Parfum d’essence

Pédale d’accélérateur

Tout un chacun le sait : il ne faut pas s’énerver, il importe de garder son calme, il n’est pas bon de s’emporter — bref, il faut respirer par le nez.

Une autre expression québécoise, moins courante, exprime le même souhait de contrôle de soi. Elle vient du lexique de l’automobile.

L’Oreille tendue en trouve un exemple dans un twitt récent d’@OursAvecNous : «Une page Fb pour la démission de Beauduin “n’a fait qu’accélérer la dégradation de la programmation” ? Prenez votre gaz égal, siouplè.»

Prendre son gaz égal : ne pas appuyer indûment sur le champignon.

Joli.

 

[Complément du 10 décembre 2024]

Découverte sur Twitter, la version rurale non motorisée : «Enlève une bûche (du poêle).»

Villégiature linguistique

Pour ses vacances annuelles, l’Oreille tendue a quitté son pavillon montréalais avec femme, progéniture et caniche royal à destination de la Gaspésie.

Pour se rendre dans cette péninsule québécoise, il faut rouler longtemps. Avant d’y pénétrer, on doit notamment traverser la région du Bas-du-Fleuve. C’est alors qu’on découvre qu’elle a une «capitale touristique», en l’occurrence Le Bic. Ça ne fait toujours qu’une capitale québéco-canadienne de plus.

À quelques jours près, la famille entière aurait pu emprunter le «sentier de la bouette» (le Devoir, 2 août 2011, p. A1), celui qui, à marée (très) basse, permet d’avoir accès à l’île Verte, à pied, à partir de la côte, entre Rivière-du-Loup et Trois-Pistoles. (Bouette ? Le mot désigne, au Québec, la boue. S’agissant de ce «sentier», on y trouve en fait surtout de la vase.)

Eût-elle été pâle des genoux, l’Oreille aurait pu s’arrêter dans une clinique médicale de Matane. On assure que le service y est rapide.

Clinique Sang délai, Matane, 2011

Le point de chute de cette année était Les Méchins, secteur Les Îlets, à 675 kilomètres à l’est du mont Royal. Sur ce village, on se contentera de deux remarques, l’une sociologique, l’autre onomastique.

On déplorera, d’une part, que la grande criminalité sévisse jusque dans ce hameau. C’est du moins ce que l’on peut croire devant telle (légitime) demande.

Poubelles, «Ne pas voler», 2011

D’autre part, on n’oubliera pas que les habitants des Méchins sont des Méchinois. On n’ose imaginer ce qu’un restaurateur cantonais amateur de mauvais jeux de mots pourrait faire de pareil gentilé.

P.-S. — Pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? La famille a aussi poussé une pointe jusqu’à Exploramer, le «complexe d’activités axé sur le milieu marin du Saint-Laurent», de Sainte-Anne-des-Monts. On y a constaté, non sans étonnement, que le plus célèbre des mots «mots de quatre lettres» en anglais y serait d’usage commun. (Non, ce n’est pas «love».)

Exploramer, panneau explicatif, 2011

Citation notulienne du jour

Philippe Didion, Notules dominicales de culture domestique, 2008, couverture

«Vie scolaire. Premier conseil de classe. À nouvelle direction nouvelle mise en scène : le principal a fait installer dans la salle un ordinateur relié à un téléviseur sur lequel on peut voir (il ne dit pas “voir”, bien sûr, il dit “visualiser”, comme il dit cadrer ou cibler pour définir, optimiser pour améliorer, affiner pour préciser et dysfonctionnement pour couille dans le potage) les résultats des élèves et leur évolution sous forme de graphiques riches en courbes colorées. L’école du XXIe siècle est en marche, seulement, comme j’ai pour ma part conservé mon acuité visuelle du XXe, tout ce que je distingue de ma place est un vague halo multicolore, une sorte de vision de la façade de Beaubourg sans verres correcteurs. Je ne m’en sens pas démesurément frustré. (n° 89, 15 décembre 2002).»

Philippe Didion, Notules dominicales de culture domestique, Saint-Cyr-sur-Loire, publie.net, coll. «Temps réel», 2008, 355 p., p. 53. Édition numérique.

Citation conjugale du jour

Mlle L. Nitouche, l’Ami des salons, 1892, page de titre

 

«En famille, une femme dit : Mon mari. Dans le monde elle dit : Monsieur un tel. Et d’un autre côté, un mari dit : Ma femme. Le mot “mon épouse” est ridicule.»

Mlle L. Nitouche, l’Ami des salons, Montréal, Librairie Beauchemin limitée, 1892, 95 p., p. 60-61.