Vidéo du jour

Conférence «Qui fait changer la langue française ?», page d'accueil

Sous le titre «Qui fait changer la langue française ?», France Culture vient de mettre en ligne la vidéo de deux conférences présentées en septembre 2019 dans la série «Les conférences à la Cité des sciences et de l’industrie» (Universcience), cycle «Est-ce ainsi que les langues vivent ?»

Dans la première partie, la plus brève, Pierrette Crouzet-Daurat décrit le circuit de la néologie officielle en France.

Dans la seconde, Maria Candea essaie de répondre à la question «Qui fait changer la langue française ?»

En définissant des concepts  : langue, dialecte, évolution, variants / invariants, insécurité linguistique.

En s’attachant à plusieurs objets : graphie, prononciation, accord, orthographe, néologie, accord (de proximité) — et, donc, dictionnaire.

En s’appuyant sur un large corpus : les Serments de Strasbourg, Chrétien de Troyes, Molière, Boileau, Fréhel et Trenet, Chirac et Macron.

En offrant des masses d’exemples : monnoie, dompter, boloss / bolos, serpillière, pharmacienne.

En utilisant des ressources diverses : la bibliothèque numérique Gallica, des dictionnaires (le Petit Larousse, le Petit Robert, le Multi), des travaux scientifiques (dont les cartes de Mathieu Avanzi), l’ouvrage Sidonie ou le français sans peine de Salomon Reinach (1913) et même Le niveau baisse !

En disant du mal de l’Académie française, comme ici.

À voir.

Néologismes des lieux et du vendredi

ChiNazi, graffiti, Hong-Kong, 2019

Des gens aiment les catacombes de Paris : ce sont des cataphiles. Ils sont souvent pourchassés par les cataflics. (C’est The New Yorker qui le dit.)

Les mots de la Silicon Valley sont des californismes. (C’est Alain Rey qui le dit.)

Le monde occidental se serait palestinisé. (C’est Elia Suleiman qui le dit.)

Une famille peut vivre ensemble sans vivre ensemble; voilà l’utilité du sépartement. (C’est France Culture qui le dit.)

Pour aller à la plage en ville, il y a l’urbeach. (C’est encore France Culture qui le dit.)

Le point Godwin a touché Hong-Kong, où l’on parle dorénavant de ChiNAZI. (C’est Language Log qui le dit.)

Si des villes meurent, c’est qu’on les tue, d’où urbicide. (C’est Bogdan Bogdanovic qui le dit.)

On vous chasse de chez sous prétexte de rénovations majeures ? Vous êtes renovicted. (C’est le Wiktionary qui le dit.)

Une nouvelle espèce humaine se reproduirait sur le Plateau Mont-Royal, le plateaupithèque. (Ce sont les médias qui le disent depuis quelque temps déjà.)

Autopromotion 450

Actrice / Autrice

Entre 14 h et 15 h, l’Oreille tendue sera à la radio de Radio-Canada, à l’émission Plus on est de fous, plus on lit !, au micro de Marie-Louise Arsenault, avec Martine Delvaux, pour parler de changement linguistique et du mot autrice.

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

Deux lectures :

Candea, Maria et Laélia Véron, Le français est à nous ! Petit manuel d’émancipation linguistique, Paris, La Découverte, coll. «Cahiers libres», 2019, 238 p.

Evain, Aurore, «Histoire d’autrice, de l’époque latine à nos jours», Sêméion, 6, 2008. http://siefar.org/wp-content/uploads/2015/09/Histoire-dautrice-A_-Evain.pdf

Une vidéo :

http://mediateur.radiofrance.fr/chaines/radio-france/autrice-maria-candea/

Un tweet :

Préfixe du jour

Yves Boisvert, la Presse+, 18 août 2019, titre

Dans sa chronique du jour du quotidien montréalais la Presse+, Yves Boisvert répond aux gens qui, pour cause d’écoanxiété, décident de ne pas faire d’enfant : «Oui, cette idée de déprocréation, ça se comprend. Les raisons de désespérer sont nombreuses et spectaculaires.» Boisvert ne partage pourtant pas cette idée.

L’oreille de l’Oreille tendue s’est tendue devant le préfixe dé- dans déprocréation. Pourquoi pas refus de la procréation ou non-procréation, voire improcréation ?

Le préfixe dé- a les sens suivants suivant le Petit Robert (édition numérique de 2018) : «Élément, du latin dis-, qui indique l’éloignement (déplacer), la séparation (décaféiné), la privation (décalcifier), l’action contraire (décommander, défaire, démonter).» S’appliquent-ils ici ?

Éliminons «l’éloignement» et «la séparation» : ce n’est manifestement pas ce qui est en cause. De même, «l’action contraire» n’est pas envisageable : il ne s’agit pas de revenir à un état antérieur à la création (en décommandant, en défaisant ou en démontant un enfant — façon de parler).

Reste «la privation». Prenons l’exemple du Robert, décalcifier : «Priver d’une partie de son calcium.» Encore une fois, il est difficile d’enlever quelque chose au type de création dont il est question. L’enfant existe ou pas.

Bref, l’Oreille tendue n’est pas convaincue par le mot (par les arguments de Boisvert, en revanche, si), ce qui ne veut rien dire : l’usage tranchera.

P.-S.—Pour l’instant, si l’on se fie à Google, Yves Boisvert est une des très rares personnes à avoir employé le mot. (Ô ironie ! L’Oreille s’ajoutera bientôt à ce petit nombre.)

Fil de presse 030

Logo, Charles Malo Melançon, mars 2021

Quelques ouvrages récents sur la langue ? À votre service.

Bard, Christine et Frédérique Le Nan (édit.), Dire le genre. Avec les mots, avec le corps, Paris, CNRS éditions, 2019, 304 p.

Bernhard, Delphine, Maryvonne Boisseau, Christophe Gérard, Thierry Grass et Amalia Todirascu (édit.), la Néologie en contexte. Cultures, situations, textes, Limoges, Lambert-Lucas, coll. «La Lexicothèque», 2018, 304 p.

Candea, Maria et Laélia Véron, Le français est à nous ! Petit manuel d’émancipation linguistique, Paris, La Découverte, coll. «Cahiers libres», 2019, 238 p.

Lecture par l’Oreille tendue ici.

Cannone, Belinda et Christian Doumet (édit.), Dictionnaire des mots parfaits, Vincennes, Éditions Thierry Marchaisse, 2019, 216 p.

Guérin, Françoise et Laurence Brunet (édit.), Actes du XXXVIIIe Colloque international de linguistique fonctionnelle. La Rochelle, France 17-21 octobre 2016, Louvain, EME éditions, coll. «Actes de la SILF», 2019, 96 p.

Highway, Tomson, Pour l’amour du multilinguisme. Une histoire d’une monstrueuse extravagance, Montréal, Mémoire d’encrier, coll. «Cadastres», 2019, 72 p. Traduction de Jonathan Lamy.

Kelly, Michael, Hilary Footitt et Myriam Salama-Carr (édit.), The Palgrave Handbook of Languages and Conflict, Palgrave Macmillan, 2019, xv/527 p.

Lapalme, Georges-Émile, Lecture, littérature et écriture, Montréal, Del Busso éditeur, 2019, 227 p. Textes choisis, présentés et édités par Claude Corbo.

Manesse, Danièle et Gilles Siouffi (édit.), le Féminin & le masculin dans la langue. L’écriture inclusive en questions, Paris, ESF et Cahiers pédagogiques, 2019, 208 p.

Mortamet, Clara (édit.), l’Orthographe. Pratiques d’élèves, pratiques d’enseignants, représentations, Rouen, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2019, 254 p.

Office québécois de la langue française, Direction de la recherche, de l’évaluation et de la vérification interne, Rapport sur l’évolution de la situation linguistique au Québec, Montréal, Office québécois de la langue française, 2019, xx/126 p.

Romainville, Anne Sophie, les Faces cachées de la langue scolaire. Transmission de la culture et inégalités scolaires, Paris, La dispute, coll. «L’enjeu scolaire», 2019, 224 p.

Seithumer, Ingrid et Lili Scratchy, la Grande Aventure du langage, Arles, Actes Sud junior, 2019, 64 p.

Sorensen, Janet, Strange Vernaculars. How Eighteenth-Century Slang, Cant, Provincial Languages, and Nautical Jargon Became English, Princeton, Princeton University Press, 2017, 352 p.

Taylor, Charles, l’Animal langage. La compétence linguistique humaine, Montréal, Boréal, 2019, 472 p. Traduction de Nicolas Calvé.

Viennot, Bérengère, la Langue de Trump, Paris, Les Arènes, 2019, 152 p.