journée allait être longue» (p. 112).

Chez Érika Soucy : «Ah, y va pas pire… Hier, y’était un peu marabout là, mais…» (p. 130).

 

Illustration tirée de la Grande Noirceur, de Philippe Girard (p. 61).

 

Références

Arcand, Bernard, Abolissons l’hiver ! Livre (très) pratique, Montréal, Boréal, 1999, 112 p.

Dupont, Éric, la Fiancée américaine. Roman, Montréal, Marchand de feuilles, 2015, 877 p. Édition originale : 2012.

Girard, Philippe, la Grande Noirceur, Mécanique générale, 2014, 87 p.

Goudreault, David, la Bête à sa mère, Montréal, Stanké, 2015, 231 p.

Soucy, Erika, les Murailles, Montréal, VLB éditeur, 2016, 150 p.