Dans les «Manchettes» de l’application Cyberpresse pour iPhone le 12 octobre :
Ils ont survécu (en l’occurrence, au cancer); cela devrait être bien. Ils sont un fléau (pour leur siècle); ça l’est moins. Les pauvres.
« Nous n’avons pas besoin de parler français, nous avons besoin du français pour parler » (André Belleau).
Dans les «Manchettes» de l’application Cyberpresse pour iPhone le 12 octobre :
Ils ont survécu (en l’occurrence, au cancer); cela devrait être bien. Ils sont un fléau (pour leur siècle); ça l’est moins. Les pauvres.
Hypothèse : pour faire ressortir ce que les locutions figées ont, justement, de figé, rien de tel que d’imaginer leur antonyme.
Exemples
Tout le monde se réclame du développement durable. Que serait un développement momentané ?
Dans le Devoir du 7 octobre, Jean Dion parle de la (potentielle) «grippe d’homme» du gardien des Canadiens de Montréal, Carey Price (p. B6) ? Connaît-on la grippe de femme ?
Sur Twitter, une lectrice assidue de l’Oreille tendue, @PimpetteDunoyer, se demande, à la suite d’autres twitteurs, pourquoi un réseau est toujours vaste dans les faits divers. Imagine-t-on un réseau de trafiquants de drogue exigu ?
Que serait l’antonyme d’aidant naturel ? Aidant culturel ? Aidant contre nature ?
Vous avez trouvé la solution gagnant-gagnant ? Ça vous fait une belle jambe : il n’y a pas de solution perdant-perdant.
Tout le monde est pour l’inclusion. Personne n’est pour l’exclusion.
Comme toute hypothèse, celle-là devra être soumise à des expériences plus soutenues. L’Oreille tendue vous invite à y participer.
[Complément du 18 juin 2016]
Dans la Presse+ du jour, l’Oreille tendue découvre «gagnant-gagnant-gagnant», mais pas perdant-perdant-perdant.
Dans le Devoir du 5 octobre, sous la plume de Michel David : «Autant il faut être deux pour danser le tango, autant il ne peut y avoir de trêve que si elle est respectée de part et d’autre» (p. A3).
Pourquoi «danser le tango», et non simplement danser, ou danser une valse, ou valser ? Parce qu’en anglais on dit «It takes two to tango» ?
Oublions le s de trop dans «Notre tartes». Laissons de côté le mystérieux «Écrit [avec accent] des messages speciaux [sans accent]». Ne nous interrogeons pas sur l’identité du jury qui a élu ces «Fameuses tartes maison de Montreal [sans accent]».
Arrêtons-nous à «Venez essaiyer [avec un i de trop] notre tartes de citrouille festive».
Festif, ive : «Qui se rapporte à la fête; de la fête; qui est de la nature de la fête, qui constitue une fête», dit le Petit Robert (édition numérique de 2010) de l’Oreille tendue.
On pourrait se contenter de supposer que la tarte est festive, car destinée à une fête, en l’occurrence Halloween. On pourrait encore imaginer que c’est la citrouille qui est festive; elle aussi a le droit de s’amuser.
L’Oreille ne peut cependant pas faire autrement qu’entendre dans ce festive une autre manifestation du festivalesque généralisé dans lequel baigne le Québec et qu’a décrit Pierre Popovic.
Après tout, il doit bien y avoir un Festival de la tarte et un Festival de la citrouille, voire un Festival de la tarte à la citrouille, quelque part dans la Belle Province.
[Complément du 10 juillet 2020]
Dix ans plus tard, le festif est toujours bien en vie : trois preuves récentes.
Dans le Devoir des 4 et 5 juillet : «L’auberge festive Sea Shack à Sainte-Anne-des-Monts, en Gaspésie» (cahier Plaisirs, p. 3).
Sur Twitter, le 7 juillet :
— Gabriela Manzoni (@ManzoniGabriela) July 7, 2020
Hier soir, à la télé :
Référence
Popovic, Pierre, «Le festivalesque (La ville dans le roman de Réjean Ducharme)», Tangence, 48, octobre 1995, p. 116-127. https://doi.org/10.7202/025866ar
Les Canadiens de Montréal entreprennent leur saison 2010-2011 ce soir contre les Maple Leafs de Toronto. Le moment est propice pour parler des gens qui entourent les hockeyeurs, leurs dirigeants et les innombrables commentateurs officiels.
Il y a les partisans, certains déraisonnables, d’autres parfaitement posés. Parmi ces derniers, il y a l’Oreille tendue, qui a attendu hier quatre pleines heures avant de télécharger sur son iPhone l’application LP Hockey (la Presse hockey).
Ces partisans, raisonnables ou pas, ont souvent tendance à se transformer en gérants d’estrade, toujours prêts à échanger Untel, à faire jouer tel autre, à remplacer l’entraîneur.
Parmi les partisanes — on ne sache pas que cela se pratique beaucoup chez les hommes —, il faut faire une place à part à celles qui sont prêtes à offrir leur corps sur l’autel du sport national. En anglais, on appelle ces groupies particulièrement délurées des puck bunnies; plus crûment, le magazine Urbania parle des plottes à puck.
Ces partisans sont connus. Mais que sait-on de ces travailleurs de l’ombre qui aident à la formation linguistique des hockeyeurs ? Trop peu de choses.
Il fut une époque, déjà lointaine, où le français occupait une place de choix dans le vestiaire des Canadiens. La situation s’est transformée, au point où il peut arriver que le capitaine de l’équipe ne puisse pas s’exprimer dans la langue de René Lecavalier. Cela a été le cas pour Saku Koivu; c’est aujourd’hui le cas pour Brian Gionta, tout nouvellement nommé, même s’il a promis d’essayer de baragouiner le français sous peu. (Par rapport à ses coéquipiers, Gionta n’est pas très grand. À une certaine époque, on aurait parlé du «diminutif Brian Gionta». C’est un autre débat.)
Un dramaturge a déjà consacré quelques répliques à l’apprentissage du français par les joueurs des Canadiens : Rick Salutin, dans les Canadiens, une pièce rédigée avec la collaboration d’un ex-gardien des buts de l’équipe, Ken Dryden, met en scène Mlle Miron, une professeure de langue exerçant pour la première fois au Forum de Montréal (p. 121-133).
Il est difficile de la distinguer des autres — «All those French teachers look the same» —, mais le jour où elle entre en classe, lui, est tout particulier : c’est le 15 novembre 1976, jour de la première accession au pouvoir du Parti québécois.
Au début de la leçon, Mlle Miron commence par se plaindre du fait que les cours sont très irréguliers — trois en cinq semaines —, ce qui n’est pas optimal, étant donné le «niveau primitif» des élèves (ils ne sont que quatre). Rapidement, la colère fait place à l’insatisfaction : «Mais qui êtes-vous donc ? Des freaks du bilinguisme ?» Ce n’est qu’alors qu’elle se rend compte qu’elle s’adresse aux joueurs des Canadiens.
Après une discussion sur les bienfaits et les limites du bilinguisme, la leçon se terminera en chanson :
Un gros paycheque !
Un gros jockstrap !
Des belles bretelles !
Un chandail propre !
Des beaux bas blancs !
Des bonnes jambières !
Des épaulettes !
Des beaux patins !
Ni partisane, ni puck bunny, Mlle Miron est dans une catégorie à part, soucieuse à la fois de langue et de sport. Elle sera peu entendue.
[Complément du 15 novembre 2013]
On vient d’apprendre que les Canadiens de 2013 suivent eux aussi des cours de français.
Références
Salutin, Rick, avec la collaboration de Ken Dryden, Les Canadiens, Vancouver, Talonbooks, 1977, 186 p. Ill. «Preface» de Ken Dryden.
Urbania, 21, automne 2008, 82 p. Ill. Dossier «Spécial hockey».